Quand l’art devient thérapie

Quand l’art devient thérapie
Pauline Gravel
27 janvier 2018
L’art-thérapie a désormais gagné ses lettres de noblesse dans la métropole. Le Musée des beaux-arts de Montréal lui consacre un nouvel espace et emploie un art-thérapeute à temps plein, une initiative unique au monde.
Stephen Legari, art-thérapeute au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), accueille régulièrement de jeunes adultes autistes à l’Atelier international d’éducation et d’art-thérapie Michel de la Chenelière du musée. « Comme les autistes ont beaucoup de difficulté à décoder les émotions exprimées par les autres, ainsi qu’à reconnaître et à extérioriser leurs propres émotions, nous les aidons à relever ce défi à l’aide des collections du musée et de la création », précise-t-il. Les séances débutent par le choix d’un thème, le plus souvent deux émotions contraires, comme la peur et la sécurité. On part ensuite dans les galeries du musée à la recherche de cinq oeuvres qui représentent ces deux émotions. Chaque participant doit alors exprimer ce qu’il voit dans ces oeuvres. « Lors d’une séance sur la peur et la sécurité où l’on s’est arrêtés devant des oeuvres inuites illustrant un conte terrifiant dans lequel les doigts coupés deviennent des mammifères, on a amené les participants à parler de leurs propres peurs et à les analyser afin de voir si elles sont réalistes ou non rationnelles », souligne M. Legari. « Le fait de savoir que d’autres personnes éprouvent aussi des peurs contribue souvent à diminuer leurs propres peurs », ajoute-t-il.

Photo : Anna Lupien
Le programme du Musée des beaux-arts de Montréal, en collaboration avec l’Institut Douglas de l’Institut universitaire de santé mentale Douglas, emploie un art-thérapeute à temps plein.

La séance se poursuit par une activité de création où les participants sont invités à représenter l’émotion analysée à l’aide d’une forme d’art adaptée à l’émotion. « Chaque forme d’art offre une possibilité différente pour exprimer l’émotion : le collage est plus cognitif, car c’est comme un casse-tête qu’on forme sur la table ; fluide, la peinture est plus émotionnelle ; l’argile est pour sa part très physique et permet de traduire la colère, par exemple, en la déformant et en la frappant, mais d’une façon sécurisante », explique l’art-thérapeute.
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Recherche scientifique

L’art-thérapie est de plus en plus utilisé pour soigner et aider les personnes ayant des problèmes aussi divers que l’autisme, les troubles de l’alimentation, la schizophrénie, l’anxiété, la dépression, le cancer du sein et la maladie d’Alzheimer. Et les chercheurs sont de plus en plus nombreux à éprouver scientifiquement ses bienfaits. Nathalie Bondil, directrice générale et conservatrice en chef du MBAM, a créé le comité Art et Santé du musée. Présidé par Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec, et composé de 17 experts issus des milieux de la recherche, de la santé, de l’art-thérapie et des arts, ce comité a pour mandat d’évaluer les projets de recherche qui sont proposés.
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La puissance de l’art

La majorité des participantes apprécient de pouvoir oublier toutes leurs préoccupations pendant les quelques heures de la séance. Elles soulignent aussi les bienfaits de rencontrer d’autres personnes qui vivent avec un cancer du sein comme elles et « de redécouvrir leur créativité pour exprimer des choses qui sont parfois très difficiles à nommer ». Ce programme fera bientôt l’objet d’une étude scientifique menée par la psychologue Jacinthe Lambert, qui est professeure coresponsable des programmes d’art-thérapie en milieu muséal à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT).
« Les oeuvres d’art suscitent en nous une émotion esthétique, elles communiquent sensiblement avec nos traits biologiques de grands primates. L’art s’adresse à nous en tant qu’êtres humains, dans notre chair, dans notre sang, par nos tripes. Dans un lieu où il y a des oeuvres d’art, nous sommes devant un mode de communication, d’échange et d’émotion qui est très différent de celui que l’on pourrait avoir devant un écran, face à un professeur ou devant une scène, où on se trouve également en situation passive. Face à des oeuvres d’art, nous sommes dans une dynamique qui nous engage et qui nous permet de mieux interagir d’un point de vue social, donc avec les autres, et en même temps de renforcer notre estime de nous. L’art nous fait du bien en société et en tant qu’individus », affirme Nathalie Bondil.

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Une séance d’art-thérapie avec les malades psychiatriques de Casablanca

Logo-AL-Huffington-PostUne séance d’art-thérapie avec les malades psychiatriques de Casablanca
HuffPost Maroc | Par Anaïs Lefébure
07/08/2016

PSYCHIATRIE – « Ce qui est plus triste qu’une œuvre inachevée, c’est une œuvre jamais commencée ». Cette citation pourrait être le crédo de Boushra Benyezza. Elle est inscrite sur une carte collée au mur de l’atelier d’art-thérapie du centre psychiatrique de l’hôpital Ibn Rochd de Casablanca.

Boushra Benyezza

Psychothérapeute et artiste, elle a lancé bénévolement, il y a cinq ans, le premier atelier d’art-thérapie du Maroc. Elle a la certitude que l’enfermement ou les traitements médicamenteux ne peuvent pas être l’unique remède pour soigner les schizophrènes, dépressifs, toxicomanes ou bipolaires. Quoi qu’il en soit l’art et la création en général peuvent, aussi, pousser les patients vers la voie de la guérison.

Le décor est planté

Il est un peu plus de onze heures, ce vendredi, quand elle nous ouvre les portes de l’unique hôpital psychiatrique de Casablanca. Celui-ci dispose d’une centaine de lits seulement (pour une ville qui compte plus de 4 millions d’habitants). Il y a aussi quelques pièces d’isolement dans lesquelles sont enfermés les patients les plus dangereux ou les suicidaires. « Ils ont juste droit à des couvertures auxquelles on retire les bords pour éviter qu’ils ne les déchirent et tentent de se tuer avec », nous explique Boushra Benyezza. Derrière la minuscule fenêtre d’un isoloir, un patient nous observe, le regard vitreux. Le décor est planté.

« Combattre la stigmatisation »

La spécialiste a suivi une formation de deux ans en art-thérapie à Tours, en France. Aujourd’hui, elle reçoit quatre nouveaux patients pour son atelier hebdomadaire. Quatre hommes, entre 25 et 50 ans qui, pendant une heure trente environ, vont pouvoir s’exprimer. Ils évoluent librement autour d’une table et d’une tasse de café préparée par ses soins. Après un temps de rédaction, où chacun doit écrire son histoire sur une feuille blanche, vient celui de la présentation. Ensuite, il s’agira de création en s’inspirant d’images distribuées par l’art-thérapeute qu’ils sont libres de copier ou de réinterpréter.

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