2/ Le rôle de la justice dans le statut de victime par François Louboff

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La justice a bien entendu un rôle à jouer dans la reconnaissance du statut de victime, et le procès peut parfois aider celle-ci à mieux comprendre ce qui lui est arrivé. C’est le fameux « pourquoi ? », c’est-à-dire la recherche de la vérité sur les circonstances et les causes de l’agression.
Mais en réalité, il est important de bien comprendre que la victime n’a pas un rôle fondamental dans le cadre du procès pénal, car l’enjeu majeur n’est pas ici la réparation de la victime mais la sanction éventuelle d’un comportement déviant aux yeux de la société.
La justice pénale a surtout une fonction de régulation des relations sociales, centrée principalement sur le coupable. 
Bien sûr, la condamnation pénale de l’agresseur, si elle est prononcée, peut être vécue comme une réparation symbolique, mais celle-ci n’est pas le but premier du jugement pénal. La réparation financière éventuelle sera déterminée lors du jugement civil et viendra de la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (CIVI) si l’agresseur est inconnu ou non solvable.
L’intervention de la justice peut même être nocive, aggravante, notamment dans les situations suivantes :
• Le parcours judiciaire est souvent douloureux, toujours très long (plusieurs années), avec des interrogatoires parfois mal menés, des confrontations blessantes ou humiliantes, l’absence d’informations, le manque d’attention durant le procès, et la répétition de tout cela en cas d’appel.

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Dorothée Dussy : L’inceste versus l’Interdit de l’inceste : lectures croisées

Chargée de Recherche au CNRS, Laboratoire d’Anthropologie Urbaine (UPR 34) associée au Laboratoire Genêse et transformation des Mondes sociaux (EHESS-CNRS)


Dans cet exposé, je voudrais questionner ce que les savoirs sur l’inceste, en anthropologie, disent du rapport de la société à l’inceste. A partir d’une lecture du livre exemplaire de Françoise Héritier, De l’inceste, je vais montrer comment l’inceste peut être pensé quand on a en toile de fond conceptuelle la théorie de l’interdit de l’inceste. Etant entendu que la pratique de l’inceste a pour condition nécessaire de mise en œuvre le silence autour de cette pratique, je voudrais ensuite explorer la question du « dire l’inceste » collectivement, à l’échelle de la société. En conclusion, je retournerai la perspective de départ, et m’interrogerai sur le sens de la théorie de l’interdit de l’inceste, quand on a en toile de fond la réa lité de l’inceste.

Études n° 124 2008/1
Père et fille à l’épreuve d’un procès pour inceste
Dorothée Dussy
Plan de l’article
• l’aveuglement devant la violence domestique
• se construire en victime
• assumer le doute
• le bénéfice du doute
• BIBLIOGRAPHIE