Sans surprise il y a foule ce matin pour venir entendre Myriam Badaoui, ex-accusatrice en chef de l’affaire #Outreau
Myriam Badaoui est arrivée cachée sous une couverture de survie. Elle ne souhaite ni être filmée, ni photographiée.
L’audience va bientôt reprendre. Myriam Badaoui doit être entendue la première. Elle ne veut être ni photographiée ni filmée.
Ce matin, l’audition très attendue de Myriam Badaoui qu’on a pas vue depuis 10 ans et qu’on dit métamorphosée. LT à suivre
Myriam Badaoui ne veut pas être photographiée, filmée. Elle est arrivée dans un fourgon de police sous une couverture de survie.
Il en va sans doute de la sécurité de cette femme qui a changé physiquement et refait sa vie après 10 ans en prison.
Beaucoup de médias et énormément de public pour assister à cette audition. On attend le face à face de la mère et des fils.
Mais pour le moment aucun fils Delay n’est dans la salle d’audience.
Chérif et et Jonathan Delay ne sont pas dans la salle
Si l’on en croit le planning d’audience, l’audition de Myriam Badaoui pourrait durer toute la matinée.
L’audience reprend. Le président fait un point sur l’organisation des débats.
Myriam Badaoui s’apprête à être entendue. On est allé la chercher dans la salle des témoins. Le public retient son souffle.
Myriam Badaoui entre dans la salle. Très amaigrie, sous une capuche. Elle est voilée. Le président lui demande de l’enlever. Elle refuse
Myriam Badaoui entre. Elle porte un sweet à capuche qui recouvre entièrement sa tête. Le président lui demande de se découvrir.
Badaoui est entrée par l’avant de la salle, cachée sous une capuche de veste de jogging. Il est impossible de voir son visage
Elle garde un foulard sur sa tête à la barre, malgré la remarque du président
Sous la capuche, un foulard que Myriam Badaoui se refuse à enlever.
– Le président : connaissiez vous l’accusé Daniel Legrand avant les faits qu’on lui reproche ?
– Myriam Badaoui : non
Myriam Badaoui : « j’ai été présentée devant M. Burgaud. Il m’a montré des photographies où il y avait Daniel Legrand, son papa. »
Badaoui : « Je ne connais pas Daniel Legrand. Le juge m’a montré des photos, il m’a cité les photos que les enfants avaient dites. »
Myriam Badaoui : « je suis partie dans des délires …. des délires monstrueux … du n’importe quoi en fin de compte. »
Badaoui : « Je suis partie dans des délires monstrueux »
Myriam Badaoui : « je suis un peu surprise au bout de 10 ans de repasser auprès de la cour. »
Myriam Badaoui : « aujourd’hui, j’ai pu me reconstruire mais il n’y a pas un jour où je n’y pense pas. »
Badaoui : « Aujourd’hui je suis quelqu’un de différente, le mensonge fait plus partie de ma vie. » Elle pleure à la barre
Badaoui : « Monsieur Legrand je ne le connais ni d’Eve ni d’Adam »
Myriam Badaoui : « ce jeune homme je ne le connais ni d’Eve ni d’Adam, on l’a retiré de son enfance à cause de mes mensonges. »
Badaoui : « Ce jeune homme (Legrand) n’a rien demandé à personne, je lui ai brisé sa vie. »
Myriam Badaoui : « mentir par amour, par orgueil. Aujourd’hui, je suis différente. Le mensonge ne fait plus partie de ma vie. »
Badaoui : « Le mensonge se construit quand on est devant un juge. »
Badaoui : « Si j’aurais été saine d’esprit avec un avocat plus compétent, j’aurais peut-être dit moins d’âneries. »
Myriam Badaoui : « si j’aurais été saine d’esprit avec un avocat plus compétent j’aurais peut-être dit moins d’âneries. »
Sur la lettre envoyée par Legrand à France 3 où il invente le meurtre dune fillette : « monsieur Burgaud m’avait lu le contenu de la lettre »
« Mr Legrand fils a été très étonné (quand elle a confirmé). Il a dû se dire comment se fait-il qu’elle sait vu que c’était un piège »
Le juge Burgaud a reconnu lors de son audition vendredi qu’il n’aurait pas dû lire le contenu de la lettre de Legrand à Badaoui
Badaoui : « Aujourd’hui, j’ai mûri dans ma tête, j’ai grandi surtout et j’essaie d’avoir une place sereine dans la société. »
Myriam Badaoui : « je suis pas bien dans ma peau. J’ai mûri dans ma tête et j’essaie d’avoir une place sereine dans la société. »
Myriam Badaoui : « cette affaire a été dramatique. Même par rapport à mes enfants, je ne peux plus mentir. »
A la barre, Myriam Badaoui sanglote. Seul son fils Jonathan assiste à son témoignage.
