D’Auschwitz à Outreau : la mémoire massacrée des enfants survivants

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Docteur en psychopathologie-HDR, Expert près les tribunaux

JUSTICE – Il y a tout juste un mois, la France commémorait le 70ème anniversaire de la libération des camps de concentration. Les cérémonies qui ont eu lieu à ce moment-là et les témoignages des survivants (tous enfants à cette période), pourraient laisser penser que parler de l’holocauste a toujours été possible. Ce serait une erreur. À la libération des camps, la majorité des déportés a été condamnée au silence, non seulement en raison de leurs propres difficultés à se dégager de l’indicible de ce qu’ils avaient subi mais surtout parce que personne ne voulait entendre ces récits de l’horreur.

C’est la même violence du déni de la réalité de ce qu’ils ont vécu qui s’impose aujourd’hui, en France, aux enfants maltraités : pour ceux qui parviennent à révéler, il existe une identique difficulté à être reconnus victimes de ce qu’ils révèlent par cette communauté des autres pourtant censés le protéger (proches, société, monde judiciaire).

Le lien entre les enfants rescapés des camps de concentration et ceux qui ont survécu aux maltraitances et en particulier aux abus sexuels, apparaîtra sans toute excessif à ceux qui méconnaissent les conséquences traumatiques de ces violences. Et pourtant, il existe un lien indéfectible entre tous ces enfants aux vies fracassées : celui du génocide identitaire dont ils ont été victimes et ses traces traumatiques dans leur corps, dans leur âme, dans leur mémoire et dans leur histoire.

La terreur, la honte vous sidèrent. Les humiliations et la désaffilation organisées par vos bourreaux vous condamnent à la perte de toute confiance en l’autre à un âge où cette confiance est pourtant essentielle pour grandir sereinement. La terreur subie vous tétanise. L’emprise et l’identification à l’agresseur vous saturent de culpabilité. Les violences faites à votre corps entraînent une symptomatologie post-traumatique spécifique qui hypothèque votre devenir et ce d’autant plus que vous êtes un enfant en plein développement (troubles anxieux, autodévalorisation, perte de confiance dans l’avenir, reviviscences, problèmes psychosomatiques, cauchemars, hypervigilance, troubles de la mémoire et de l’attention, tristesse).

La mémoire traumatique encrypte vos traumatismes dans les abysses cérébraux et vous expose à des ressentis complexes et à des souvenirs lacunaires. Le fait de ne pas être totalement mort alors que d’autres n’ont pas survécu ou ont sombré dans des troubles majeurs hantent votre présent d’une conviction de ne pas être légitime. L’effraction psychique produit un sentiment d’étrangeté et l’impression de ne jamais être à sa place.

Pour ceux qui ont survécu à l’holocauste comme pour ceux qui ont survécu aux viols et aux autres maltraitances subies, s’annonce une autre épreuve qui pour certains deviendra un véritable enfer : pouvoir se dégager de ce statut d’objet de violence pour (re)devenir sujet de son histoire. Cette réinscription dans le monde des vivants (voire cette inscription, pour les enfants maltraités depuis l’enfance ou les enfants nés dans les camps), nécessitent la concomitance de deux processus dont chacun est en lui seul incertain : parvenir à témoigner ET que ce témoignage permette la reconnaissance des atrocités subies.

Comment dès lors l’enfant victime peut-il témoigner et être entendu à la hauteur de ce qu’il a vécu ? S’il est trop déstructuré psychiquement, son récit apparaît bizarre, ses pertes de mémoire inconcevables compte tenu de la gravité de ce qu’il prétend avoir subi. S’il est trop précis dans son témoignage, sa parole est considérée comme suspecte. S’il présente des troubles post-traumatiques envahissants il sera psychiatrisé et rapidement étiqueté de telle ou telle pathologie ; s’il ne présente pas de troubles visibles, il sera soupçonné de ne pas avoir subi tout ce qu’il dit. Pour l’enfant victime le parcours s’annonce des plus douloureux tant l’incompréhension voire la contestation de ce qu’il a vécu lui est opposée.

