BMP – Le secret

BMP – Le secret
Je souhaitais peindre sur ce qu’on appelle le secret. Il est arrivé un événement dramatique, lié à notre passé, à une de mes sœurs. Un fait que l’on m’a rapporté par hasard.
Il y a des événements dont on ne doit pas parler, des faits qui doivent être cachés, comme mis à l’écart, faire comme s’ils n’avaient pas existés. Il y en a dans certaines familles.
La définition simple du secret pourrait être :

« Cacher quelque chose intentionnellement à une ou plusieurs personnes. »

J’écrirais par exemple que mon passé doit rester secret pour celle qui fut ma génitrice, mais aussi pour certaines administrations. Il y a eu, en ce qui me concerne, tellement d’actes, tellement de droits bafoués envers moi, que si les secrets sortaient, étaient levés, cela pourrait provoquer un scandale. Quand j’ai voulu en savoir plus sur mon passé, sur mon dossier et quand je commençais à poser des questions qui mettaient mal à l’aise, qui dérangeaient, la personne qui me recevait, m’a sorti cette phrase que je n’oublierai jamais :

« c’est du passé madame, nos collègues d’avant ont bien fait leur travail.”

J’ai senti qu’il fallait que tout reste secret, que ma naissance devait être tue pour ne pas déranger le passé et les personnes concernées qui sont en vie dans le présent.
Le « secret »  rentre également dans le milieu professionnel, d’ailleurs, c’est un devoir qui est réservé aux médecins, aux avocats, mais aussi aux ministres des cultes dans l’exercice de leur ministère. Là, je parlerais de sécurité, de l’intimité de la personne, de ses droits que toutes ses professions doivent avoir. S’il y a des violations, une sanction se met en place tout de suite ! Il y a un autre type de secret, mais celui-ci vient de soi. C’est ce que j’appelle le jardin secret. Il peut permettre d’avoir un dedans qui vous appartient en propre.
Par contre, le secret « négatif », celui qu’il faut taire, provoque de la honte, de la douleur, de la culpabilité, du mensonge. Sans oublier le déni. Bien sûr, il y a aussi les secrets liés à la sécurité d’un pays, mais ce n’est pas de ceux-là dont j’ai envie de parler.
Je pourrais écrire qu’il y a des bons secrets, car tous ne sont pas nocifs, je les appelle « les secrets doux », car ils contribuent à notre bien-être et à notre épanouissement, je les décrirais comme légers à porter et souvent amusants ; je pense par exemple au secret dans lequel on peut préparer un anniversaire, une fête, une demande en mariage, le prénom d’un enfant à naître, mais ce sont souvent des secrets partagés avec quelqu’un en qui on a confiance.
Il y a aussi ces secrets que l’on peut consigner dans un journal intime, ces secrets qui renvoient à notre vulnérabilité, à nos complexes, à nos difficultés ; ces petites réflexions, que l’on consigne dans son journal intime, dans son jardin secret. C’est ce que je fais quand je pense que mes pensées rentrent dans la plainte, ou quand ça tourne dur dans ma tête. Je ne le dis pas, mais je l’écris.
Il y a enfin ces petits secrets que l’on ne raconte qu’à peu de personnes et qui peuvent être évoqués et partagés au cours d’une soirée, mais les bons ami.e.s, ça ne court pas les rues. Je parle des vrais.
Pour terminer, je reprends ces secrets qui sont lourds à porter et à vivre. Là, c’est autre chose, car cela peut générer un sentiment de mal-être total, qui va jusqu’à la dépression, voire le suicide. Il y a aussi le secret révélé qui détruit.
Dévoiler un lourd secret n’est pas anodin et cela peut même détruire une famille ou une personne. Il faut prendre cela au sérieux, si des événements doivent être dévoilés, la personne doit impérativement se faire accompagner. Il arrive aussi que sans que nous n’ayons rien demandé, on se trouve à porter un secret qui ne nous concerne pas vraiment, mais c’est dangereux de faire porter ce poids.
Je vais donc essayer de traduire par une création, comment je perçois le secret.

Comment avez-vous concrétisé votre esquisse ?

La première idée était de traduire l’enfermement, donc des murs. Il s’agit aussi de rester dans le cadre du secret qui ne détruit pas, du secret doux, que l’on peut quand même partager avec quelqu’un en qui on a confiance. Pour retranscrire cela, des représentations d’une oreille, d’un visage sans yeux, d’une main, étaient des éléments qui me parlaient. La main, comme la main en l’air, pour faire le signe de « je jure », je ne le répéterais pas. Elle pourrait faire parler aussi la certitude que cela resterait enfermé entre les deux personnes. Elle pourrait faire une barrière de protection anti-fuite. Une oreille, qui traduirait l’oreille de celui qui écoute, et qui gardera ce secret qui ne détruit personne. Une bouche, avec le visage sans les yeux pour montrer la personne qui va dire son secret, la bouche pour parler, les mots qui vont sortir, qui ne feront de mal à personne, car il s’agit juste de parler de son vécu, de ce que l’on vit, de ce que l’on ressent, de ce que l’on est. J’ai donc commencé  par dessiner, la main, puis ont suivi la bouche et enfin l’oreille.
Pour le manteau de couleur, le médium : la peinture aquarelle, ne me parlait pas du tout. Par contre un dégradé de gris du plus clair au plus foncé, avec mes crayons à papier, allait beaucoup mieux. Les parties où se trouve l’oreille : le visage donc la bouche avec le nez seront plus dans le foncé et le tour des formes d’avantage dans le plus clair. Je trouvais que le crayon à papier mettrait en évidence les détails, c’est ce que j’ai pensé à ce moment-là. Parfois la couleur grise fait parler la neutralité.

