BMP – Guerre en Ukraine : visage en morceaux, visage démoli

BMP – Guerre en Ukraine : visage en morceaux, visage démoli
Dans les associations, nous sommes touchées par cette guerre en Ukraine. On entend des mots remplis de souffrance et de peine venant des personnes françaises ou pas. Les émotions sont présentes et vives.
En tant que BMP, je me dis que je devais me manifester face à cette situation, par le biais d’une production. Ce sera ma façon de soutenir les personnes qui souffrent de cette situation dramatique, qui ont laissé leur famille sur place, ou qui ont quitté leur pays, mais seules les femmes et les enfants ont pu partir. Des personnes que je croise régulièrement.

Comment avez-vous concrétisé votre esquisse ?

Mon idée, pour l’ébauche, était de décrire ce qui peut se passe dans un cerveau, ce qu’il ressent, par exemple le mien, quand je suis les informations et que je regarde également les images de cette guerre. Cela me fait penser à une forme où tout s’écroulerait, les souvenirs, toute la vie de famille, le lieu de vie, tout s’écroule.
Une rupture complète dans l’instant présent. Tout, s’est figé. Plus rien ne sera comme avant. C’est comme dans une tuerie le choc est aussi démolisseur et violent. C’est donc ceci que je vais retranscrire dans mon dessin.
J’ai donc commencé par dessiner ce visage avec, à l’intérieur, cette partie où tout part en morceaux. Ce morceau, c’est l’intérieur d’une maison démolie, ravagée par les bombes. Pour que ce soit plus réel, j’ai dessiné quelques meubles et des pierres.
Il me fallait rajouter des couleurs, et là, j’ai déposé sur ma feuille ce qui me parlait à ce moment précis. Je me suis  baladée parmi les tons suivants : le marron, le bleu, du orangé-rouge, du jaune, du violet, du noir. Il y avait ces questions qui étaient là : quand cela, va-t-il se terminer ? Et la France ? Les conséquences à la longue ? Toute cette souffrance. Il n’y a pas de mots.
Les finitions ont été faites aux feutres aquarelles.

Quels matériaux avez-vous utilisés ?

Cette production a été conçue sur une feuille de 36 × 46 cm. Comme médium, j’ai utilisé la peinture aquarelle. Un crayon HB pour faire naître mon esquisse. Pour les finitions, j’ai utilisé des feutres à pointes fines.

Que ressentez-vous quand vous regardez votre création ?

Dans ma tête, c’est l’émotion, la peine, des questions. Mais tout ceci, je l’ai déposé dans la forme de ma création. Après, je suis la seule à le savoir. Mais au final, c’est mon moyen à moi d’exprimer ma solidarité. Cette solidarité est encore plus importante, tout comme la bienveillance.

BMP – Cerveau traumatisé qui déraille

BMP – Cerveau traumatisé qui déraille

Les traumatismes sont des événements extrêmes qui n’ont pu être ni pensés ni anticipés, qui arrivent d’une manière brutale, par exemple viol, attentat, tremblement de terre, attaques. Devant cette horreur et l’effroi généré par l’événement, le cerveau a du mal à traiter l’information de façon appropriée et à en trouver le sens. Il revit cet événement en boucle et le moindre déclencheur réactive ce passé avec les émotions qui y sont attachées. Les survivants, car ce sont des survivants, gardent de leur passé des séquelles indélébiles, c’est ce que l’on appelle le syndrome de stress post-traumatique.

La violence est telle qu’elle n’a pas de sens pour la victime. Moi-même j’essaye encore de trouver un sens à ce que l’on m’a fait vivre et pourquoi ça reste présent.
La pensée et les émotions sont comme arrêtées, suspendues. Même si on continue à vivre dans le présent, on perdure émotionnellement bloqué sur un événement que l’on n’arrive pas à élaborer, à digérer. Il revient sans cesse et tourne en boucle dans la tête et le cerveau.

L’événement traumatique ne s’oublie pas, il demeure là, présent. Il cherche à s’exprimer, à refaire surface pour en trouver un sens. Des traumatismes non traités modifient notre manière de penser, nos émotions et notre attitude.

En fait dans ces moments-là, je peux dire que mon cerveau, traumatisé, ressemble à un disque rayé, qui revient toujours sur le même sillon, qui rejoue donc en boucle les mêmes fragments de mes souvenirs qui rentrent dans l’indicible. C’est la rumination qui m’a fait penser à ce disque rayé.
Il se passe une rupture dans le mécanisme qui me permettrait de pouvoir supprimer et de réguler dans ma mémoire et mon cerveau des intrusions sévères.
Ainsi la représentation que je me fais : intrusion, souvenirs non digérés, de ce fait l’image d’un disque rayé et de dissociations. Parfois je me pose cette question comment digérer l’indicible ? Je ne sais pas si une réponse existe. Et c’est vrai aussi sur la question du « pourquoi ça m’est arrivé, qu’est-ce que j’ai fait ? » Pour accompagner ces réflexions, je vais faire une production.

Comment avez-vous concrétisé votre esquisse ?

Ce qui comptait le plus c’était de retranscrire ce disque rayé. Pour cela il ne me fallait pas de corps, mais seulement un visage de profil, et de placer au centre de celui-ci le disque rayé. L’emplacement du cerveau. Avec un œil qui observe, mais qui ne peut rien faire pour intervenir ! Rien d’autre.
Je commence donc par dessiner ce disque rayé, puis le morceau du visage, pour bien montrer que le problème se trouve ici et pas ailleurs. Pour les couleurs, je suis restée entre le marron-gris, une touche de bleu, du rouge et du noir. Quelques finitions par ci par là.

Quels matériaux avez-vous utilisés ?

Cette production a été conçue sur une feuille de format 36×46 cm. Un crayon HB pour faire naître mon esquisse, de la peinture aquarelle, des feutres pour les finitions.

Que ressentez-vous en face de votre création ?

J’observe ma production, et dans ma tête, je me dis : « c’est ça ! ». J’avais cette impression d’avoir enlevé un poids dans mon cerveau. Difficile encore de parler de tout cet indicible ! Parfois je préfère faire naître une émotion à travers une production tout en cachant derrière une souffrance.