J’avais envie de pleurer. Une angoisse m’a submergée. Alors j’ai pris mon matériel et je me suis installée dehors et j’ai dessiné.
Sur le moment je ne savais pas ce que j’allais faire. Je savais juste que je devais m’occuper les mains. Béatrice l’adulte s’en veut terriblement par moment d’exister. Je le rumine. C’est une rumination négative. C’est pour cela aussi que j’ai pris mon matériel pour aller dessiner. Pour ne pas encore plus culpabiliser et de m’accuser de je ne sais quoi. Pour ne pas donner raison à ce passé.
Là je l’écris et c’est facile d’écrire. Mais je voudrais que cela soit plus clair dans ma tête. Pouvoir foutre un gros coup de pied à toutes ses ruminations négatives ! reconnaître tout de suite que… Après voilà, ça ne sert à rien que je m’éternise sur toutes les idées négatives qui viennent me plomber et qui viennent aussi envahir les autres personnes.
Comment avez-vous procédé pour concrétiser votre dessin ?
J’ai donc procédé ainsi pour faire naître mon dessin, que je pourrais peut-être appeler « imprévu » !
Ma feuille bien à plat devant moi, j’ai pris des pastels secs et j’ai fait apparaître un arc-en-ciel. Une fois ma feuille remplie de couleur, j’ai laissé la sciure du pastel dessus.
J’ai ensuite pris un pinceau humide et je l’ai passé délicatement sur les couleurs et sur la sciure. Je fais en sorte avec le mouvement de mon poignet et de ma main de faire apparaître un mélange de couleurs encore plus douces que celles qu’il y avaient au départ.
Je souhaitais juste faire ça. J’essayais de me concentrer également là-dessus. Par moment ça a été difficile car c’était comme si je voulais laisser quelques empreintes de larmes se confondre dans toutes ses couleurs.
Toute la sciure qui se trouvait au départ sur ma feuille avait disparu. Il ne restait que les traces d’humidité du passage de mon pinceau et tout ce dégradé de couleurs dans le mouvement.
Je trouvais qu’il n’y avait pas assez de couleurs. Alors j’ai repassé sur mon dessin une petite couche de pastel : un peu plus de couleur rose, de la couleur bleue, du jaune et du orange.
Puis j’ai laissé doucement glisser mes doigts sur ma feuille et sur cet arc-en-ciel afin de pouvoir rendre plus discrète toute cette panoplie de couleurs. Puis j’ai rajouté quelques fleurs qui elles aussi se mélangent dans le fond de mon dessin.
C’était un peu comme si je voulais moi aussi me montrer plus discrète pour justement laisser place à ce dessin qui a été fait sur le moment présent, de l’ici et maintenant. Laisser parler ce mouvement et toutes ces couleurs du moment, accompagnée de ce soleil qui est avec nous en cet après-midi et de cette petite touche de vent. Juste cet instant présent en ignorant cette angoisse qui m’avait submergée. Juste partager avec vous cette empreinte et vous laisser bercer avec celle-ci.
Quels matériaux avez-vous utilisés ?
Dessin conçu sur feuille blanche 36 x 46 cm.
Pastel sec et peinture aquarelle.
Que ressentez-vous en regardant votre production ?
Quand j’observe mon dessin sur le chevalet, je me disais qu’on pourrait l’appeler « mélancolie en couleurs »
Je ne voudrais plus être envahie par ces ruminations négatives et de toutes ses angoisses parce ce que cela me fait oublier que je suis une personne pas si mal. Parce que je ne veux plus que cela m’emmène dans les enfers et mes démons du passé. Je ne veux plus que cela fasse mal aux personnes que j’apprécie le plus. Je ne le veux plus !