14/ La dissociation traumatique perturbe la mémorisation par François Louboff

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Mais quels sont les facteurs qui influencent la mémorisation d’un événement traumatique ?
Lorsqu’une personne est confrontée à un événement traumatique, associant terreur et impuissance, sa capacité d’attention est brutalement réduite et sa capacité à percevoir ce qui se passe autour d’elle est très altérée.
Non seulement les détails perçus dans la périphérie de son champ de Vision disparaissent, mais aussi le contexte de ce qui est en train de se produire ainsi que sa perception du temps.
Par contre, son attention est concentrée sur le centre de son champ de vision à l’instant présent. Cette focalisation extrême de l’attention s’accompagne de distorsions très importantes de ce qui est perçu et ressenti, provoquant une insensibilité à la douleur, un vécu de dépersonnalisation, un ralentissement du temps et une amnésie. C’est un état dissociatif.

Les événements traumatiques ont ce pouvoir de provoquer des réactions dissociatives. Certaines personnes peuvent se dissocier spontanément face à la terreur et d’autres vont « apprendre », involontairement, à provoquer cet état, en particulier si elles sont exposées de manière répétée à des événements traumatiques.
Ces altérations profondes de la conscience au moment du traumatisme expliquent certaines caractéristiques anormales des souvenirs traumatiques. En raison de cette attention très focalisée, les sensations vécues par le corps et toutes les autres sensations (odeurs, bruits, images) vont être profondément gravées en mémoire, alors que le contexte, le vécu du temps et le récit verbal vont être faiblement enregistrés.

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3/ L’argent et les victimes de viols par inceste
4/ Enfant d’incestée
5/ Dissociation ? mais de quoi ?
6/ La dissociation est un moyen de défense du psychisme
7/ Qu’est-ce que la PE – partie émotionnelle – après un traumatisme
8/ Qu’appelle-t-on « PAN » – partie apparemment normale après une dissociation
9/ Les enfants – de victimes de viols par inceste – présentent un risque de SSPT trois fois plus important que dans la population générale
10/ Quand être victime devient une addiction
11/ Explications psychologiques de la revictimisation
12/ La fibromyalgie et le syndrome de fatigue chronique
13/ Les souvenirs traumatiques : un autre type de mémorisation
15/ L’altération de la mémoire autobiographique

13/ Les souvenirs traumatiques : un autre type de mémorisation par François Louboff

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La mémorisation des événements traumatiques contraste avec celle des expériences non traumatiques.
Elle possède des caractéristiques inhabituelles qui ont été observées et décrites par les psychologues et les psychiatres depuis plus d’un siècle.

Notre asymétrie cérébrale (nous avons deux hémisphères cérébraux dont les fonctions sont différentes et qui contiennent des systèmes de mémoire séparés) expliquerait que des expériences traumatisantes, menaçantes, survenant dans les premières années de la vie et stockées dans l’hémisphère droit ne soient pas connues de l’hémisphère gauche.
Le contexte de l’événement traumatique n’est pas mémorisé puisque l’hippocampe, responsable de la mémoire « autobiographique » (ou explicite), n’est pas encore assez fonctionnel (amnésie infantile). L’hippocampe étant incapable de mémoriser tous les détails d’un traumatisme précoce, il est normal que les souvenirs de ce traumatisme, lorsqu’ils réapparaissent à l’âge adulte, contiennent des erreurs.
Quant au cerveau gauche, il n’a presque rien à mettre en mémoire puisque l’enfant n’a pas développé de langage suffisant pour traduire en mots ce qu’il est en train de vivre. Le traumatisme n’étant pas verbalisé, il ne peut être situé sur la ligne du temps (nous verrons que c’est l’hémisphère gauche qui gère le temps). Les souvenirs traumatiques de l’enfance, mémorisés dans le cerveau droit sous une forme non verbale, sont constitués principalement d’émotions et de sensations corporelles. Ils sont inconscients et intemporels.
Après la petite enfance, l’hippocampe est enfin capable de jouer son rôle et de construire des souvenirs autobiographiques. Parmi les personnes qui ont souffert d’agressions sexuelles dans leur enfance, certaines vont garder en mémoire toute leur vie ce qu’elles ont vécu, alors que d’autres vont parfois l’oublier, partiellement ou totalement. Cet oubli peut durer plusieurs années, jusqu’à ce qu’un événement particulier (par exemple un film, un autre traumatisme, une discussion, une thérapie) vienne ranimer la mémoire de ces événements et les rendre de nouveau conscients.
La proportion de personnes qui ont affirmé avoir « retrouvé » leurs souvenirs traumatiques d’agressions sexuelles d’une manière « retardée » varie selon les études de 19 à 82 %.

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