Au final quoi qu’il dise, quoi qu’il puisse exprimer, quoiqu’il manifeste, l’enfant qui a failli être exterminé par la violence des hommes, ne réagit jamais comme la communauté des autres le voudrait. Il est alors condamné à se taire. Sortis des camps, les rares déportés qui ont tenté de témoigner se sont fait traiter de menteurs par ceux qui savaient que les camps existaient et qui, pris d’une subite et indécente amnésie, tenaient plus que tout à ce que le silence impose sa loi ; mais aussi par tous ceux qui préféreraient rester dans une si confortable ignorance coupable.

C’est le même constat pour les enfants victimes de violences et de maltraitance et les qualificatifs ne manquent pas: menteurs et des affabulateurs jusque dans les années 1990 ; ils deviennent aliénés, répétant à l’insu de leur plein grès des écrits traumatiques qu’ils n’ont nécessairement pas vécus. Ce 5 juin 2015 marque une nouvelle ère : le « syndrome d’aliénation parentale » étant désormais dénoncé par la communauté scientifique internationale qui a refusé de l’inscrire dans sa dernière classification des pathologies psychiatriques (le DSM V), c’est une autre dénomination qui s’impose, celle des faux souvenirs (déjà utilisée au XIXe siècle). Pendant trois semaines s’est déroulé à Rennes ce que de nombreuses personnes ont qualifié de troisième acte de l’affaire d’Outreau : trois des enfants reconnus victimes de viol par les assises de Douai, puis par la Cour d’appel de Paris, ont poursuivi en justice un homme qu’ils accusent de les avoir violés quand lui-même était mineur (soit des faits remontant à près de quinze ans).

Lors de son réquisitoire l’avocat général des assises, soudainement autoproclamé expert psychiatre, a établi de la seule hauteur de son prétoire, que les témoignages des parties civiles ne pouvaient pas être entendus par les jurés car il s’agissait de « faux souvenirs ». Méprisant les auditions des différents experts à forts renforts de propos disqualifiants les personnes, leur expertise et leur fonction d’expert, ce magistrat a imposé son point de vue. Cette affirmation ne s’étayant sur AUCUNE expertise récente de la parole de ces parties civiles (les dernières remontant à plus de 13 ans) et allant à l’encontre de l’état actuel des connaissances scientifiques sur la mémoire traumatique, l’avocat général n’a en fait affirmé que sa seule interprétation idéologique des récits des parties civiles. Si une telle stratégie sémantique usant de la rhétorique perverse, était attendue des avocats de la défense (qui portés par un tel soutien ne se sont même pas donné la peine de plaider), elle ne peut qu’interroger de la part d’un avocat général ; représentant du ministère public.

Que signifie l’usage de ces termes : « faux souvenirs », « enfants aliénés », « enfants menteurs » ? Que nous disent-ils du lien de notre société aux enfants et plus particulièrement du système judiciaire aux enfants victimes ? Ce que nous constatons c’est que de tels termes dénient toute possible réalité aux violences faites aux enfants; qu’ils interdisent tout témoignage, tout récit traumatique et qu’ils condamnent victimes et mis en cause à une errance réflexive (le témoignage ne pouvant s’inscrire dans aucune élaboration pensable). La dénégation du vécu traumatique des enfants maltraités, produit une nouvelle violence, celle de leur expulsion de toute.

Ce dont témoignent aussi les propos de l’avocat général c’est la permanence et la force d’une logique négationniste en France face à toutes les maltraitances et violences subies par les enfants et ce, au plus haut niveau de l’État (puisque l’avocat général le représente).

Qu’elle est donc cette France où la dictature du silence et l’interdit du témoignage s’imposent aux enfants victimes ? Quand une société ne porte plus attention à ceux qui sont son avenir, elle s’ampute de son futur. Le silence imposé aux victimes par l’état est la caractéristique des logiques terroristes et terrorisantes propres aux dictatures. C’était cela le changement ?

Ces petits d’hommes ont été massacrés deux fois par la vie : par ceux qui leur ont fait subir les pires atrocités et par ceux qui leur ont dénié le droit d’en témoigner. Si la logique judiciaire conclue à l’acquittement des mis en cause, la motivation peut être explicitée par bien d’autres raisons que celles motivées par des idéologies négationnistes qui nous rappellent combien les mécanismes de déshumanisation et leurs effets sur les petits d’homme comme les adultes restent d’actualité dans la société française.

