Ce que je trouve bien, c’est qu’avec un peu de peinture aquarelle et avec un peu d’eau on peut parfois faire advenir une forme inconnue et se mettre à voguer dans un autre monde. J’ai toujours cette impression que ce processus reste sans fin, que chaque nouvelle création peut fait naître d’autres dessins dans une autre structure.
Par moment je me demande si tout ne vient pas du geste de la main et du poignet : que ce serait là que tout commence, comme le début d’une vie, comme un secret intouchable. Il suffirait juste de poser des couleurs comme on le désire sur le moment et surtout y prendre du plaisir. Alors cela vient tout naturellement.
Explosion de couleurs en petits morceaux, comme un feu d’artifice, sans essayer de bloquer ces nouvelles petites naissances qui se font dans cette explosion.
Je voulais faire apparaître une certaine force dans cette explosion de couleurs, mais une force « douce » qui ne s’oppose pas à la liberté des couleurs et qui me permettrait de mettre dedans ce qui m’a blessée.
Je souhaitais également faire apparaître une petite touche mystérieuse, comme dans un monde féerique qui nous entraînerait dans sa magie.
Comment avez-vous procédé pour la concrétisation de votre esquisse ?
Pour le début de mon dessin, j’ai choisi les couleurs vertes et jaunes. Je me suis servie d’un petit glaçon, je voulais que sa fonte fasse apparaître le premier mouvement qui allait s’élargir petit à petit avec les autres couleurs que je rajouterais.
Après mon autre idée était de continuer à faire éclore les autres couleurs avec ce qui resterait de la fonte de mon glaçon, avec un gros pinceau.
Donc pour en revenir au début de ce travail, mes deux couleurs étant bien mélangées avec l’eau de mon glaçon, je devais faire en sorte que ce mélange ne fasse pas brouillon et qu’il ne soit pas trop foncé. Il devait créer comme une touche d’air frais, qui ferait penser à l’air de la montagne. J’ai surtout travaillé la couleur jaune qui me faisait penser au citron acide que j’avais pressé ce matin.
Ce qui m’a le plus aidée, pour le premier mélange, c’est l’eau du glaçon. Celle-ci se déplaçait sur ma feuille, et je l’ai suivie en rajoutant avec mon pinceau de nouvelles couleurs tout en faisant attention à ce que mon œuvre ne paraisse pas étouffante.
Par moment il y avait le bleu ou le vert turquoise, qui me séduisaient et je devais faire attention à ce que ces couleurs ne soient pas ensevelies par les autres couleurs ou par le mouvement de la fonte de mon glaçon. Bref leur laisser un espace pour qu’elles s’expriment.
Cette production est donc née de la fonte d’un glaçon et d’une touche d’eau du robinet. Je pense que j’avais envie de créer avec un minimum de liquide.
Quels matériaux avez-vous utilisés ?
Dessin conçu sur feuille blanche de 50 x 70 cm à grain fin
Aquarelle.
Que ressentez-vous en regardant votre production ?
En regardant mon dessin de loin, il me fait sourire. Car même si je l’ai travaillé dans les couleurs et dans le mouvement il me fait penser à un monde inattendu, un monde non contrôlé. Et c’est cela qui est plaisant à découvrir : cette petite touche mystérieuse et inattendue qui fait que regarder est agréable. Et puis j’y est déposé mon côté perdue.