Ateliers d’Art -Thérapie : des oasis dans l’hôpital par Céline Roussel
Encadrée par des professionnels, l’art-thérapie est désormais reconnue comme un soin de support participant à l’amélioration de la qualité de vie des malades. Ces ateliers qui permettent à chacun d’explorer son imaginaire sont des espaces de bien-être et de liberté dans un contexte difficile.
Les premières expériences d’art-thérapie en milieu hospitalier, pour des malades du cancer, ont eu lieu dans les pays anglo-saxons. L’idée : proposer à des patients, enfants et adultes, confrontés à une hospitalisation et à des traitements lourds portant atteinte à l’image de soi et parfois au diagnostic vital, un espace d’évasion et de liberté rien que pour eux. « C’est un soin, un accompagnement psychologique qui fonctionne avec un outil essentiellement non verbal : le processus de création, explique Laurence Bosi de l’Association Médecins de l’Imaginaire. Danse, chant, peinture, musique, modelage, conte… La proposition artistique n’a qu’une importance relative. L’objectif est avant tout de pousser le participant à faire appel à son imaginaire, à solliciter ses ressources psychiques ou physiques, pour mieux vivre sa maladie ».
Les art-thérapeutes en charge de cette mission ont bénéficié d’une formation diplômante d’au moins trois ans. « Tous ont également une pratique artistique qui leur permet de comprendre en quoi le processus de création peut apporter du bien-être à une personne malade », ajoute Laurence Bosi. Ces art-thérapeutes travaillent d’autre part en lien direct avec les infirmières et psychologues des services où ils interviennent, afin de mieux connaître les malades, leur état, leurs besoins, leurs envies.
Des ateliers réguliers et sécurisants
Tous les programmes font l’objet d’un cadre strict, source de repères pour le patient. Ils ont donc toujours lieu le même jour, à la même heure, avec les mêmes personnes et le même matériel. « Ces conditions vont aider le malade à se sentir en sécurité et en confiance, comme dans une bulle. Et paradoxalement, c’est cet aspect strict et figé qui va lui permettre de laisser libre cours à son imagination et à sa fantaisie», note Laurence Bosi.
Chaque groupe est formé de six personnes maximum, dirigé par un ou deux art-thérapeutes. Concernant les arts plastiques, aucun thème n’est donné au début de séance. « C’est une règle d’or. Libre à chacun de faire ce qu’il veut, partir sur une nouvelle idée, reprendre une ancienne réalisation pour la modifier. Si un participant a du mal à démarrer, nous lui proposons des pistes, des jeux pour stimuler son imagination. Nous pouvons également « être les mains » d’un enfant fatigué, mais dans ce cas, il nous guide totalement. Et surtout personne ne juge personne! », précise Laurence Bosi.
La notion du temps est par ailleurs importante dans le processus de l’art-thérapie. A la fin de l’atelier, l’animateur égrène les derniers instants pour que chacun revienne tout doucement dans la réalité. Enfin, chacun range ce qu’il a créé dans un carton à dessins, à son nom, qu’il retrouvera à la session suivante. «Les travaux ne sortent pas de l’atelier. Ils sont l’espace imaginaire des patients. Nous, art-thérapeutes sommes les garants et les gardiens de cette intimité », ajoute Laurence Bosi.
Sourire et légèreté : les effets bénéfiques de l’art-thérapie
Une étude réalisée dans un hôpital de Chicago (publiée l’année dernière dans le Journal of Pain and Symptom Management) a révélé qu’une séance d’art-thérapie pourrait agir de façon positive sur les symptômes suivants : douleur, fatigue, dépression, anxiété, somnolence, manque d’appétit, difficultés respiratoires. La nausée serait le seul effet secondaire à lui échapper. Cependant, les bienfaits à long terme demeurent inconnus puisque les données recueillies ne visaient qu’à étudier l’amélioration des symptômes après une seule séance d’art -thérapie.
Houria, atteinte d’un cancer et suivant régulièrement l’atelier « Parcours dans l’Imaginaire» à la Maison des Patients de l’Institut Curie (Saint-Cloud) est cependant enthousiaste : « pour moi, cet atelier, c’est une oasis. On peut boire, se mettre à l’ombre. La douleur est là, mais elle est comme enveloppée, apaisée par la douceur des mots, de la musique et les odeurs des huiles essentielles. C’est comme si on digérait notre souffrance. Et laissait s’amuser l’enfant qui est en nous ».
Avec leurs couleurs, les ateliers d’arts plastiques créent une véritable rupture, une « parenthèse » dans le monde froid et blanc de l’hôpital. Un état de fait apprécié chez des jeunes malades, qui représentent 57 % des participants aux ateliers d’art-thérapie proposés par les Médecins de l’Imaginaire. Pascaline, 14 ans, soignée à la Clinique Edouard Rist à Paris, confirme : « c’est un endroit où on ne pense plus à la maladie. Donc on se libère, on s’exprime, et on se construit. Et puis surtout on rit énormément !» Une autre participante au même atelier aime par-dessus tout la liberté qui est y proposée. « On n’est pas obligé de faire quelque chose de précis, on peut travailler en individuel, en collectif, mettre ses écouteurs, raconter de ce qu’on veut. Et surtout vider son esprit ».
Céline Roussel
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