Myriam Badaoui : « au début tout allait bien et après ça s’est beaucoup dégradé, il y avait beaucoup de violences, de coups. »
Badaoui : « Cette affaire a été dramatique, j’ai brisé beaucoup de choses et par amour pour mes enfants, je ne veux plus mentir »
Myriam Badaoui : « donc j’ai fait placer Chérif dans une famille d’accueil. Puis les autres enfants. Il fallait que ça se termine »
– Président : quel a été l’élément déclencheur ?
– Myriam Badaoui : j’avais très très peur de mon mari.
– Le président : Comment ont commencé les viols ?
– Badaoui : J’avais très très peur de mon ex-mari (Delay) »
Myriam Badaoui : « monsieur Delay [son ex-mari] c’est comme s’il arrivait à commander ma tête. C’était plus que de l’emprise ».
Myriam Badaoui : « mais avec Monsieur Delay, on ne pouvait rien dire. J’avais pas mon mot à dire, c’était des coups sans cesse. »
« C’était des coups sans cesse », « j’vous jure », « je ne sais pas comment dire ». Badaoui, en pleurs, semble retrouver ses inflexions d’autrefois
Myriam Badaoui (en pleurs) : « je suis vraiment pas bien parce qu’il y a la honte. Mais je suis quelqu’un d’autre aujourd’hui. »
– Président : Chérif nous a dit : « j’ai fait l’amour avec ma mère ».
– Myriam Badaoui : je ne me souviens pas de cette scène.
Jonathan est entré dans la salle depuis quelques minutes et écoute sa mère. De dos, on s’aperçoit qu’elle a beaucoup maigri.
– Le président : Thierry Delay nous a dit hier que c’était à cause de l’alcool.
– Myriam Badaoui : non, moi je ne buvais pas.
Le président reprend une à une les accusations de Badaoui (le réseau pédophile,les viols par un berger allemand…) « C’est des mensonges »
Le président à Myriam Badaoui : « vous dites en mots crus « il m’enculait pendant que son fils tenait le magasin » »
Le président : « devant le juge vous avez l’air d’être ulcérée par le fait que Daniel Legrand conteste les faits. »
Myriam Badaoui (d’une toute petite voix) : « c’étaient des mensonges, monsieur le président »
Président : « vous avez mis en cause d’autres personnes. Avez-vous menti ou dit la vérité ? » Myriam Badaoui : « j’ai menti. »
Badaoui sur Burgaud : « pour la 1ere fois de ma vie,j’ai vu un homme qui m’écoutait, pour qui j’avais beaucoup d’importance, j’avais confiance en lui »
Badaoui : « les enfants avaient accusé et j’ai été au-delà de mon imagination. Aujourd’hui j’en ai honte, je peux pas effacer le passé. »
Myriam Badaoui poursuit, toujours en larmes : « c’est très difficile pour moi car des vies ont été détruites »
Badaoui : « Mais je suis pas toute seule à avoir menti, mr Burgaud a pas aidé non plus. »
– Le président : aujourd’hui vous dites que votre mari, David Delplanque, Aurélie Grenon et vous ont participé.