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Rapport d’examen psychologique de Daniel Legrand par Michel Emize

Ordonnance de : Monsieur Burgaud, en date du 26 novembre 2001
Affaire : Legrand Daniel
Dossier n° : 3/01/7
Personne examinée : Monsieur Daniel Legrand (fils)
Faits : Monsieur Daniel Legrand est mis en examen du chef de : viols sur mineurs de quinze ans ; agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans ; enregistrement et diffusion d’images pornographiques de mineurs.

Je soussigné, Michel Emirze, Psychologue diplômé de la faculté, expert près la cour d’Appel de Douai, commis par une ordonnance de Monsieur Burgaud, Juge d’Instruction, au tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer , aux fins de procéder à l’examen psychologique de Monsieur Daniel Legrand, certifie avoir accompli personnellement ma mission, à la maison d’arrêt de Loos, le 18 janvier 2002 et avoir consigné ci-dessous les résultats de mes investigations.

Mission :
1° — procéder à l’examen de personnalité et de comportement de Monsieur Daniel Legrand

2° — dire si ce sujet présente des troubles ou déficiences physiques ou psychiques susceptibles d’influencer son comportement.
• présente-t-il les traits de personnalité d’un abuseur sexuel ?
• présente-t-il des tendances homosexuelles ?
• présente-t-il des tendances perverses ?
• peut-on considérer qu’au moment des faits il présentait un état de manque au point de vue des relations sexuelles ou affectives ?
• s’agit-il d’un sujet potentiellement violent ?
• quel est son sens affectif vis-à-vis des enfants ? Perçoit-t-il les enfants comme des sujets comme des objets ?
• s’agit-il d’une personne influençable ou d’un sujet ayant pu avoir un rôle de leader dans la commission des faits qui lui sont reprochés ?
• le sujet a-t-il pu être influencé et entraîné dans la commission des faits par son père Daniel Legrand né le 4 août 52 ?

Vous préciserez quel rapport le sujet a avec son père ? (Loyauté ou non)
• quel rôle de la dynamique de groupe a-t-elle pu jouer dans la commission des faits

3° — dire si les troubles ou déficiences constatés rendent nécessaire une mesure de protection, de sauvegarde ou de rééducation particulière, un traitement, des soins spéciaux ou s’ils comportent des contre-indications professionnelles ou autres.
• quel est son sens moral ?
• perçoit-t-il la gravité des faits qui lui sont reprochés ?
• les regrette-t-il le cas échéant ?
• y a-t-il un risque de récidive ?
• faut-il, à l’avenir, éviter toutes relations duelles avec les mineurs ?

4° — déterminer son quotient intellectuel à l’aide de tout test utile dont vous expliquerez brièvement la présentation et objectifs.

5° — faire toutes autres observations à la manifestation de la vérité.

En particulier, le sujet présente-t-il des traits de comportement laissant penser qu’il a pu être lui-même victime de ce genre d’agissements (abus sexuels) dans son enfance ou son adolescence ?

Protocole : l’examen psychologique de monsieur Daniel Legrand, a comporté un examen clinique, un examen psychométrique (le test de la WAIS-R) et un examen projectif (le test de Rorschach)

Biographie et entretien clinique
Au cours de cet entretien, Monsieur Daniel Legrand, âgé de 20 ans, se montre coopérant.
Nous n’avons pas noté de troubles du discours, du cours de la pensée ou de la vigilance.
La thymie peu syntone, se module peu aux modifications du climat de l’entretien chez ce sujet à l’expression émotionnelle réduite, présentant un certain détachement affectif.
Il fait état d’une certaine anxiété qui l’a amené à prendre un anxiolytique qui avait été prescrit à sa mère.
Il exclut toutefois dans ses antécédents toutes tendances dépressives ou suicidaires.
Sil exclut toute consommation abusive d’alcool, il reconnaît une addiction au shit depuis l’âge de quinze ans et l’héroïne qu’il prend en snif, depuis deux ans.
Il évoque d’ailleurs quelques phénomènes de manque à type de douleurs dorsales et de sensations de froid.

Il est le troisième des cinq enfants issus de l’union de ses parents qu’il décrit comme relativement harmonieuse.
Il dépeint de bonnes relations avec sa mère, comme avec son père. Il décrit ce dernier comme un homme strict, ce qu’il estime normal.