Quels matériaux avez-vous utilisés ?

Cette coposition a été conçue sur une feuille de format 36 x 46 cm. J’ai utilisé un crayon HB pour faire apparaître l’esquisse et des crayons 6B, 3B pour le reste de ma production.

Que ressentez-vous en face de votre création ?

J’observe ma production, et dans ma tête, je pense aux limites du dire ou de ne pas dire ; et j’en reviens à l’intime. Ce sont des sujets intéressants, mais que je trouve graves, que je ne prends pas à la légère. Dans l’intime il y a des limites on ne doit pas tout partager ! Dans mon cerveau, je me sens bancale d’un côté et plus vide dans l’autre. Je ressens des palpitations dans le profond de mon ventre.

BMP – Des formes cubistes mélangées

BMP – Des formes cubistes mélangées
Je  souhaitais prendre un peu de bon temps en mélangeant dans une même production diverses formes, des formes de chapeaux, de visages, de corps dissimulés et enfin des bras terminés par des mains. Peut-être qu’il ne serait peut-être pas facile de repérer ces différentes formes.

Comment avez-vous procédé pour la concrétisation de votre esquisse ?

Ce que je souhaitais, c’était de créer une composition qui me conduise davantage dans la complexité de ces formes cubiques. Il me semble que je n’avais jamais essayé. Je suis retournée sur mon blogue et rien ne me semblait compliqué concernant ce domaine, donc là, j’allais me lancer.
Je me suis donc installée devant ma table à dessin, j’ai pris mon crayon HB. Ma feuille blanche était devant moi et j’ai commencé à faire apparaître mes premiers traits. L’idée de départ était de ne faire apparaître que des chapeaux, car qui dit été, dit soleil, dit chapeau pour se protéger. (Même si cette année le soleil est souvent remplacé par madame la pluie). Mais en ne faisant que des chapeaux, je ne ressentais pas de plaisir à dessiner. Il n’y avait pas non plus cette complication que je recherchais pour faire évoluer le cubisme. Cela m’a donc déviée de mon idée première sur les chapeaux et j’ai décidé de rajouter des mains, des bras, et des visages. Les corps sont venus sans que je ne le veuille vraiment, mais il fallait bien quelque chose pour relier les bras, les figures et les chapeaux.
C’est ce petit quelque chose, cette forme inattendue, qui a fait finalement naître cette création et tout son ensemble. Cette espèce de mélange légèrement en fouillis. Enfin, c’est ce que je ressens quand je regarde mon esquisse une fois terminée.  Mais ce n’est pas grave. Je pensais que les couleurs choisies feraient naître une certaine harmonie dans ce désordre.
Mais à ce moment-là, je me suis rendue compte que certes cela m’amusait de dessiner comme cela, mais que quelque chose clochait. J’ai donc déposé mes couleurs sur cette esquisse. J’écris ”cette » esquisse parce qu’à ce moment-là, précis, elle ne m’appartenait plus. Trop prés d’elle, je ne savais pas trop.
Ce « quelque » chose qui cloche, a fait que cela a changé dans ma tête. Je me sentais plus loin vis-à-vis de mon pinceau, celui-ci me paraissait plus léger et les couleurs étaient moins dans le mélangent.
J’ai pris plaisir à déposer la couleur. Mais je pense que je ne cherchais plus non plus à repérer les formes. Je les observais une fois peintes, une fois que toutes les couleurs étaient déposées sur ma création. Là mon regard était différent. En fait je pense que celui-ci a changé régulièrement au cours de la naissance de cette production. J’ai finalisé par quelques finitions faites aux feutres.

Quels matériaux avez-vous utilisés ?

Cette production a été conçue sur une feuille de 36 x 46 cm. Comme médium j’ai utilisé de la peinture aquarelle, des feutres pour les finitions et un crayon HB.

Que ressentez-vous en regardant votre production ?

J’observe ma production de loin. Je trouve qu’elle n’a rien à voir avec les autres créations. C’est un essai que je souhaitais faire. Dans ma tête, je ne me sens pas aussi emballée que d’habitude. Je me sens comme instable, comme mon cerveau qui me semble bouger dans tous les sens. Une angoisse est apparue, mais elle est vite repartie. Peut-être que je referai une autre composition, cubiste, mais différemment.