– M. Badaoui : oui
Le président : « il y avait d’autres personnes ? » Myriam Badaoui : « non »
Myriam Badaoui : « aujourd’hui, je suis capable de parler. Dans le bureau de monsieur Burgaud c’était pas ça. »
Myriam Badaoui : pour la 1ere fois de ma vie j’avais un homme devant moi qui m’écoutait et pour qui j’avais beaucoup d’importance
Myriam Badaoui : « quand je voulais revenir sur mes déclarations, il me disait que j’étais menteuse… »
Myriam Badaoui : « … que je partirais pour 20 ans et que je ne reverrais plus mes enfants. »
Myriam Badaoui : « les enfants accusaient et moi j’ai été au-delà de mon imagination et aujourd’hui je vous assure j’en ai honte »
Myriam Badaoui : « mais j’ai pas été toute seule a avoir menti. Il faut être honnête que monsieur Burgaud m’a pas aidée non plus »
Myriam Badaoui : « quant j’étais plus moi-même. Je me disais que le juge était content et j’avais de l’importance, j’existais. »
Myriam Badaoui : « après quand il y a eu un autre juge, je me suis sentie abandonnée. »
Badaoui : « j’aurais pas fait la même chose aujourd’hui car je suis sainte d’esprit (sic) »
Badaou i: « quand j’ai été devant la cour et que j’ai vu tous ces gens défiler, j’en pouvais plus. »
Myriam Badaoui : « quand j’ai été devant la cour, pour la 1ere fois, j’ai vu tout ces gens défiler et je pouvais plus. »
Badaoui : « je ne pouvais plus continuer comme ça, c’était pas possible. »
Myriam Badaoui : « monsieur Burgaud n’était pas toujours content de ce que je disais. »
Myriam Badaoui : « quand j’allais dans son sens, ça allait mais sinon, il criait, il frappait [sur la table]. »
Myriam Badaoui : « monsieur Burgaud m’a dit qu’il avait fait sortir Aurélie Grenon parce qu’elle avait parlé. »
Myriam Badaoui : « j’ai monté des trucs et j’ai pas pensé à ces gens. Aujourd’hui j’ai plus envie de mentir. J’ai PLUS EN-VIE. »
Myriam Badaoui, voix cassée, répète : « J’ai plus envie de mentir, j’ai plus envie, j’ai plus envie »
Badaoui n’a visiblement pas envie de se replonger dans l’affaire et rechigne à répondre aux questions précises du président Dary
Le président s’agace : « Si la cour d’assises n’essaie pas de comprendre les choses, ça ne sert à rien de la réunir! »
Le président s’énerve un peu : « une chose est de dire n’importe quoi mais une autre est que ça ait l’air d’être d’aplomb. »
– Le président : c’est qui Dany Legrand ?
– Myriam Badaoui : je ne sais pas
– Mais d’où il sort dans votre bouche ?
– J’en sais rien
Le président à Myriam Badaoui : « Daniel Legrand c’est vous qui en parlez la 1ere et on ne comprend pas d’où ça sort. »
– Myriam Badaoui : « je ne sais plus … »
– Le président : « mais vous comprenez Madame que c’est au cœur de notre dossier. »
Myriam Badaoui (en larmes) : « je m’excuse auprès de Daniel Legrand. Je m’excuse auprès de tout le monde … »
Myriam Badaoui : « j’ai beaucoup menti. Je m’excuse auprès de mes enfants. Mais je ne peux plus mentir pour faire plaisir. »
Myriam Badaoui : « lorsque je disais la vérité, le juge n’était pas content. Il tapait du poing sur le bureau. »
Myriam Badaoui : « il m’a parlé de Daniel Legrand en me montrant des photos. Il m’a dit qu’il avait eu un souci en Belgique. »
Sur les prétendues virées pédophiles Belgique : « j’y suis jamais allée », dit Badaoui
Le président : « pourquoi vous dites tout ça madame !? » (à l’époque). Badaoui hausse les épaules.
– Président : quand vous dites que Daniel Legrand est surnommé Dada, d’où ça sort ?
– Myriam Badaoui : j’ai du l’entendre…
Badaoui a du mal à se souvenir : « je sais pas, c’est confus, c’est loin.
Myriam Badaoui se tient les bras croisés à la barre. Le visage amaigri, les joues tombantes. Le visage encadré par un foulard.
