C’est l’histoire de l’oignon que l’on pèle, après une pelure il y en a une autre, et encore une autre couche et l’on doit vous aider à peler toutes ces couches, pour les intégrer à votre vie sans qu’elles vous fassent souffrir encore.
Normalement je devais travailler sur cette esquisse :
Mais j’en suis incapable aujourd’hui, c’est la totale explosion dans ma tête. Cette souffrance que j’ai à l’intérieur de moi, me pousse à me sentir seule aussi derrière cet écran, et seule avec mon crayon.
Je dis bien c’est cette souffrance qui me pousse à sentir cela, car Béatrice sait qu’elle n’est pas seule, mais c’est mon cerveau, qui lui parfois ne le comprend pas, il reste en mode : « déraillement, ça disjoncte ». Il y a comme une partie émotionnelle qui est là qui a subi ces multiples traumatismes. Et l’adulte Béatrice essaie de survivre au milieu de cette bouillasse du passé qui est remontée avec une extrême violence depuis les derniers événements que j’ai vécu et les attentats.
Je suis cette espèce d’oignon auquel il faut enlever ces multiples couches de ce passé afin que je puisse mieux respirer, mieux avancer, et je dirai pour mieux vivre, car ce mot là, oui il est important pour moi : Vivre.
Pour la réalisation de mon esquisse, j’ai commencé par dessiner l’oignon avec cette expression de souffrance. Bien sûr, j’aurais pu réaliser un oignon avec un sourire, mais je me rends compte que garder des situations en soi qui font mal, en fin de compte, la douleur ne finit jamais de grandir, et ça finit par exploser car c’est devenu ingérable pour mon cerveau. Alors ça fait une explosion, ça fait boum ça explose comme une bombe comme une bombe atomique, et c’est insupportable.
J’ai ensuite continué mon esquisse en dessinant ce corps qui se tord de douleur, car c’est bien cela le corps vit encore et subit la douleur physique liée aux traumatismes. Et mon cerveau me renvoie la frayeur, les angoisses, les terreurs diverses, mes hurlements etc.
Le passé est venu m’aspirer et me ramener lui et me fait sentir la mort.
Pour la réalisation du manteau de mon esquisse, je me suis sentie obligée d’y mettre de la couleur, je parle pour l’oignon.
Pour le corps couleur noire estompée avec les doigts. ça devait être comme ça.
Matériaux utilisés :
Dessin sur feuille de format de 36×48 cm à grain fin.
Je me suis servie de mes crayons de couleurs aquarelles, un pinceau et une goutte d’eau et je me suis servie aussi du crayon grafic 6B ? ‘b, et HB.
Que ressentez-vous ?
Hormis les dissociations, qui me perturbent beaucoup en ce moment, car leur violence est forte, j’ai ressenti des sensations bizarres et incompréhensibles, comme par exemple lors de la coloration du corps, je devais insister sur le contour du corps, j’ai ressenti une certaine force, à la limite de vouloir casser mon crayon.
Je ne suis pas arrivée à savoir si c’était de la colère ou un ras le bol de ressentir dans ma tête cette souffrance et cette impuissance.
Cette réaction a été la même pour l’oignon, comme si cette douleur ne devait pas sortir de celui-ci.
Il y avait ce moment aussi où je voulais prendre le cutter et me punir, c’est la même sensation qui est ressortie dans le fait de vouloir me soûler, voler très haut et mourir et revenir comme si rien était arrivé.
Mais il y a cette question qui est venue me titiller : n’y a t-il pas une autre partie émotionnelle qui recherche à se mettre en grand danger ? Qui chercherait à trouver une sensation plus forte pour atténuer cette souffrance dans ma tête ?
Et pour finir je recherchais Béatrice adulte au milieu de tout cela mais ça m’a été difficile. Je sais qu’elle est là, qu’elle existe, mais après c’est beaucoup plus compliqué pour la sentir en moi. Comme endormie je dirais, dans le brouillard.
Beaucoup d’images du passé sont venues tordre mon cerveau de douleur, et les douleurs physiques étaient aussi présentes, comme le mal de tête, mal aux niveau des chevilles, et cette sensation d’avoir été attachée, et d’avoir couru à en perdre la respiration. Et le fait aussi ne n’avoir pas pu dessiner sur une grande feuille comme d’habitude, la grandeur de l’espace de celle-ci, m’a effrayée.
Pour terminer je n’arrive pas à mettre un mot devant ce dessin.
Mais je sais une chose ça a du m’aider, mais pour l’instant c’est beaucoup trop envahi dans ce cerveau pour vous dire en quoi. Je le sais par l’expérience en dessinant.