Monsieur,
Veuillez m’excusez de ne pas pouvoir commencer ma lettre avec un « Cher Daniel » bien que vous me paraissiez être « le plus sympa » des acquittés de l’affaire d’Outreau.
Il y a quelques années, je n’avais pas trop compris ce qui s’était passé à Outreau, bien planquée derrière mon écran TV. Lorsque les médias vous ont montré comme un innocent injustement accusé par « une bande de gamins mythomanes qui avaient voulu attirer l’attention à cause de carences affectives * » j’ai eu de la compassion pour vous, vous paraissiez si jeune, et si ébranlé par l’épouvantable épreuve que vous veniez de traverser.
Le temps a passé, les gamins ont grandi, et certains continuent à dire que tous leurs violeurs n’ont pas été punis. Sic ! Ça ne colle pas avec la vérité assénée par les médias …
C’est aussi ce que laisse entrevoir en filigrane le film de Serge Garde « Outreau l’autre vérité » ainsi que divers livres, dont celui de Chérif Delay « Je suis debout », ou celui de Marie-Christine Gryson « Outreau, la vérité abusée ».
Quant au livre de Jacques Thomet, je vous conseille de ne pas le lire car vous pourriez faire un malaise. Ce journaliste vous consacre plusieurs pages, en citant dans le détail les déclarations de votre cousine et de votre cousin (enfants de votre tante Laurence) ainsi que les affirmations ou confidences sans ambiguïté que vous avez faites à travers les lettres au Juge Burgaud, à France 3 ou auprès de feu le psychologue Michel Emirzé.**
Ce qui paraît étonnant dans le détail de « votre » histoire d’Outreau, c’est que vous aviez avoué avoir participé aux viols en réunion plusieurs fois avant de vous rétracter…
Je ne peux que supposer que vous aviez ensuite nié les crimes pour être en accord avec la stratégie de la défense. Il faut faire confiance aux avocats et faire ce qu’ils demandent, ils savent où ils vont…
Enfin pas toujours comme c’est le cas actuellement !
Mais c’est là tout votre paradoxe Daniel, peut-être auriez-vous voulu soulager votre conscience et être équitablement puni , ce qui aurait été pour vous une rédemption, mais le poids du groupe, la pression de la famille (car votre père aurait été aussi concerné), les conditions carcérales des « pointeurs » sans évoquer des menaces de lourdes représailles à votre encontre, vous auraient fait choisir la voie du négationnisme.
On a tous à peu près compris comment vous vous êtes retrouvé chez les Delay et pourquoi.
Ça n’avait rien à voir avec la pédocriminalité, au départ, vous vouliez juste y trouver votre conso de shit…
Quand j’y pense, je me dis qu’un ado de 15 ans qui consomme du shit a déjà bien des cauchemars à oublier, des souvenirs douloureux à endormir.
Je ne peux qu’écrire ma lettre au subjonctif… Ce ne sont là que des suppositions.
Vous avez le droit de vous y reconnaître, ou pas.
Mais si mes suppositions correspondent au moins en partie à la réalité, auriez-vous la possibilité de voir en face ce qui aurait provoqué cette plaie béante que vous auriez essayé de soulager par le shit ?
Je vois déjà la tête de Me Delarue si je vous dis exactement à quoi je pense, et j’entends déjà meugler Me Dupond-Moretti si j’ose glisser entre deux lignes que je crois que vous-même auriez été violé plus jeune, que vous vous seriez promis de ne jamais faire subir ce calvaire à d’autres enfants, et que vous seriez devenu accro au shit, ce qui vous aurait permis de planer, de décrocher de votre douleur interne pendant quelques heures…
Hélas, vous vous seriez fait rattraper par l’attrait de l’argent qui vous aurait servi à acheter votre dose de shit, dose de shit qui aurait augmenté pour oublier comment vous auriez gagné l’argent, et besoin de gagner plus d’argent pour acheter plus de shit pour plus oublier comment vous en auriez gagné plus… Compliqué ? Je pense que vous avez compris.
Je le redis, ce ne sont-là que des suppositions, hein. Je vais emprunter au film de l’histoire de Marécaux le terme « fiction » et vous prendrez ou pas, ce qui vous intéresse dans ma lettre.
Donc selon mes supputations, pour de l’argent, vous auriez basculé dans ce qui vous faisait horreur, l’ayant subi vous-même. Vous auriez un dégoût de vous-même en réalisant que vous auriez renié une promesse que vous vous seriez faite !
Toujours selon mes allégations « gratuites », c’est cela qui vous minerait, ce qui n’aurait rien à voir avec le leitmotiv de votre présumée comparse Karine Duchochois qui vous dit fragile à cause de l’affaire. Elle tordrait la vérité puisque le fond de votre fragilité psychologique ne résiderait pas dans le fait d’avoir été accusé et emprisonné à tort, mais à cause d’un engagement avec vous-même que vous n’auriez pas respecté.
Ce qui deviendrait encore plus insupportable c’est que votre présumé bourreau n’aurait jamais été puni bien qu’il aurait détruit votre vie, et qu’aujourd’hui, après toutes ces années, il vous arriverait lors de moments de lucidité d’avoir une terrible envie de « tout balancer ».
Vous avez aussi appris que lorsque Lavier a reçu des menaces de mort via facebook par Chérif Delay pendant l’été 2011 (pour lesquelles il a été puni de 6 mois de prison avec sursis et une mise à l’épreuve de 3 ans), vous étiez vous aussi concerné par l’une des missives privées, tout comme l’étaient Myriam Badaoui et 4 autres acquittés.
Ah, Chérif vous aurait menacé de mort par le mp envoyé à Lavier ? Mais pourquoi donc?
