6/ Des troubles du comportement par Marie-Christine Gryson-Dejehansart

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Pour Damien, il s’avère qu’il présentait, comme tous 
les autres, d’importants troubles du comportement qui 
relevaient du syndrome postraumatique. Ils se sont amendés 
sans disparaître totalement au moment où je l’examine :
– troubles du sommeil, hurlements, cauchemars ;
– auto-agressivité : se tapait la tête sur le mur ;
– hétéro-agressivité : autoritarisme sans limites, cris, agressivité verbale et physique sur tout le monde ;
– instabilité psychomotrice, anxiété majeure ;

– conduites sexualisées : s’asseyait sur son assistante 
maternelle et se masturbait, s’enfonçait des objets dans le 
derrière, se frottait le sexe à des objets.
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Autres billets sur l’affaire d’Outreau
1/ Outreau – La vérité abusée
2/ Outreau, la vérité abusée. 12 enfants reconnus victimes
3/ Outreau : Les lettres de Kevin Delay au juge Burgaud
4/ 24 février 2011 – La parole de l’enfant après la mystification d’Outreau
5/ Outreau : la télédépendance de l’opinion – « télécratie 4 » – « procès- téléréalité »
7/ Saint-Omer – juin 2004 : Les enfants présumés victimes sont placés dans le box des accusés !
8/ Saint-Omer – Selon M. Monier, une telle configuration des lieux a eu un effet négatif sur le procès, personne n’étant à sa place
9/ Saint-Omer – Mercredi 2 juin 2004 – Le procès bascule le jour des rétractations provisoires 
de Myriam Badaoui
10/ La victime envahie par le souvenir traumatique ne marque aucune pause « pour réfléchir »
11/ le test du Rorschach
12/ Militantisme association
13/ Les points de défaillance au procès de Saint-Omer
14/ Florence Aubenas : le danger de la victime résiliente mêlée à toutes les causes
15/ Un éclairage sur les rétractations et les contaminations
16/ Outreau : presse & justice – Florence Aubenas : je consulte le dossier d’instruction
17/ À propos des aveux de l’un des accusés acquittés d’Outreau
18/ Il s’avère que c’est l’ingestion d’un médicament – l’amobarbital –, qui peut induire sous hypnose la construction des faux 
souvenirs, et non pas l’hypnose seule

°/ La mémoire traumatique par Muriel Salmona

Violences sexuelles et situations paradoxales de dépendance à l’agresseur liées à la mémoire traumatique, la dissociation et aux conduites dissociantes.

Les traumatismes liés à des violences sexuelles, particulièrement s’ils débutent pendant l’enfance, l’adolescence ou sur une personne en situation de vulnérabilité et/ou s’ils ont été commis par des adultes ayant autorité ou censés les protéger, créent du fait du stress extrême généré par la première agression, une mémoire traumatique* (avec circuit de peur conditionnée) responsable de conduites paradoxales de dépendance à l’agresseur, de conduites à risque et de mises en danger. Ces conduites paradoxales sont en fait des conduites dissociantes qui s’imposent de façon incompréhensible et incontrôlable à la victime pour échapper à une angoisse et une détresse intolérable et qui permettent de la soulager en créant un état dissociatif avec anesthésie affective et sensitive, dépersonnalisation et état de conscience altérée.

Il s’agit de mécanismes neuro-biologiques exceptionnels de sauvegarde qui se mettent en place lors de la première agression, le caractère transgressif, totalement imprévu, incongru, inconcevable, incompréhensible, terrorisant d’une agression sexuelle pour un enfant, un adolescent, une personne en situation de vulnérabilité venant de la part d’un adulte sensé être un exemple et le protéger génère une forte réponse émotionnelle (par l’intermédiaire du système limbique : ensemble de structures cérébrales la principale étant l’amygdale cérébrale) responsable d’un stress extrême avec sécrétion d’adrénaline et de cortisol à des doses qui deviennent rapidement toxiques pour le système cardio-vasculaire et le cerveau, représentant un risque vital pour l’organisme.

Pour y échapper le cerveau (comme lors d’un survoltage dans un circuit électrique) va faire disjoncter le circuit limbique responsable du stress et isoler l’amygdale cérébrale, ce qui va avoir pour effet d’éteindre la réponse émotionnelle, faire chuter les taux d’adrénaline et de cortisol et donc de supprimer le risque vital, mais aussi de déconnecter les fibres qui informent le cortex des émotions (le cortex ne pourra pas traiter l’évènement), entraînant une anesthésie affective et une dissociation (état de conscience altérée), de déconnecter les fibres qui permettent la transformation de la mémoire émotionnelle amygdalienne non consciente en mémoire consciente autobiographique, entraînant des troubles de la mémoire : amnésie partielle ou complète du traumatisme et mémoire traumatique : mémoire émotionnelle qui reste piégée, hypersensible, immuable l’intensité des affects restant intacte et qui peut « s’allumer » lors de situations, d’affects, de sensations sensorielles rappelant l’évènement traumatique, recréant alors la détresse, l’angoisse et la panique initiales.

Cette déconnection de l’amygdale se fait grâce à des drogues endogènes « dures » qui sont sécrétées par le cerveau : endorphines (avec effet morphine-like), antagonistes des récepteurs de la N-Méthyl- D-Aspartate (avec effet Kétamine-like), ce sont elles qui vont stopper le risque vital physique et psychique au prix d’un état dissociatif, d’une anesthésie affective et d’une mémoire traumatique cette dernière étant une véritable bombe à retardement susceptible de se « rallumer » au moindre lien fait consciemment ou inconsciemment avec l’évènement traumatique (en totalité ou en partie), générant alors le même état de détresse et de panique que lors du traumatisme.

