Le Point – Publié le – Modifié le
Les plaidoiries de la partie civile doivent se poursuivre jeudi matin avec les avocats de Jonathan Delay avant le réquisitoire de l’avocat général.
Les avocats de Chérif et Dimitri Delay ont plaidé mercredi la culpabilité de Daniel Legrand, un des acquittés d’Outreau, qui répond d’accusations de pédophilie datant de sa minorité, en tentant notamment de retourner contre lui des aveux sur lesquels il était ensuite revenu, affirmant avoir voulu montrer que ses accusateurs mentaient. « L’aveu n’est pas la reine des preuves… Par contre, faut voir la nature de l’aveu ! Et les précisions, et les détails… Parce que vous avez quand même des coupables qui ont le droit d’avouer : le fait qu’ils avouent ne les fait pas innocents… », a ironisé Me Léon-Lef Forster, avocat de Dimitri et Chérif Delay.
« On m’a proposé de faire ça pour l’argent… » a poursuivi l’avocat en citant une partie des aveux de Daniel Legrand. « On peut reconnaître sans donner ces détails, on peut dire : J’y étais, et si on ne sait pas ce qui s’y passait, on peut reconnaître sans donner d’honoraires… », a poursuivi Me Forster. « En garde à vue, il (Daniel Legrand) est dans le déni, mais il y a quelqu’un qui le reconnaît », déclare pour sa part Me Yves Monerris, avocat de Chérif Delay. C’est peut-être ce qui a conduit Daniel Legrand, selon l’avocat, à se dire : « Je suis acculé, faut peut-être que je m’exprime, que je dise ce qui s’est passé. » « Est-ce que, dans une stratégie un peu compliquée, qui m’échappe totalement, je vais parler du meurtre de la petite fille (que Daniel Legrand avait évoqué lors de ses aveux, NDLR), tout le monde va se réveiller… ? » a poursuivi Me Monerris. « Comment, pour sauver ma peau, je vais faire des déclarations stupéfiantes et néanmoins circonstanciées ? »
Le « cri » de Chérif
Les deux avocats ont également appuyé leurs plaidoiries sur les paroles des enfants parties civiles qui n’avaient pas reconnu Daniel Legrand pendant les procès de l’affaire en 2004 et 2005 mais avaient néanmoins cité son nom, et celui de son père homonyme – décédé depuis -, pendant l’instruction.
Chérif, Dimitri et Jonathan Delay ont en outre tous les trois, pour la première fois lors du procès de Rennes, désigné Daniel Legrand comme ayant participé aux agressions sexuelles et viols dont ils ont été victimes enfants. Leurs parents et un couple de voisins ont été condamnés en 2004 pour ces viols. « Je ne dis pas que la parole de l’enfant est sainte » mais « entre « rien ne doit être retenu » et « tout doit être retenu », il y a quand même un fossé », a estimé Me Forster en référence aux nombreux débats, pendant les 11 jours d’audience, sur cette question. « Ils sont brisés : chacun s’exprime comme il peut mais au moins, si ce procès avait une raison d’être, cela a été la possibilité pour eux d’exprimer » ce qu’ils ont vécu, a-t-il ajouté. Chérif « c’était un cri », « Dimitri a eu du mal à commencer à parler, peu à peu sa parole venait… Pour la première fois depuis des années il a dormi une nuit entière : alors vous n’avez pas été là pour rien », a dit Me Forster à l’adresse des jurés, quatre femmes et deux hommes.
« Dany Legrand, d’où il le sort, Dimitri ? », a-t-il demandé, en référence à la première mention de ce nom dans l’instruction du juge Fabrice Burgaud, dans une liste de noms d’agresseurs retranscrite par l’assistante familiale chez qui Dimitri Delay avait été placé. « Comment pourrait-il donner le nom de quelqu’un qu’il n’a jamais vu ? C’est élémentaire, on peut tourner autour du dossier, cet élément est insurmontable », a estimé l’avocat. « Si vous avez un doute, vous acquitterez M. Daniel Legrand parce que c’est la règle fondamentale de la République : s’il y a un doute, il doit profiter à l’accusé », a rappelé Me Forster.
Les plaidoiries de la partie civile doivent se poursuivre jeudi matin avec les avocats de Jonathan Delay avant le réquisitoire de l’avocat général. Celui-ci n’a pas caché son intention de plaider l’acquittement de Daniel Legrand, déjà acquitté en 2005 comme l’avaient été douze autres des dix-sept accusés de cette affaire, qualifiée de « fiasco judiciaire ».
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