5/ Outreau : la télédépendance de l’opinion – « télécratie 4 » – « procès- téléréalité »

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J’ai été chargée de l’enseigner à des gendarmes spécialisés 
en 1998. Leur plus grand étonnement – et sans doute celui 
du lecteur non spécialiste – concernait le point 16 de cette 
échelle, « doutes à propos de sa propre déclaration », qui 
est un facteur de validité si les autres sont retrouvés.
Tous 
les officiers de police judiciaire, gendarmes ou policiers, 
mais aussi les travailleurs sociaux et les magistrats, et bien 
évidemment les psychologues, ont eu à connaître cette 
procédure qui complétait leurs approches diverses. Les 
avocats qui assuraient classiquement la défense des mis en 
examen pour viols et agressions sexuelles fulminaient face 
aux acquis et à l’efficacité des professionnels, et en particulier 
des experts psychologues.

Dans le même ordre d’idée, il faut encore évoquer la 
montée en puissance de la télédépendance de l’opinion, ce 
que le philosophe Bernard Stiegler appelle la « télécratie 4». 
Les procès d’Outreau ont été les premiers « procès- téléréalité ». La parole ne pouvant s’incarner que par l’image 
compassionnelle.
Or, sans visage et sans parole, les enfants devenaient des êtres fantomatiques et fous, réactivant les 
fantasmes primitifs de notre inconscient collectif.

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Autres billets sur l’affaire d’Outreau
1/ Outreau – La vérité abusée
2/ Outreau, la vérité abusée. 12 enfants reconnus victimes
3/ Outreau : Les lettres de Kevin Delay au juge Burgaud
4/ 24 février 2011 – La parole de l’enfant après la mystification d’Outreau
6/ Des troubles du comportement
7/ Saint-Omer – juin 2004 : Les enfants présumés victimes sont placés dans le box des accusés !
8/ Saint-Omer – Selon M. Monier, une telle configuration des lieux a eu un effet négatif sur le procès, personne n’étant à sa place
9/ Saint-Omer – Mercredi 2 juin 2004 – Le procès bascule le jour des rétractations provisoires 
de Myriam Badaoui
10/ La victime envahie par le souvenir traumatique ne marque aucune pause « pour réfléchir »
11/ le test du Rorschach
12/ Militantisme association
13/ Les points de défaillance au procès de Saint-Omer
14/ Florence Aubenas : le danger de la victime résiliente mêlée à toutes les causes
15/ Un éclairage sur les rétractations et les contaminations
16/ Outreau : presse & justice – Florence Aubenas : je consulte le dossier d’instruction
17/ À propos des aveux de l’un des accusés acquittés d’Outreau
18/ Il s’avère que c’est l’ingestion d’un médicament – l’amobarbital –, qui peut induire sous hypnose la construction des faux 
souvenirs, et non pas l’hypnose seule