Pour échapper à ce risque de rallumage et donc à ces crises d’angoisse et de panique intolérables le plus souvent totalement incompréhensibles et impossibles à calmer, il faudrait éviter toute nouvelle situation de violence ou toute situation susceptible de rappeler ou de faire lien avec le traumatisme, seule la mise hors de danger ou la mise en place de conduites d’évitement peuvent permettre d’échapper à cette réactivation.

Mais les conduites d’évitement sont vouées à l’échec si les violences continuent, si la victime

reste en contact avec son agresseur, la mémoire traumatique est continuellement réactivée, la

souffrance est intolérable, pour y échapper il ne reste plus comme solutions que disparaître

(suicide) ou la mise en place des mécanismes de sauvegarde par disjonction, cette disjonction dans un premier temps peut se faire spontanément, la victime face à son agresseur se dissocie et se retrouve dans un état d’anesthésie affective et d’altération de la conscience avec dépersonnalisation, sensation d’étrangeté, impression d’être spectateur de ce qui lui arrive, d’assister à un film ce qui la rend incapable de se défendre, de réagir et la met dans la situation d’être totalement sous emprise (état hypnoïde).

Mais ce système de disjonction étant sous la dépendance de drogues endogènes « dures », cela entraîne assez rapidement des phénomènes de tolérance, d’accoutumance et de dépendance : pour que la déconnexion se fasse il faut un niveau de stress de plus en plus élevé pour avoir des taux plus élevés de drogues endogènes. Cela crée alors une situation paradoxale où il y a une nécessité vitale de se mettre en danger pour pouvoir disjoncter en augmentant le niveau de stress quand la mémoire traumatique est allumée, par exemple quand il va falloir affronter son agresseur, l’anticipation de cette situation étant particulièrement intolérable. La façon de se mettre en danger peut se faire :

– soit par des conduites auto-agressives (auto-mutilations, tentatives de suicide, douleurs provoquées, conduites « masochistes »),

– soit par des prises de toxiques qui reproduisent ou provoquent l’état dissociatif (alcool, drogues, surdosage médicamenteux),

– soit par des conduites à risque avec mises en danger qui sont des conduites dissociantes qui s’imposent à elle, qui peuvent être de « céder », de « plonger dans le danger », de suivre son agresseur ou même de provoquer ou de proposer chez son agresseur des passages à l’acte par des conduites ou des propos, des attitudes « provocants », « séducteurs », passages à l’acte qu’elle redoute tellement que leur anticipation va créer un stress très important et permettre la disjonction et l’anesthésie affective qui permettra de vivre la situation redoutée dans un état « second » sans souffrance ni angoisse intolérable. Ces passages à l’acte, la victime ne les veut absolument pas, les craint plus que tout, et c’est pour cela qu’il est nécessaire qu’elle soit dans un état second pour y survivre.

La multiplication des situations traumatiques (violences qui continuent), la multiplications des situations de rallumage de la mémoire traumatique (rappel du traumatisme par des liens qui se font avec celui-ci, par un contact avec l’agresseur) entraînent un état de dissociation quasi continuel chez la victime avec dépersonnalisation, conscience altérée et anesthésie affective qui permet une emprise de l’agresseur sur la victime qui est de ce fait totalement vulnérable et dans l’incapacité de se défendre et peut même sembler « participer » aux violences par son état hypnoïde et par ses conduites dissociantes (« provocations », « propositions », »attitudes », paroles, qui sont des mises en danger) alors même que c’est la terreur qu’elle éprouve vis à vis de son agresseur et vis-à-vis des violences, dont elle ne veut surtout pas, qui l’ont mise dans cet état du fait d’un mécanisme psycho-neuro-biologique de sauvegarde nécessaire pour éviter un risque vital physique et psychique. Le seul moyen pour y échapper étant de ne plus être du tout en contact avec son agresseur (contact physique, téléphonique, par courrier), l’agresseur, par expérience, le sait, aussi ne lâche-t-il pas sa victime (harcèlement, contact répétés). Ce n’est que quand la victime se sentira protégée de son agresseur, mise à l’abri, qu’elle pourra sortir de cet état de dissociation, « se réveiller » et prendre alors conscience de la gravité des faits, et qu’elle sera confrontée à sa souffrance et pourra demander de l’aide et être traitée, mais si elle est mise de nouveau en danger les processus de dissociation pourront reprendre.

Bourg la Reine, le 09 février 2008,

Docteur Muriel Salmona
Psychiatre-psychothérapeute
Médecin-coordinateur de Victimologie
Responsable de l’Antenne 92 de l’Institut de Victimologie

* Cf. article sur la mémoire traumatique avec bibliographie (2007)
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Autres billets de Muriel Salmona
°°/ Dissociation, mémoire traumatique et violences sexuelles : des conséquences graves sur la santé à soigner
11 mars 2010 – Colloque « Viols et aggressions sexuelles : comprendre pour agir » Extrait intervention de Muriel Salmona
Elles crèvent d’être enfermées dans un no man’s land, de devoir se taire à cause de la honte et de la culpabilité
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Ce qui se passe dans notre cerveau quand on est confronté à une grande peur – par Vincent Corbo