C’est une belle idée qu’Emmanuelle a eu en me demandant de dessiner les pommes que madame M-J L m’a offertes gentiment lors de sa première visite chez moi, dans ce que j’appelle mon cocon familial.
Par moment l’angoisse est là dès le matin, quand je me lève, et ce jour-là, c’est ce qui s’est passé. Quand par exemple je dois sortir, cette angoisse rend les choses plus que difficiles, et elle va jusqu’à provoquer des nausées et vertiges, des idées de mort.
Je me suis installée à l’intérieur de mon chez moi, dans la cuisine, devant la fenêtre. Le soleil était là. Mes angoisses aussi. Il y avait la frayeur de savoir que je devais sortir pour rejoindre les “blouses roses”, donc affronter la ville, affronter les boulevards où il y a eu cette tuerie, mais pourtant j’aime faire ce que je fais avec cette association.
Et de penser que la frayeur risque de gagner la partie, me fait croire que je suis une incapable. Et en même temps, je pense que j’ai aussi en moi, la capacité d’affronter cette situation en la travaillant un peu plus, car oui, je suis volontaire et j’ai cette volonté d’être la plus forte.
Comment avez-vous dessiné ?
Installée dans la cuisine, j’ai mis deux pommes sur la table, je voulais canaliser toute ma concentration sur ces pommes, sur leurs couleurs, et aussi sur le parfum qu’elles dégageaient.
J’ai fait l’exercice du toucher avec les pommes, comment elles étaient au toucher, ce qu’elles sentaient, etc Je me suis concentrée dessus, je voulais chasser cette angoisse qui me paralysait de l’intérieur. Mais là, elle était bien forte, cette angoisse.
J’ai installé les pommes dans un petit panier que j’ai posé sur la table de la cuisine. Cela donne un effet champêtre, et j’aime bien, de même que sentir l’odeur de la terre sur ces pommes. Et puis la diversité des couleurs m’attire beaucoup, ça me renvoie à l’automne qui approche. Et puis à ce geste de cette dame.
J’ai commencé par dessiner les pommes, un peu cachées, mais aussi je voulais faire sortir ce côté mouvement dans la façon de les placer dans ce panier.
J’ai ensuite continué en dessinant le panier. Je tiens à celui-ci, il me rappelle le côté vieillot.
Pour la réalisation du manteau de mon esquisse, là les couleurs étaient devant mon nez. Les pommes que j’avais déposées devant moi sur la table, n’avaient qu’à me parler, s’exprimer dans ma tête, quand je les regardais.
Matériaux utilisés :
Aquarelle réalisée sur feuille de format de 36 X 48cm à grain fin.
Pour les finitions crayons Art Grip Aquarelle.
J’ai utilisé les couleurs aquarelles suivantes : jaune citron, vert jaunâtre, terre d’ombre brûlée, rouge brillant, banc de Chine.
Qu’avez-vous ressenti ?
De la frayeur en moi, mais aussi beaucoup d’angoisse. Pourtant le fait d’avoir posé des pommes sur la table, m’a permis de ne pas trop m’enfoncer dans ces idées qui me poussent à me dire que je ne suis pas assez forte.
J’avais une envie énorme de sentir l’odeur du bois, et d’aller me promener, de m’y perdre, comme une petite fille qui veut jouer à cache-cache.
Mais il y avait cette réalité qui est vite apparue, je devais sortir de cette spirale de frayeur et je devais à tout prix trouver la force d’aller vers l’extérieur. Une force était là pour me dire : “tu en est capable, donc tu vas le faire. »
Que ressentez-vous face à ce dessin ?
Quand je regarde mon tableau, je trouve les couleurs douces, et je voudrais qu’elles envahissent mon cerveau. Je voulais rajouter que ce sont des petites pommes de vergé, au goût légèrement acide, comme le citron. Mais elles ont fini en compote. J’ai encore de quoi faire une petite tournée.
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