M. Daniel Legrand interrompit sa scolarité à l’âge de 16 ans en classe de troisième. Il reconnaît qu’il n’avait aucune appétence pour la scolarité.
Il n’a pas donné suite aux contrats d’apprentissage qu’il avait envisagé d’entreprendre, puis il bénéficiera d’un contrat de qualification à l’âge de dix-neuf ans qu’il mena à son terme jusqu’en mars 2001.
Il devait, nous dit-il, entreprendre un apprentissage, mais n’a pas trouvé de lieu de stage.
Il occupe essentiellement ses loisirs par la pêche et le football qu’il pratique en club.
Le week-end il sort en boite avec ses amis et reconnaît y boire des alcools, forts, ce qui lui permet de lever ses inhibitions.

M. Daniel Legrand nous assure ne jamais avoir été abusé sexuellement.
Il nous précise, en dehors des faits constitutifs de cette procédure n’avoir jamais entretenu de relations sexuelles. Il a déjà connu des flirts mais présente une certaine inhibition vis-à-vis des jeunes filles de son âge.
Il a essayé une seule fois d’avoir une relation sexuelle avec une jeune fille rencontrée en boite, mais il faut sujet à une défaillance qu’il explique par son alcoolisation.
Il s’adonne régulièrement à l’onanisme. Ses fantasmes masturbatoires s’appuient sur des jeunes filles ou des jeunes femmes qu’il connait.

Les faits :
Monsieur Daniel Legrand reconnaît avoir violé les enfants et avoir été témoin du meurtre d’une fillette. Il explique ses actes essentiellement par l’attrait de l’argent et exclut toute attirance pédophile.
Il décrit une réelle organisation dans la réalisation de films pornographiques. Il y avait des relations entre adultes, entre adultes et enfants. Les femmes présentes lors de ces tournages avaient également pour fonction de l’exciter sexuellement lorsqu’il était en difficulté avec les enfants.
C’est ainsi qu’il déclare : « j’ai violé des enfants… C’est arrivé chez Delay, chez Myriam et Thierry, c’est des amis que j’ai connus à l’âge de quinze ans quand j’allais chercher mon shit à Outreau, j’atterrissais chez eux. J’ai fait ça pour l’argent, on m’a proposé de faire ça pour de l’argent et moi j’ai accepté, c’est Thierry Delay… Je touchais, 300, 400 jusqu’à 600 F, souvent j’avais du shit avec…
(?) J’ai eu des relations sexuelles avec les femmes, ça m’est arrivé avec Aurélie Grenon, ça s’est passé plus ou moins bien, ça a été. C’était quand il se passait ça… Les femmes pénétraient les enfants avec des godes, on faisait l’amour avec des adultes. On était filmés, des fois on me demandait de filmer…
(?) J’ai fait ça de 15 ans à 19 ans, j’ai arrêté vers l’an 2000 parce que j’en avais marre… (?) Les enfants je les violais, il y avait les femmes qui étaient là pour nous masturber, on me mettait bien en jambe, avec les femmes qui étaient présentes, Myriam et ses copines… des fois on étaient dix ou quinze…
(?) Les enfants criaient, ils hurlaient (?) A cette époque je fumais mon shit, je prenais pas encore d’héro… Thierry il a tué la fillette avec ses mains parce qu’elle hurlait et il a pas supporté, j’étais présent au moment où il l’a fait…
(?) Mon père, je l’ai jamais vu là-bas, lui ça a toujours été son boulot, sa famille, rien de plus… Mon père, c’est peut-être de la vengeance qu’ils veulent faire sur moi, parce que j’étais pas de leur quartier ».

M. Daniel Legrand explique ses actes par l’attrait de l’argent facile. Il ne s’agissait pas pour lui, nous assure-t-il, d’argent destiné à sa consommation de drogue.
S’il émet des regrets, ceux-ci ne sont toutefois pas élaborés en réel sentiment de culpabilité : « je regrette c’est sûr de les avoir fréquentés, je ne peux plus revenir en arrière, c’est fait, c’est fait, je m’excuse envers les victimes, c’est clair… (comment vivez-vous avec cela ?) Des jours c’est pas facile, sinon ça va. A part cette histoire-là, je suis quelqu’un de bien, de super agréable » commente-t-il.

En détention, il a rencontré une seule fois le psychiatre. Il n’a pas honoré le second rendez-vous qui lui avait été fixé car au cours de cette consultation, il n’avait pas été en mesure d’élaborer un lien thérapeutique.

