Je me faisais cette réflexion qu’il ne m’arrivait que très rarement de donner naissance à des corps sur grand format.
La douleur était là et je voulais la dessiner, mais je ne sais pas, quelque chose en moi me dit que cette douleur je peux aussi la transformer en quelque chose de plus apaisant, je pouvais faire évoluer celle-ci en quelque chose de plus coloré, agréable à voir.
Comment avez-vous procédé pour la concrétisation de votre esquisse ?
De dos ce corps, oui car quand quelque chose ne fonctionne et ne va pas très bien je préfère. C’est ma façon à moi de cacher l’émotion qui pourrait ressortir de ce visage.
J’ai donc lancé mon premier coup de crayon en commençant à faire naître le bas ce de corps avec les cuisses. Les pieds ne m’intéressaient pas à ce moment-là dans le dessin de cette esquisse. Une façon à moi de me dire : « Béatrice tu ne peux plus te sauver pour te cacher », pour cacher cette timidité !
Puis j’ai continué mon esquisse en faisant apparaître le dos, mais je voulais laisser la place aussi au moment où je ne ressens pas complètement mon corps. Peut-être là où se cache cette douleur dans ces moments-là ? Tout comme pour exprimer mes dissociations.
Mais je voulais que pas un morceau ne manque de ce corps qui doit rester agréable à regarder, je ne voulais pas que ce mot « effrayer » crie trop fort. Je ne voulais pas que ça soit Béatrice qui effraie les personnes qui l’entourent et qui lui parlent.
Pour concevoir le manteau en aquarelle de mon esquisse, je souhaitais que celui-ci représente le calme, mais aussi la tranquillité et de la gaîté.
Les mots « couleurs chaudes » me parlaient dans ma tête très fortement, comme aussi le mot pansement.
Matériaux utilisés :
Aquarelle sur feuille de format de 50 x 70 cm à grain fin.
Crayon aquarelle + eau
Crayon noir
Pastels secs
Qu’avez-vous ressenti ?
• Je ressentais bien ma difficulté à bouger convenablement cette main et ce poignet, mais je sais aussi que même avec cette gêne il faut que je garde la motricité de cette main !
• Je me disais dans cette tête, que réaliser un corps en grand format c’était un peu sortir de cette timidité qui m’envahit parfois fortement.
• Je souhaitais que même si ce corps n’est pas en entier et de face, qu’il reste bien dessiné, je me disais que ça serait un peu pour cacher le mien qui reste à mes yeux parfois imposant.
• Je suis toujours aussi extasiée d’observer des esquisses de corps nu. Je trouve leurs courbes sensuelles et fascinantes. A l’instant, c’est le mot « vie » qui pointe son nez.
• Par contre j’ai toujours des images de mon passé qui remontent concernant mon corps : la salle de bains, les escaliers, le lit…
• Je me revois régulièrement hurler de douleur, à chaque fois des frisions qui me font mal se hérissent sur mon corps. Cette impression de revivre ces moments de souffrance dans le temps présent.
• J’ai ressenti quelques nausées, mais je pense que c’était dû à ce passé qui remontait assez violemment.
• J’ai eu un trop plein de salive dans ma bouche.
• J’ai eu des moments de dispersion dans ma tête, parfois difficile à me retrouver en elle.
• Je pense que j’ai eu aussi des petits moments de blanc, mais rien de violent je dirais.
Que ressentez-vous face à ce dessin ?
En regardant mon dessin, j’avais cette impression que ce corps partait dans le brouillard, partait vers une nouvelle découverte mystérieuse, dans un nouveau monde.
Une réflexion au sujet de « BMP – Corps aux couleurs chaudes »
Emotion esthétique.
Emmanuelle Cesari