Le président Dary insiste : « Nous on est là et il faut qu’on prenne une décision à la fin des débats ! »
Lettres de M Badaoui au juge : « je vais vous donner celui qui travaille avec mon mari et Daniel Legrand. Lui, c’est la pourriture »
Badaoui : »La vérité c’est que j’ai menti. Je vous dis que Daniel Legrand n’a rien à voir dans tout ça ! »
– Président : si la vérité c’est que Daniel Legrand est le chef du réseau, il faut le dire.
– Myriam Badaoui : il n’a rien fait.
Le président tente de savoir comment Badaoui en est venu à citer un « dany legrand », juste après que Dimitri ait parlé à sa tata de ce nom.
– Le président : vous êtes dans le bureau du juge, devant un jeune homme de 20 ans, vous l’accusez.
– Myriam Badaoui : j’ai menti.
Le président : « quand vous dites tout ça, A. Grenon et D. Delplanque écoutent. Il aurait été préférable qu’ils attendent dehors »
« Je sais plus, j’ai dû entendre, j’en sais rien. » Badaoui n’a que cette réponse à toutes les questions : « J’ai menti »
Badaoui sur les cassettes porno cachées sous les paquets de chips dans le camion de la « boulangère »: »Mais j’ai menti ! »
Le président fait acter : ‘lorsque je disais la vérité, le juge n’était pas content. Il tapait du poing sur la table » 1/2
« et il m’a parlé de Daniel Legrand en me montrant des photos, il a dit qu’il avait eu un problème en Belgique » 2/2
Suite des propos de Badaoui actés : « je ne me souviens plus pourquoi, peut-être des vols. »
Badaoui : « Et c’est pareil pour monsieur Marécaux. Quand je choisissais un nom qui ne lui convenait pas il me parlait d’autres personnes. »
Badaoui : « Daniel Legrand, je m’excuse auprès de lui, j’étais pas nette dans ma tête »
La litanie du jour de Badaoui : « J’ai beaucoup menti, je ne peux plus mentir aujourd’hui pour faire plaisir, je ne peux plus. »
Sur le volet Belgique
– Badaoui : « j’en sais rien »
– Le président : « Vous vous rendez compte madame de tous les détails que vous donniez ! »
Une photo de Daniel Legrand père est présentée à Badaoui. Elle se met à pleurer. « Ce monsieur n’a strictement rien fait ni son fils ! »
Comme souvent, Me Vigier a pris place à côté de Daniel Legrand dans le box. Mais pas pour le soutenir parce qu’il s’endort
Cette fois-ci, l’accusé écoute attentivement celle qui l’a accusé pendant des années et qui se rétracte de nouveau aujourd’hui
Le président met Badaoui face à ses incohérences dans ces accusations à l’époque contre Daniel Legrand (fils).
Le président : « comment vous faites ces déclarations, vous êtes dans le bureau d’un juge, avec un avocat, la liberté des gens est en jeu! »
Le président, toujours : « Comment vous pouvez être aussi désinvolte ? » Pas de réponse de Badaoui, de plus en plus mutique.
Le président : comment vous faites ces déclarations ? La liberté des gens est en jeu. Comment vous pouvez être aussi désinvolte ?
Myriam Badaoui ne répond plus aux questions du président.
– « C’est quoi ces déclarations ? » « Pourquoi n’avez vous pas arrêté ? »
Dans la salle Jonathan Delay ne regarde même plus sa mère. Il lit des documents pendant qu’elle répond aux questions du président
Daniel Legrand lui est très attentif à ce que dit son ancienne accusatrice. Ses paroles à l’époque lui ont valu 30 mois de prison.
Le président fait acter ces propos de Badaoui : « Je ne reconnais pas Daniel Legrand il a été mis dans le dossier. Au début je voulais parler. » 1/3
« Le juge m’a montré des photos. Il m’a cité sur les photos les gens dont les enfants avaient parlé. » 2/3
« Ce jeune homme (Legrand) je ne le connais ni d’Eve ni d’Adam. » 3/3
Tout comme Delay la veille, Badaoui affirme qu’il n’y avait pas d’autres enfants victimes que les siens
Assesseure : parmi les victimes, il y a eu d’autres enfants que les vôtres ? Myriam Badaoui : non
En 2004, Badoui a été condamnée à 15 ans de prison pour viols sur ses 4 enfants et 3 autres enfants.
