Quand j’arrivais à m’exprimer, toujours indirectement, personne ne saisissait. Je n’arrivais pas à dire les choses dans le langage des grands, mais je n’arrêtais pas d’envoyer des SOS, comme des bouteilles jetées à la mer…
Aidez mes frères !
Je faisais des dessins. Il suffisait de les regarder. Tous ces pros n’avaient pas la bonne formation, ou alors ils ne pouvaient pas voir parce qu’ils avaient la tête brouillée par l’idée qu’il faut se méfier des enfants parce qu’ils sont des menteurs…
Écartelé entre le désir de sauver mes frères, et la peur du pire si je dénonçais Delay, ma mère et leur clique de pervers, j’adressais des messages confus que j’imaginais suffisamment clairs.
Le temps passait en mode survie. Tous les quinze jours, je devais retourner en enfer. Un jour, tout de même, j’ai fini par dire stop ! Oh ! Pas comme vous l’espérez. J’ai simplement pu dire :
– Je ne veux plus rentrer chez moi !
– Pourquoi?
– Je veux plus voir ma mère.
Incapable de dire les viols. Alors, une fois de plus, je suis passé pour un sale caractère.
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4/ La suite, je l’ai vécue comme pendant les viols. Dissocié. J’étais à la barre, mais totalement absent