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Lorsque quelqu’un souffre d’un problème, d’une difficulté, d’un symptôme qu’il voudrait voir disparaître, il suffit de lui proposer d’y faire face ou simplement d’y porter attention et de lui demander d’attendre que la solution, ou du moins un commencement de solution, se fasse jour. J’ai répété cette expérience des centaines de fois et le plus souvent non sans effet. Il est évident que ce schéma revêt dans chaque cas des formes singulières. L’exposé d’un exemple permettra cependant d’en extraire quelques principes. Une jeune femme se plaint de ne jamais pouvoir conduire jusqu’au bout ses entreprises et de se frustrer elle-même par des échecs qu’elle pourrait éviter. Au cours d’une première séance il lui est impossible de se détendre et moins encore d’abandonner le souci de comprendre. La deuxième séance n’est pas plus efficace, mais c’est pour des raisons inverses : elle entre en hypnose avec une telle facilité que les difficultés de son existence disparaissent. L’oscillation entre impossibilité et facilité, ou entre le se sentir très mal et le se sentir très bien, me semble alors représenter la fuite devant toute transformation ; c’est pourquoi je lui propose de faire face à son problème et d’attendre. Voici quelques répliques d’un dialogue entrecoupé de longs silences :
– Il y a probablement, lui dis-je, un obstacle vous interdisant l’accès à une vie mieux aboutie.
– J’ignore quel peut être cet obstacle.
– Vous n’avez pas besoin de le connaître ; il suffit que vous y portiez une attention prolongée et que vous attendiez le plus tranquillement que vous pourrez.
– Je ne peux pas avoir de projets ; je suis courageuse quand le feu a pris, mais, lorsqu’il est éteint, c’est la déprime.
– Pouvez-vous regarder, écouter, sentir cela ?
– Il y a une petite pellicule très dense sur une énorme épaisseur de chaos et de confusion.
– Pouvez-vous vous en approcher quelque peu ?
– Image de camp de concentration, de rails qui n’aboutissent à rien et des gens alentour qui travaillent dans les champs sans rien voir. On ne peut pas vivre quand il y a ça à côté.
– Est-ce que l’on ne peut plus vivre, comme cela arrive aux rescapés, ou est-ce que l’on ne doit pas vivre ? Considérez longuement cela.
– On ne doit pas vivre, je ne dois pas vivre.
– Mettez-vous bien en face de ce « je ne dois pas vivre »…
N’est-il pas porteur d’un lien qui ne saurait être rompu ?