23 août 2011 – C’est dans l’air – DSK : le retour ? – Emmanuelle Piet

23 août 2011

Suivant les recommandations du procureur de Manhattan, le juge Michael Obus a abandonné, ce mardi 23 août 2011, les poursuites pénales contre l’ex-patron du FMI. Sortie libre du tribunal, Dominique Strauss-Kahn a dit avoir « hâte de rentrer en France ».

C’est presque la fin d’une partie d’un feuilleton judiciaire qui, depuis 100 jours, a connu de multiples rebondissements. Cet après-midi, le juge de la Cour suprême, Michael Obus a annoncé, à l’issue d’une ultime audience pour l’ancien directeur général du FMI au pénal, la fin des poursuites à son encontre. Un épilogue qui fait suite à la recommandation du parquet de Manhattan d’abandonner toutes les charges, dont agression sexuelle et séquestration, qui pesaient sur Dominique Strauss-Kahn.

Dans un document de 25 pages adressé au juge, et rendu public ce lundi, le parquet justifie sa position principalement en raison des doutes qui pèsent sur le témoignage de la plaignante, Nafissatou Diallo. « Notre investigation a sévèrement mis à mal la crédibilité de la témoin », qui « n’a pas été sincère sur des points importants » et dont les mensonges sont « accablants », écrit-il dans ce rapport. De ce fait, le bureau du procureur dit n’être « plus convaincu de la culpabilité de Dominique Strauss-Kahn au-delà du doute raisonnable » et renonce à la tenue d’un procès pénal devant un jury populaire.

Cependant, la fin de cette procédure ne met pas un point final à l’affaire aux Etats-Unis, où la plainte déposée au civil, visant à obtenir des dommages et intérêts pour une agression qualifiée de « violente et sadique », elle, se poursuit.

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Invitée : Emmanuelle Piet

Médecin gynécologue et présidente du Collectif féministe contre le viol.

Ce organisme informe et soutient les personnes victimes de violences sexuelles, notamment à travers le numéro Vert Viols Femmes Informations : 0 800 05 95 95.

E.P. :

Pourquoi une expertise médicale ne prouve pas le viol ?

parce qu’il faudrait prouver la contrainte. Ce qui
est quand même assez rare.

Ce qui est quand même très intéressant c’est qu’au départ, Dominique Stauss-Khan nie le rapport et après il ne le nie plus. Donc là le mensonge n’intéresse plus personne donc c’est un mensonge à 2 bouts.

Prouver la contrainte, il y a quand même l’expertise médicale des choses, c’est l’état de choc dans lequel elle est. État de choc qui peut expliquer…

Modérateur :
Axel de Tarlé

elle a donné 3 versions de ce qu’elle a fait après le viol.

E.P. :

Quand on est choqué, après une agression sexuelle, on est en état de choc et en général on a des troubles de la mémoire importants et c’est ce qui énerve les policiers, c’est qu’elles ne sont pas fiables, ils nous disent c’est des mauvaises victimes, elles ne racontent pas la même chose.

Mais ça, ça fait partie du syndrome post-traumatique après une agression massive.

Elle ne sait pas si elle a fait le ménage, si elle y est restée 1 heure etc.

Et ça, moi ça me semble absolument habituel dans les histoires de traumatisme.

Pour moi, ça ne fait pas mensonge, ça fait… et bien elle ne se rappelle plus.

J’ai vu des femmes victimes de viol qui ne se rappelaient de rien du tout pendant 8 jours au point qu’on a cru qu’elles avaient pris des substances et que non, c’est simplement un mécanisme de défense. C’est ça le syndrome post-traumatique.

Le modérateur : Axel de Tarlé

Pour aller dans votre sens, la première personne qui a reçu Nafissatou Diallo dans une association a déclaré qu’elle était en état de choc.

…/…

Pierre Rancé :

Le procureur dans le rapport dit qu’en 7 minutes, il est probable que ce ne soit pas un rapport consenti.

…/…

Les 3 versions sont incohérentes.

E.P.

Si c’était un scénario parfaitement minuté, on pourrait se dire que ça a été préparé, mais là justement, elle ne sait pas. Parce que quand on a été choqué profondément après une agression, on ne sait pas. Moi, il me semble que ça ressemble vraiment habituellement à cet état de choc que vraiment, je suis assez sidérée.

…/…

Le modérateur : Axel de Tarlé

Cette affaire va encore dissuader les femmes d’aller porter plainte.

E.P.

De tout façon, on sait que c’est difficile, on sait que c’est compliqué, et c’est pas toutes qui pourront porter plainte parce que des preuves de viol médico-légales, il y en a assez peu, il y a des preuves de rapport sexuel, après ça il faut des témoins, il faut de l’intime conviction, il faut un bon avocat, ça coûte cher. Et quand on sait que pour les victimes l’aide juridictionnelle rapporte encore moins à un avocat que pour les coupables, il n’y a pas une inégalité pour les victimes.

« Le doute devrait parfois profiter à la victime » ???

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23 août 2011

Adrien Gaboulaud

Julie Muret, porte-parole de l’association Osez le féminisme, craint que le dénouement de l’affaire DSK n’étouffe la parole des victimes libérée par l’éclatement du scandale.

Pensez-vous que cette affaire va laisser des traces?

Oui. Nous avons constaté que la parole s’est libérée. Il y a eu beaucoup plus de témoignages de femmes victimes. On en a reçu Osez le féminisme, comme d’autres associations. J’espère que ça ne va pas retomber, que des victimes ne se diront pas qu’elles ne vont pas porter plainte, en raison de pressions de l’entourage, d’un tabou. Une brèche s’est ouverte et j’espère qu’elle ne va pas se refermer.

Ça pourrait donc être une mauvaise nouvelle pour les victimes de viols et de violences.

Complètement. Il y a 75.000 femmes qui sont violées par an, seulement 10% qui portent plainte, et 1 à 2% des auteurs sont condamnés. Mais nous continuerons à dénoncer les idées reçues qui inversent la responsabilité de l’auteur sur la victime.

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