3/ Outreau : Les lettres de Kevin Delay au juge Burgaud

mercredi 10.12.2008, 14:00
par
Mickaël TASSART

L’écriture est soignée, preuve d’une application certaine même si le texte est truffé de fautes d’orthographe.
Il s’en excuse, Shérif, dit Kévin Delay, auprès du destinataire de sa lettre : le juge Fabrice Burgaud.
La Semaine dans le Boulonnais a pu consulter, sans en obtenir de copies, une lettre manuscrite, recto verso, envoyée par le fils aîné de Myriam Badaoui au juge critiqué pour sa gestion du dossier « Outreau ».
En avril 2008, depuis sa cellule de la maison d’arrêt de Sequedin, dans le Nord, où il purge une peine de prison pour des cambriolages commis dans le Boulonnais, Kevin Delay adresse une missive à « Mr Burgaud », qu’il domicilie au « TGI de Paris. » « Je vous écris cette lettre pour vous remercier de tout ce que vous avez fait pour moi », commence l’enfant victime, aujourd’hui majeur.
La rancœur transpire d’un texte poignant. « J’ai fait une erreur de ne pas parler au tribunal de Paris », concède Kevin dans son courrier, en rapport à son audition devant la cour d’appel, en novembre 2005. Regret que Kevin a également exprimé auprès de Me Boyer, son nouvel avocat, qui dit de ne pas avoir eu connaissance de la correspondance de son client avec le juge Fabrice Burgaud.
Dans le secret du huis clos demandé par les parties civiles, Kevin s’était effectivement montré peu disert à Paris. Son assistante maternelle avait toutefois rappelé, qu’à la différence de ses frères cadets, volubiles à l’excès, Kevin ne s’était confié qu’une seule fois à sa « tata » pour évoquer les sévices subis à la Tour du Renard. Aujourd’hui, le jeune homme veut parler. « Tout le monde doit savoir ce qui s’est vraiment passé », fait-il savoir, à plusieurs reprises, dans la lettre. Quelques lignes plus loin, il veut « dire aux Français » sa version de l’affaire d’Outreau, évoquant l’idée « d’écrire un livre. » Dans son texte, Kevin parle de ses blessures. Des plaies toujours ouvertes : « J’ai failli me suicider », écrit-il.
« Ils ont détruit ma vie, je voudrais dire à la France ce que moi et les autres enfants avons subi. » De qui parle-t-il quand il écrit « Ils ont détruit ma vie » ? Et quel crédit apporter à cette déclaration ?
Me Boyer, qui a rencontré son nouveau client il y a peu de temps, est frappé par « sa force extraordinaire, qui tient de la survie. » Il concède toutefois que son travail a consisté « à canaliser cette fougue, à l’exprimer de manière posée en se tenant aux questions de droit. » Mais la lettre envoyée au juge Burgaud ressemble plus à un appel au secours.

Mickaël TASSART

La Semaine dans le Boulonnais Me Boyer : « A quoi ont servi les jurés ? » Maître Jean-Christophe Boyer, du cabinet d’avocats associés Boyer-Lampropoulos, dans le 15e arrondissement de Paris, est le conseil de Sherif (son prénom selon l’état civil) dit Kévin Delay, le fils aîné de Myriam Badaoui.
Comment Kevin Delay a-t-il choisi le cabinet parisien pour assurer sa défense? « Les bonnes personnes l’ont bien conseillé», élude seulement, agacé par la question, Me Boyer qui «veut s’en tenir à la plainte » déposée contre le procureur général de la cour d’appel de Paris, Yves Bot.
Selon l’avocat de Kévin Delay, le haut magistrat «a outrepassé les prérogatives du code de procédure pénal en s’exprimant publiquement sur le dossier avant son issue. » Pour Me Boyer, Yves Bot s’est invité dans un procès « dont il n’était qu’une des parties prenantes. » L’avocat parisien estime que les propos d’Yves Bot étaient de nature à fausser le jugement des jurés. « Les débats n’étaient pas clos quand Yves Bot a fait part de ses regrets, rappelle Jean-Christophe Boyer. Or, en se plaçant face aux caméras, dos à la cour, il savait que ses propos allaient être repris dans les journaux télévisés de 20 heures. Et pour 60millions de Français qui découvrent les images le soir même, les accusés sont déjà les acquittés d’Outreau. Tout le monde ne fait pas du droit et, aux yeux de l’opinion publique, Yves Bot représente la justice de ce pays.»
Me Boyer ne veut pas remettre en cause le jugement de la cour d’appel de Paris. «Ne me parlez pas du fond du dossier d’Outreau, je n’ai pas d’avis à donner là-dessus et ça ne m’intéresse pas de le faire», complète-t-il.
Mais pour lui, «le code de procédure pénal condamne une personne tenant des commentaires qui tendraient à influencer la décision d’une juridiction.» Était-ce le cas dans cette affaire ?
« Mettez-vous à la place des jurés qui n’ont pas encore délibéré, commande l’avocat de Kévin Delay. Ils se demandent à quoi ils vont servir puisqu’Yves Bot, drapé des habits de la justice, vient de présenter officiellement ses regrets. À ce moment, c’est comme si le procès était déjà fini. »
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2/ Outreau, la vérité abusée. 12 enfants reconnus victimes par Marie-Christine Gryson-Dejehansart
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5/ Outreau : la télédépendance de l’opinion – « télécratie 4 » – « procès- téléréalité »
6/ Des troubles du comportement par Marie-Christine Gryson-Dejehansart
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7/11/2011 – Affaire Outreau : Myriam Badaoui a été libérée Par Jean-Michel Décugis, Adriana Panatta et Aziz Zemouri