Comme Thierry Delay hier, Myriam Badaoui affirme qu’il y avait 4 agresseurs et uniquement leurs enfants victimes. Personne d’autre
Badaoui : « Quand on a reçu la convocation au commissariat, c’était fini, je savais que je rentrerai pas chez moi. »
Myriam Badaoui : « quand on a reçu la convocation du commissariat, je savais que je ne rentrerai pas chez moi. »
Badaoui dit avoir demandé aux services sociaux d’arrêter les visites des enfants (placés) les we.
– Badaoui : « Mais on me les emmenait tout le temps. »
– Me Cormier : « Les viols continuaient le we ? »
– « Oui. »
Myriam Badaoui : « je pense que Monsieur Delay était très inquiet que les enfants parleraient. »
Myriam Badaoui : « je téléphonais aux assistantes familiales pour dire que je ne prendrai pas les enfants. Mais on me les emmenait. »
Myriam Badaoui : « j’ai pas filmé les enfants. »
Lord du procès de St-Omer, Myriam Badaoui disculpe tout le monde. Puis, trois jours après, elle revient sur ses rétractations.
Myriam Badaoui : « quand je suis repartie en détention, je me suis fait… j’ai vécu beaucoup de choses. » Elle pleure.
Myriam Badaoui : « Monsieur Burgaud m’a expliqué qu’un des enfants, je sais plus lequel, avait cité une scène de meurtre. »
Myriam Badaoui : « je voulais pas traiter les enfants de menteurs alors je suis partie dans n’importe quoi … »
Myriam Badaoui : « j’ai dit des choses qui étaient fausses. Alors le juge m’a lu la lettre » [d’aveux de Daniel Legrand]
Au cas où certains n’auraient pas compris, Badaoui le redit : « J’ai pas été en Belgique. »
Il était là pour son beau-père hier mais Chérif n’a pas du tout assisté à l’audition de sa mère Myriam Badaoui aujourd’hui.
Jonathan, lui, fait des allers-retours dans la salle. Quant à Dimitri, on ne l’a pas revu depuis la reprise du procès lundi
Le président fait de nouveau acter les propos de Badaoui sur le meurtre d’une fillette en Belgique (non lieu en 2007).
Lassée des questions de la partie civile, Badaoui lâche : « Je vais pas dire que ce jeune (Legrand) a fait quelque chose c’est faux »
Myriam Badaoui (au sujet de Daniel Legrand) : « je vais pas dire qu’il est coupable si je sais qu’il n’y était pas. »
Myriam Badaoui : « ça date de très longtemps et je ne peux pas revenir en arrière ni effacer rien du tout. »
Myriam Badaoui : « aujourd’hui, je suis juste venue demander pardon mais je sais pas comment l’exprimer. »
« Aujourd’hui j’ai pas envie de plaire. ça date de très longtemps et je peux pas revenir en arrière, ni effacer. Je veux juste demander pardon. »
– Me Reviron : « Et vos enfants, vous leur demandez pardon ? »
– « Bien sûr, plus », sanglote Badaoui
Le Monde selon Caroline Eliacheff – Outreau Un procès de trop
Le troisième procès d’Outreau qui a commencé à Rennes le 19 mai dernier était annoncé depuis 2013. Dans le box des accusés Dany Legrand, 33 ans, acquitté en appel en 2005. Comment peut-on le juger alors qu’il a été acquitté ?
Dany Legrand a eu la mauvaise idée de devenir majeur pendant la période des faits poursuivis. Décision a été prise de le juger comme majeur avec les autres inculpés pour les faits postérieurs à sa majorité. Le procès actuel concerne les même faits mais pendant la période où il était mineur. Ce procès aurait pu ne pas se tenir si le délai de prescription de 10 ans à compter d’octobre 2003 était passé sans rappel. C’était compter sans la requête de l’association « Innocence en danger » et du syndicat national des magistrats FO.
Le dernier procès datant de dix ans a été une énorme fiasco, non ?