Examen psychométrique (cf. annexe)
Le test de la WAIS-R détermine un quotient intellectuel situant le sujet das la zone statistique de la débilité mentale légère.
Ce niveau intellectuel déterminé psychométriquement peut-être toutefois considéré comme sous-évaluéed en raison du manque d’application du sujet dans l’épreuve. Il est en effet peu apte à l’effort intellectuel et abandonne rapidement devant la difficulté.
La pensée demeure très attachée à la réalité concrète.

Examen projectif (cf. annexe)
Le test de Rorschach met en évidence une personnalité anxieuse et défensive.
Il apparait un certain détachement affectif chez ce sujet à la personnalité peu structurée, aux mécanismes de défense défaillants pour contenir les émergences pulsionnelles.
Nous relevons des difficultés devant les deux planches parentales auxquelles le sujet ne pourra fournir de réponse. La planche maternelle sera d’ailleurs rejetée en fin d’épreuve.
Il apparait donc des difficultés non résolues avec les images parentales auxquelles le sujet ne nous donne pas toutefois accès au cours de l’examen clinique.
Nous relevons, à la planche sexuelle, une intrication entre les pulsions agressives et les pulsions sexuelles.
Nous ne relevons pas toutefois de réponses sexuelles inadaptées.

Discussion-conclusion

1° — L’examen psychologique de M. Daniel Legrand ne met pas en évidence de troubles psychopathologiques structurés patents.
1° — L’examen psychologique de M. Daniel Legrand n’a pas mis en évidence de troubles psychiques de nature à perturber ses capacités d’adaptation.
Nous relevons dans la personnalité de M. Daniel Legrand un certain nombre des traits que nous rencontrons dans le profil des abuseurs sexuels : l’immaturité affective, le fonctionnement égocentrique de l’affectivité, l’intrication des pulsions agressives et sexuelles et la défaillance du sens moral.
Nous n’avons pas relevé de tendances homosexuelles ou de tendances perverses.
Au moment des faits nous ne pouvons considérer que Monsieur Daniel Legrand était en situation de manque en ce qui concerne les relations affectives ou sexuelles. Soulignons toutefois les difficultés avec les images parentales mises en évidence par l’examen projectif.
Il ne peut être considéré comme un sujet violent ou dangereux d’un point de vue psychopathologique.
Vis-à-vis des enfants, il manifeste une certaine indifférence affective. A l’occasion des faits, il a élaboré avec les enfants une relation utilitaire, les utilisant comme objet.
Au moment de la commission des faits, il avait quinze ans, il pouvait donc être influençable devant des adultes plus structurés que lui. Il n’était pas dans une relation de leader avec les adultes concernés.
Monsieur Daniel Legrand nous assure que son père n’a pas participé aux faits auxquels il a lui-même participé.
Il manifeste une certaine loyauté vis-à-vis de son père, qui est toutefois du registre du normal.
Les faits auxquels il a participé témoignent d’une grave carence dans la structuration à a morale, pouvant avoir pour origine des défaillances sérieuses dans les repères familiaux. Monsieur Daniel Legrand ne nous donne pas toutefois accès à ces carences au cours de l’examen clinique.
A son sujet la dynamique de groupe a pu jouer un rôle facilitateur en diluant le surmoi, en levant les inhibitions, en abaissant le sens moral et les capacités d’autocritique.

3 — Les éléments qui se dégagent de cet examen psychologique ne constituent pas une indication à l’instauration d’une mesure de protection ou de sauvegarde.
Le sens moral de ce sujet qui perçoit la gravité des actes qui lui sont reprochés, est défaillant.
Il émet quelques regrets qui demeurent encore infantiles et ne sont pas structurés en réels sentiments de culpabilité.
Le détachement affectif du sujet et la défaillance de son sens moral sont ici des éléments qui nous amènent à une certaine réserve sur le plan du pronostic. Il est de ce fait contre-indiqué qu’il puisse être en contact avec des mineurs pouvant être placés sous sa responsabilité.

4° — L’examen psychométrique détermine un quotient intellectuel performance situant le sujet dans la zone statistique de la débilité mentale légère. Ce niveau peut être considéré comme sous-évalué compte tenu du manque d’implication du sujet et de sa passivité.

5° — Nous n’avons pas relevé d’éléments pouvant nous donner à pense qu’il ait pu être victime d’abus sexuels pendant son enfance ou son adolescence.

Dunkerque, le 19 janvier 2002
Michel Emirze

Rapport aveux DLF