Vous n’avez pas vraiment peur de Chérif mais son courage vous insupporte : il a assumé son délit et il continue à proclamer que tous n’ont pas été punis. Je suis convaincue que Chérif ne deviendra pas un prédateur car lui, il regarde l’abomination de son calvaire avec réalisme. En s’empêchant de tomber dans le déni, il refuse de basculer dans le crime comme le font bien souvent et malheureusement ceux qui pensent fuir leur supplice en occultant le drame dont ils ont été victimes.
D ‘un côté, Chérif Delay, un jeune homme reconnu victime qui n’a pas cherché à s’éviter la peine carcérale pour avoir proféré des menaces de mort réitérés (oui oui, un de ses avocats de l’époque, Me Constantino, lui avait suggéré une stratégie pour ne pas comparaître devant un TC. Mais déterminé à assumer ses actes, Chérif a préféré le jugement!), d’un autre côté, votre conscience qui aurait des sursauts de réaction pour rappeler qu’elle voudrait être soulagée d’un poids…
Si le choix que vous auriez à faire se résumait à cette dualité, j’imagine que ce serait plus facile de plaider coupable, car au fond de vous, vous êtes tellement d’accord avec la punition du fautif (ce qui aurait fait défaut à votre violeur présumé). Mais ce serait tout remettre en question.
Car bien que vous passiez en jugement pour des crimes présumés que vous auriez commis entre 97 et 99, vous pouvez difficilement donner une autre version que celle qui a été avancée par la défense de l’époque pour les crimes présumés que vous auriez commis après votre majorité pour lesquels vous avez été condamné puis acquitté.
La culpabilité, le doute quant à l’innocence, l’innocence des 12 autres reposent sur vous ! Non pas d’un point de vue juridique car nous ne pouvons contester une décision de jugement, mais dans la pensée de tout à chacun …
Là où ça se complique, c’est l’étalage des tractations qui ont été faites sur le dos de vos victimes présumées pour la période de 97 à 99, entre la défense et le procureur Jean-Amédée Lathoud qui vous avait assuré qu’il n’y aurait jamais de procès devant la cour des mineurs.
Vous auriez retenu votre souffle, pris de sérieux dérangements gastriques et consommé davantage de substances illicites en y pensant. Vous arriviez presque à l’échéance libératrice lorsqu’il a fallu que Innocence en Danger, une association militante de défense des enfants se permette de demander des renseignements au sujet de ce procès avant que n’arrive sa prescription.
Jean-Amédée Lathoud n’a pas le pouvoir de vous faire absoudre en évitant ce procès, et l’indignation véhémente d’Eric Dupond-Moretti qui devient pathétique par son esbroufe, ne suffira pas à l’empêcher.
Les accords qu’il a passé avec le procureur ne pourraient tenir sans que le peuple citoyen ré-informé ne s’insurge.
Une telle tractation serait vraiment des plus scandaleuses.
Pas sûr d’ailleurs que les 9 autres avocats confirment cet arrangement.
Quelle sorte d’accointance entre le proc et l’avocat pourrait permettre la non-existence du procès à venir ?
C’est tout ce qu’a trouvé Eric Dupond-Moretti pour vous défendre ?
Quant au nombre de vos avocats, c’est trop gros pour que cela vous soit bénéfique : « 10 avocats pour défendre un innocent ? » , les français se gaussent en lisant cela.
Eric Grupont-Moretti *** veut nous refaire le HAKA décrit par Me Pouille Deldique dans le film de SG. Pense-t-il de nouveau imposer le règne de la terreur dans le Tribunal et écraser les victimes présumées ou les témoins en déployant une armée de Goliath ?
Qu’il révise vite son Dalloz, le bruit et l’illusion volumétrique qu’il utilise pour convaincre les jurés, ne suffiront plus pour effrayer ceux qui passeront à la barre !
Vu d’ici, on dirait que vos défenseurs ont la pétoche, au moins autant que vous
La poignée de « révisionnistes » (qui va croîssant) arrive doucement à lever le voile des zones d’ombre de l’affaire d’Outreau et Internet aide désormais le peuple citoyen à voir l’affaire du point de vue des 12 enfants reconnus victimes.
Même si la presse affiche globalement sa mauvaise foi en soutenant vos avocats, on peut lire sur les forums un revirement total de l’opinion publique : si 12 enfants ont été reconnus victimes de viols et de prostitution, c’est qu’il y avait forcément des clients (donc des coupables) qui n’ont pas été punis, hormis Delay, Badaoui, Delplanque et Grenon ! C’est si important l’opinion publique, tout un pays qui vous regarde, vous juge et parle de vous..
Selon le document inséré dans le livre de Jacques Thomet, c’est vous qui receviez de l’argent et parfois en plus du shit pour violer les enfants, vous ne seriez donc pas client mais aussi prostitué, (présumé hein) coupable, mais victime à la fois, victime d’un proxénète. Je vous rappelle que vous aviez 15 ans !…
Je ne vous dis pas ce que vous avez à faire Daniel, je veux juste vous rappeler que votre prénom signifie en hébreux « L’Eternel est Juge » , car tous devront comparaître devant Celui a qui rien n’a échappé. Réfléchissez, rentrez en vous-même, décidez au-delà de ce que pourrait vous proposer votre armada d’avocats ; elle doit respecter votre choix, non pas l’inverse.
Salutations respectueuses
Laurence G.
PS : Si vous n’êtes pas suicidaire, faîtes-le savoir par écrit, comme l’ont fait d’autres personnes intègres qui ont voulu que pour l’affaire d’Outreau, la justice revête ses habits d’honneur et de dignité.