Par moment, je me demande si un jour je serais capable de faire naître une visage de face, avec le menton, les yeux, la bouche, les oreilles à leur place et surtout sans les morceaux qui partent un peu dans tous les sens.
J’ai du mal à me dire que mon visage à moi est en un seul morceau. Parce que me regarder dans la glace sans avoir l’impression d’avoir un visage déformé, c’est presque impossible. J’ai cette impression que mon visage change de forme. J’essaie de me rassurer en me disant que je ne suis pas une folle bonne à enfermer.
En attendant aujourd’hui mon souhait était de dessiner un visage avec des morceaux.
En fait ça serait le derrière de la tête qui partirait en puzzle, pour exprimer le vide, le rien à l’intérieur du crâne. Ce matin, j’ai d’avantage envie de m’occuper des morceaux que du visage. Certes il sera présent, mais sans plus. Ce sont les morceaux qui donneront du sens à ma création. Cette envie est liée au fait que mes migraines sont de plus en plus fréquentes et rapprochées. Quand je me demande comment la représenter, ce sont des morceaux que je vois. En même temps, je me dis que dans ces morceaux il y a cette douleur qui s’en va, qui s’envole.
Comment avez-vous concrétisé votre esquisse ?
Je m’installe derrière mon bureau, ma feuille blanche devant moi. Je n’ai qu’une hâte : remplir ma feuille de morceaux. Mais pourtant, il fallait que je dessine un visage. Il fallait que je me débarrasse de cela au plus vite, pour prendre ensuite plaisir à dessiner ce puzzle, d’autant que les couleurs je les avais déjà.
J’ai donc commencé par dessiner le visage de profil. Le côté en face, le côté qui vous regarde me rappelait cette glace dans cette salle de bains où le visage se déforme.
Le visage étant dessiné de profil, je me sentais comme libérée. À ce moment-là, le plaisir avait pris toute place dans ma tête. Le plaisir de dessiner tous les morceaux, me donnait cette impression que ma tête allait elle aussi se coller sur la feuille. Je me sentais d’un coup toute légère. Il n’y avait plus de barrières plus rien. Mes morceaux étaient sur ma feuille et je me sentais bien. Mais il manquait une chose : le manteau de couleur, chose que je me suis empressée de déposer avec la peinture aquarelle et un pinceau au bout arrondi. Je suis passée par les tons : marron foncé, marron clair, du jaune, mélangé avec du marron foncé. Une goutte de rouge pour faire les lèvres. Les finitions aux crayons aquarelles.
Quels matériaux avez-vous utilisés ?
Production conçue sur une feuille blanche, un crayon papier HB et comme médium de la peinture aquarelle, pinceau à bout rond.
Que ressentez-vous devant votre création ?
Je me sens penchée à l’intérieur de ma tête. Je me sens dans le présent. Pas d’angoisse du moins je ne sens rien. En fait je n’arrive pas à faire la différence entre ci et ça.
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