BMP – Corps recroquevillé en formes cubistes

BMP – Corps recroquevillé en formes cubistes
Parfois les traitements lourds deviennent compliqués à supporter. Il m’arrive de vouloir rester en boule, parce que c’est dans cette position que j’ai moins mal. Bien sûr j’essaye de garder le sourire, et de faire au mieux pour continuer à faire du bénévolat. Mais j’ai voulu, comme je le fais souvent, essayer de donner une forme, dans une émotion apaisante envers cette douleur, à mes angoisses entre autres qui m’accompagnent.

Comment avez-vous concrétiser votre esquisse ?

J’apprécie bien cette forme cubiste, parce que ça montre que mon corps est certes en morceaux mais que ces morceaux restent malgré tout attachés les uns aux autres. Cela permet aussi de penser qu’on pourrait changer ces morceaux de place, par exemple mettre une partie qui me fait moins mal à côté d’une partie qui me fait plus mal. Comme si la symbiose des deux morceaux allait faire diminuer la douleur ou autre.
Cette souffrance me met en colère oui et grandement par moment. Parfois je me demande quand cela va cesser. En colère contre ce passé, en colère contre les administrations diverses etc. J’ai aussi beaucoup de colère envers moi-même…
Le passé ne peut être changé. Le cerveau reste marqué et j’en passe. Par contre la colère ça se travaille, pour être rangé dans le coin de notre cerveau. C’est ce que je travaille encore, mais en attendant je continue à me montrer comme une battante. J’essaie.
Alors j’ai dessiné, sur ma feuille, ce corps en position recroquevillée, cette position où le corps me fait moins mal. Sauf que me relever après reste bien complexe.
Je suis en boule, mon MP3 sur les oreilles, et j’écoute les musiques que mon psychiatre avait téléchargées pour moi, il y a quelques années.
Je sens parfois une larme qui coule toute seule. Je n’ai pas à avoir honte de cette larme. J’ai le droit de pleurer ; c’est ce que mon psy m’avait expliqué pour me rassurer, pour me faire comprendre que je n’avais pas à me sentir honteuse si je n’avais plus la force de me montrer encore plus forte. Parce que chaque fois que je laisse  échapper une larme cela me rappelle ce que fut mon enfance avec l’interdiction de pleurer, mais aussi d’exister. Ces larmes qui m’appartenaient c’était un tout petit moyen de me sentir un peu vivante. Pleurer m’angoisse fortement encore. Mais cela m’effraie beaucoup moins.
Même si j’ai le droit de pleurer aujourd’hui, cela n’apparaîtra pas dans ma production, parce que ce sont les couleurs que je vais déposer qui permettront l’existence de ce corps. C’est beaucoup plus dans le positif. Car les couleurs me donneront l’impression d’apporter de la douceur afin de faire diminuer ce qui me fait souffrir ce corps, je parle de ces traitements qui se succèdent entre autre.
Une personne que j’apprécie beaucoup m’avait écrit il n’y a pas longtemps qu’avec ce que nous avons vécu et subi, nous aurions dû être mortes depuis longtemps. Je pense souvent à cette phrase, je la trouve très forte ! le courage se fait entendre.
Me concernant, je suis là : je tombe, je me relève, je tombe, je me relève… beaucoup plus souvent en ce moment. Même si se relever est de plus en plus difficile, quand j’y arrive, c’est la pulsion de vie qui a gagné et je me sens plus forte. Ce positif est pour moi un petit plus, comme quand je dessine ce qui est une autre force beaucoup plus posée.
Ce corps ayant pris forme sur ma feuille, j’ai donc mis des couleurs gaies pour le recouvrir, comme pour l’habiller d’un manteau de force.
J’ai choisi du jaune, du bleu, du vert, du violet, du rose, du marron, du noir et des dégradés de gris. J’essayais de prendre plaisir à déposer ces couleurs sur ce corps. Une manière de me dire : « allez il n’y a plus de négatif, le négatif s’est envolé ». Parfois ça aide à digérer et à mettre un peu de côté dans notre cerveau. C’est pour cela que j’aime bien prendre mon pinceau.
Quelques finitions ont été faites au feutre noir mais pas toutes. Je ne voulais surtout rien de carré et d’impeccable.

Quels matériaux avez-vous utilisé ?

Dessin conçu sur feuille blanche 36 x 48 cm. Crayon à papier HB pour concrétiser l’esquisse, de la peinture aquarelle, crayon feutre noir.

Que ressentez-vous en regardant votre production ?