En effet : d’un réseau pédophile tentaculaire de plus de 70 personnes qui a tenu la France en haleine, on a abouti à une affaire d’inceste mettant en cause 2 familles et 12 enfants. En appel, sans compter les dommages collatéraux, deux couples ont été condamnés et treize personnes – dont Dany Legrand – acquittées, indemnisées et même fêtées par les plus hautes instances comme ça ne s’était jamais vu. Ce sont ces victimes de l’instruction menée par le juge Burgaud que l’on retient alors qu’on a tendance à oublier les enfants. Victimes d’abord de leurs parents ils le sont aussi de l’ensemble des institutions chargées de leur protection à chaque étape de leur vie : avant qu’ils ne dénoncent verbalement la maltraitance que leur comportement laissait fortement présager, pendant l’instruction où ils ont été auditionnés de façon chaotique de trop nombreuses fois sans jamais être filmés ; pendant les procès où leurs accusations se sont retournés contre eux : le manque de professionnalisme des adultes, incapables de lever l’équivoque entre une parole de vérité et un discours portant sur l’exactitude des faits, a éclaté pendant le procès mais on a retenu que les enfants avaient menti, une des façons de mettre en cause le juge qui avait déclaré « les enfants ne mentent pas ». Après les procès, les parcours de vie que l’on connaît des enfants Delay paraissent tout aussi chaotiques. On n’est donc pas surpris que devenus adultes, ils s’expriment. Notamment Cherif Delay dans un livre publié en 2011 où il écrit : « l’affaire d’Outreau il ne fallait pas en faire un boomerang et s’étonner ensuite qu’elle revienne de manière brutale et imprévue ». Ou Jonathan Delay qui a dit à la barre : « c’est nous qui avons été déclarés coupables de notre propre vécu, traités de menteurs et de mythomanes ». Cela paraît les avoir traumatisé davantage que les viols qu’ils ont subi.
Et alors, comment se passe ce procès ?
À lire et écouter les comptes-rendus des audiences, on se demande si la maltraitance institutionnelle n’a pas repris son cours : pour Dany Legrand, les témoins, tels le juge Burgaud, le policier chargé de l’arrêter, l’assistante maternelle d’un des enfants Delay réactivent cruellement les carences de l’instruction ; pour les enfants Delay qui attendent de ce procès ce qu’il est incapable de leur donner : la restauration de la dignité de leur parole.
Mais que disent ceux qui ont voulu que ce procès se tienne ?
À ma connaissance, le syndicat des magistrats FO ne s’est pas exprimé sur ses motivations. La présidente d’Innocence en danger, Homeyra Sellier a relancé le processus, sans en avertir les enfants Delay qui n’en demandaient peut-être pas tant. Madame Sellier défend l’honnêteté de sa démarche en déclarant sans avoir l’air de se rendre compte que ses raccourcis abrupts la décrédibilisent: « si des enfants disent j’ai été violé par X, cette personne doit être jugée ».
C’est la même association qui a financé le film contestable de Serge Garde « Outreau l’autre vérité ». Les autres associations de protection de l’enfance, soucieuses de la prise en compte de la parole des enfants, se sont désolidarisées ne voyant que des inconvénients à la tenue de ce troisième procès.
Depuis quelques temps, on assiste notamment sur internet à une croisade morale au nom de la lutte contre la pédophilie et l’inceste érigés en fléau moral. Au mépris des enquêtes et décisions de justice, certains pensent qu’on a sauvé des pédocriminels qui ont violé et tué des enfants et n’ont de cesse de rouvrir le dossier coûte que coûte, vilipendant au passage les médias, la police et la justice. L’instruction contestée du juge Burgaud et les parts d’ombre qu’elle conserve laissent prospérer l’idée selon laquelle tout serait vrai. Ce n’est pas la retombée la moins grave du fiasco judiciaire. On ne peut reprocher aux enfants Delay d’aller vers ceux qui prétendent les écouter mieux qu’ils ne l’ont été mais on ne peut manquer de s’interroger sur qui sont ces justiciers, au nom de quels principes et en vertu de quels intérêts ils mènent leur combat.
Contrairement à ce que l’on entend parfois, un procès n’est pas fait pour avoir des vertus thérapeutiques. On peut néanmoins espérer qu’il n’ait pas d’effet pathogène. Dans le cas présent, il fallait y penser avant…
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