Violé à 7 ans, Chester Bennington a passé sa vie à tenter de se reconstruire

Violé à 7 ans, Chester Bennington a passé sa vie à tenter de se reconstruireViolé à 7 ans, Chester Bennington a passé sa vie à tenter de se reconstruire
Par Audrey Kucinskas
21/07/2017
Le leader de Linkin Park a été retrouvé mort en Californie. Depuis des décennies, il se battait contre ses nombreux démons.

« Si ce n’était pas pour la musique, je serais mort. C’est sûr à 100%. »

En mars 2017, Chester Bennington, leader du groupe Linkin Park, présente son nouvel album, One More Light.
Dans cette interview donnée au site Rock Sound, il semble plus que jamais décidé à profiter de son existence, peu importe le qu’en-dira-t-on, de ces détracteurs qui le jugent sans doute un peu has-been.

« J’en suis à un point où je me fous de ce qu’on peut penser de moi. Allez-y, dites ce que vous voulez, en tant que personne, en tant qu’artiste, j’en ai rien à foutre. Je sais exactement qui je suis, je sais exactement de quoi je suis fais et je suis super heureux. C’est génial de pouvoir faire ce que je j’aime, surtout pour une personne comme moi. »

« Quand je pense à ces choses horribles, j’en tremble »

Mais ses nombreux démons l’ont rattrapé : Chester Bennington est retrouvé pendu chez lui jeudi, dans sa résidence de Palos Verdes Estates.
Accro à la drogue, alcoolique « rageux », comme il le dit lui-même en 2011 au magazine Kerrang !, Bennington fuit une enfance douloureuse.

« Si je réfléchis à mon enfance, au moment où j’ai été abusé, quand toutes ces choses horribles me sont arrivées, j’en tremble »


Il est violé par un ami de la famille quand il n’a que sept ans. Un homme plus âgé contre qui il ne souhaite pas porter plainte. « Je n’avais pas besoin de vengeance », indique-t-il au Guardian en 2011.

« Être frappé et violé, ce n’était pas drôle, poursuit-il. Personne ne veut que ça vous arrive, et honnêtement, je ne me souviens pas de quand ça a commencé. »

Il raconte alors cette anecdote : c’est quand il se rend chez sa mère quelques années auparavant, et qu’il voit une photo de lui enfant, que tout lui revient.

« Et tout d’un coup, parce que j’ai moi-même des enfants, j’ai pensé : ‘C’est à ça que ça ressemble.’ Et je me suis souvenu. Mon Dieu. Je me suis souvenu de ce qu’il m’était arrivé à ce moment-là et même en y pensant aujourd’hui, j’ai envie de pleurer. J’étais tellement petit, plus petit que ce que je pensais, s’étonne-t-il encore. Mon Dieu. Ce n’est pas étonnant que je sois devenu un junky. Ce n’est pas étonnant que je sois devenu fou pendant un moment. »

Quand ses parents divorcent, alors qu’il n’a que 11 ans, le petit Chester commence à fumer des joints, puis à prendre de la cocaïne et de la méthamphétamine et du LSD. Entre 13 et 16 ans, il est défoncé.

« Je me sentais mieux quand j’étais comme ça, explique-t-il à Rolling Stone. Je me sentais plus en contrôle de ma vie, de mon environnement, quand j’étais saoul ou sous hallucinations. »

Il transforme sa douleur en tubes

C’est comme ça avec Chester Bennington : il ne cache jamais ses difficultés à survivre. Il partage tout, même ses troubles les plus profonds.

« Je n’ai aucun souci à ce que les gens sachent que j’ai un problème d’alcool. C’est ce que je suis et j’ai de la chance de bien des façons parce que je peux y faire quelque chose, avait-il confié à Noise Creep. Je peux grandir en tant que personne. Ce n’est pas cool d’être alcoolique. C’est cool de guérir. C’est juste qui je suis, ce sur quoi j’écris, ce que je fais, et la plupart de mon travail est un reflet de ce que j’ai enduré. »

L’artiste tente ainsi, tout au long de sa carrière, de se servir de sa douleur pour créer. Dans le titre Crawling, Bennington parle librement de ses addictions. « Il y a quelque chose à l’intérieur de moi. Qui remonte à la surface. Qui me consume, me trouble. Cette perte de contrôle que je crains, ça ne s’arrête pas », chante-t-il.

« C’est sans doute la chanson la plus authentique que j’ai écrite pour Linkin Park, confesse-t-il à Noise Creep, en 2009. Cela parle de mon manque de contrôle sur moi-même. […] Je ne pense pas que j’aurais pu créer quelque chose comme ça simplement en m’inspirant de quelqu’un d’autre. Donc, dans un sens, cela a été très constructif pour moi. »

Plus qu’une jambe cassée, un esprit brisé

À ses problèmes de drogues, s’ajoute, d’abord, sa blessure en 2015, pendant une tournée de Linkin Park. Bennington se casse la jambe et sombre dans la dépression. Plus qu’une jambe cassée, « c’est son esprit qui est brisé », raconte Mike Shinoda, lui aussi membre du groupe. Bennington fait comme il fait d’habitude : il transforme sa douleur en nouvel opus, One More Light. « L’une des chansons que j’avais écrites à ce moment-là s’appelle Je hais le monde en ce moment. Ce sont vraiment les paroles. Mais j’ai réussi à surmonter ça, à avancer », explique-t-il à Face Culture.

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UN sur CINQ : Interview de Mme Catherine Bonnet, consultante en pédopsychiatrie

Mme Bonnet explique les difficultés à détecter les signes physiques d’abus sexuels d’enfants. Elle souligne que lorsque les médecins posent des questions à un enfant, ils doivent écouter l’enfant avec beaucoup d’attention afin que celui-ci se sente en confiance et révèle des secrets qu’il aurait pu garder cachés au plus profond de lui-même. Mme Bonnet décrit la situation actuelle en France: les médecins se trouvent dans une situation délicate lorsqu’ils doivent choisir de signaler ou non les cas suspects d’abus sexuels d’enfants. Soit ils signalent les cas suspects et risquent des représailles juridiques, soit ils ne le font pas et courent le risque d’être condamnés pour ne pas avoir signalé un cas suspect. Seuls les médecins qui sont fonctionnaires ont une obligation de signalement. Mme Bonnet précise également que cette situation doit être clarifiée et souligne la nécessité d’une législation claire qui oblige les médecins à signaler les cas suspects d’agressions sexuelles et qui soit assortie d’une immunité disciplinaire, civile et pénale si le signalement est fait de bonne foi. Pour plus d’informations, visitez les sites www.coe.int/oneinfive, www.coe.int/lanzarote et www.coe.int/children