Quand je regarde ma création sur le grand chevalet j’ai l’impression que ce corps ne souffre plus.
J’essaie de faire abstraction de ce que me dit mon cerveau parce que je voudrais rester sur une note positive.
Je suis consciente aussi que quand les traitements me rendent malade à m’en broyer les boyaux, j’aurais tendance à baisser les bras. j’ai besoin de me rassurer là-dessus, parce qu’il y a une partie de moi qui serait prête à le faire. Les dissociations augmentent et c’est épuisant ce qui ne n’aide pas toujours.
Est-ce lié aux traitements ? je ne le sais pas et je n’ai pas envie de le savoir. Parce que de toute façon je n’ai pas le choix c’est ainsi.
Je veux juste m’en sortir.
En attendant j’ai passé un moment agréable à habiller ce corps, de son doux manteau.
Il y a quelque chose qui me rassure même si je reste très fatiguée, comme en ce moment, c’est de laisser toujours mes pinceaux à portée de vue. Ils me rappellent que je dois rester les pieds sur terre. Et que vous qui êtes derrière votre ordinateur à attendre la naissance d’une nouvelle création et ça c’est une sacré force que vous m’offrez là.🎨✍😉

Un grand Merci 🙏🙏 😉💪

BMP – Des feuilles, leurs empreintes et des couleurs

BMP – Des feuilles, leurs empreintes et des couleurs
Je pense qu’on peut jouer avec les couleurs, mais pas n’importe comment. J’aime avoir, quand je me lance dans une production, une idée de base puis laisser l’imprévu s’y incorporer. Sans idée, je suis devant une page blanche !
J’ai, par moment, l’impression que les couleurs font voyager. Et peu importe l’état dans lequel on est, que l’on soit triste ou gai, dans la clarté ou dans le brouillard, les couleurs sont là et permettent de voyager à sa guise, mais aussi de laisser une trace, une empreinte.

Comment avez-vous concrétisé votre esquisse ?

Parfois il ne faut pas grand-chose pour faire naître une production.
Un brin de feuilles, un peu de couleur, un peu de colle, deux trois coups de mouvement de rouleau et hop tout cela permet la création.
Il ne faut juste ne pas oublier de se laisser aller et se laisser emporter. Un peu comme on se laisse bercer par l’instant présent. Mais ça c’est plus en mode yoyo, ah ce lâcher prise effraie !
J’ai donc pris ma toile blanche, que j’ai mis à plat sur ma table de travail. Ensuite j’ai ramassé quelques feuilles vertes qui se trouvaient dans mon jardin, et je les ai collées sur ce châssis qui me paraissait bien trop blanc. Il fallait le « salir » légèrement.
C’est donc avec cette petite touche de verte de mes feuilles d’arbre que j’ai commencé à déposer mes premières couleurs pour créer.
Une fois les feuilles bien tenues par de la colle blanche, je les ai recouvertes avec du modeling  Past une pâte à relief acrylique, en me servant d’un rouleau. Après séchage, j’ai rajouté un autre produit du Gesso. On continuait à voir les feuilles à travers. Puis j’ai rajouté directement de la colle transparente, et j’ai laissé sécher.
L’étape suivante, j’ai déposé mes couleurs avec des encres aquarelles liquides, à l’aide d’une pipette. Pour chaque feuille recouverte de mes produits blancs, j’ai mis une couleur différente. Puis, j’ai pris mon châssis et je l’ai tourné un peu dans tous les sens pour laisser couler doucement les couleurs où elles le souhaitaient. Le mélange se faisait bien ! Mais, je ne devais pas mettre trop de couleurs, mais suffisamment pour pouvoir les travailler toutes ensembles et pour bien faire apparaitre les mélanger.
Pour terminer j’ai repris mon rouleau et je l’ai passé sur toute la surface de mon châssis. Là sont apparues de multiples couleurs. Je souhaitais les laisser telles qu’elles apparaissaient, sans reprise, rien, le naturel, comme nous fait la nature dehors quand elle nous offre des surprises et sa beauté. Me concernant c’était le mouvement de l’instant présent. Ce n’était pas le mouvement d’avant, ni le mouvement d’après ; c’était l’instant présent qui m’est si cher et ça de plus en plus.

Quels matériaux avez-vous utilisé ?

Toile de châssis en coton blanc, encres aquarelles liquides, produit Gesso de couleur blanche, Modeling  Past une pâte à relief acrylique, pipette.

Que ressentez-vous quand vous regardez votre production ?

Mon cerveau se sent apaisé quand je regarde les couleurs. J’ai l’impression que mes angoisses sont rentrées à l’intérieur de ce châssis qui est maintenant bien coloré. J’ai pris plaisir, en fait je m’amuse ! Au moins là, je ne pense pas trop et je me fais un peu moins de soucis ou autre.