Accompagnement et approches psychothératpeutiques du stress par Gérard Lopez

Dernière mise à jour : mercredi 1 décembre 1999

Stress, le mot connaît un succès croissant.

Mais dans les nomenclatures internationales, comme le CIM-10 par exemple, il figure comme Etat de stress post-traumatique (F43-1) et Réaction aiguë (F43-0). Ces troubles ont été abordés, ici, parmi d’autres, par M. Reynaud, comme troubles liés à des facteurs de stress pour le CIM-10 ou comme Trouble anxieux pour le DSM IV.

La pathologie psychotraumatique ne peut se limiter à un Etat de stress post-traumatique (ESPT), avec ou sans Trouble dissociatif (F44). Les Troubles de l’adaptation (F43-2) correspondent à la pathologie à laquelle les professionnels sont confrontés après « un changement existentiel important ou un événement stressant ». En revanche, le CIM-10 distingue une Modification de la Personnalité après une expérience de catastrophe (F62.0) qui ne succède pas obligatoirement à un ESPT, mais qui peut aussi être considéré comme une séquelle chronique et irréversible de ce trouble.

L’impact d’un événements traumatique s’accompagnent évidemment d’une réaction physiologique de stress, mais c’est surtout une pathologie événementielle faisant effraction dans le psychisme et ne pouvant être élaboré. La répétition des événements traumatiques modifie la symptomatologie, entraînant des « hémorragies narcissiques » de plus en plus irréversibles, sans rapport avec le modèle du stress dépassé.

Le traitement des troubles psychotraumatiques — la psychotraumatologie – est une sorte de spécialité en soi, bien différente de la  » Gestion du Stress « . L’International Society For Traumatic Stress Studies (ISTSS) la développe de façon rigoureuse.

Du point de vue thérapeutique, il faut se prémunir contre l’idée que les soins sont plus importants que le soutien social ou l’accompagnement judiciaire (Lopez et Sabouraud Seguin, 1998). Il faudrait, au contraire intégrer sa pratique dans un réseau de correspondants spécialisés dans l’accompagnement social et judiciaire. Tous les partenaires devraient apprendre à se connaître, à s’apprécier et à comprendre leur spécificité dans leur diversité et complémentarité : c’est l’objet de la victimologie, trop souvent confondue avec la psychotraumatologie. Le traitement d’une personne traumatisée psychique serait très difficile si la thérapie était « polluée », et elle le serait inévitablement, par toutes les embûches qui émaillent son difficile parcours.

On appelle survictimation ou victimation secondaire les conséquences des aléas qui aggravent l’état, en particulier psychologique, des traumatisés, lorsqu’ils sont confrontés à l’incompréhension de leurs proches, des autorités répressives, des instances professionnelles, sociales et autres. On ne peut entamer une psychothérapie qu’à l’issue, et uniquement à l’issue, de l’évaluation :

1) de l’impact traumatique sur le plan physique et psychologique ;

2) des conséquences sociales et familiales ;

3) des conséquences judiciaires.

Cette évaluation permet de mettre en place l’accompagnement social et judiciaire qui protège le cadre thérapeutique sécurisant.

Il convient d’utiliser des techniques validées par la communauté scientifique : l’ISTSS, pour l’essentiel. La reconnaissance de l’ESPT, dans les années 1980, aux Etats-Unis, a amené la réalisation de nombreuses études.

L’évolution spontanée de l’ESPT est de très mauvais pronostic, mais la recherche a permis le constat suivant :

1) l’évolution de l’ESPT est améliorée par une prise en charge psychologique ;

2) certaines approches sont plus efficaces que d’autres. Mais d’une façon générale, ces études sont encore assez difficilement exploitables en raison de :

  • absence d’entretien structuré standardisé validé
  • critères de sélection changeants selon les études
  • absence de groupe témoin ou de liste d’attente
  • techniques utilisées peu standardisées
  • confusion fréquente entre évaluateur et thérapeute
  • absence d’instruments consensuels pour mesurer les symptômes de l’ESPT
  • nombre insuffisant de participants
  • victimes trop ciblées (vétérans, viols)
  • suivi insuffisamment prolongé
  • non prise en compte des rechutes
  • association médicaments thérapies.

La plupart des recherches, d’origine américaine, concernent les techniques comportementales cognitives (TCC), la technique des mouvements oculaires rapides (EMDR) ou la pharmacologie. Quelques études ont cependant examiné les résultats obtenus avec les thérapies psychodynamiques. La plupart montrent une faible diminution des symptômes de l’ESPT (Lindy, 1987). Deux études particulières concernant une victime d’accident (Brom et Carlier, 1989) et un policier (Gersons et Carlier, 1994) montrent une meilleure efficacité.

Aucune étude n’a été réalisée avec des victimes présentant un lourd passé traumatique (traumatisme prolongé et/ou répétitif : maltraitance, tortures, violence d’Etat, emprise sectaire, etc.). Elles nécessitent des thérapies longues et difficiles : le pronostic est réservé.

Les traitements médicamenteux sont utiles, les antidépresseurs essentiellement.

Les psychothérapies d’inspiration psychanalytique sont l’approche habituellement proposée en France. Elle devrait permettre l’intégration de l’événement traumatique dans l’histoire du sujet. Il faut veiller à tenir compte de la demande du sujet de travailler sur l’événement traumatique même si, cadeau dans l’horreur, certains sujets entament un travail approfondi, dans un second temps.

Les thérapies comportementales et cognitives d’exposition, ont une efficacité évidente lorsque les conduites d’évitement, caractéristiques du ESPT, sont prédominantes.

L’hypnose, surtout lorsque la dissociation est le mécanisme de défense préférentiel, serait particulièrement efficace, malgré les résistances dont elle est toujours l’objet en France. Elle est contre-indiquée lorsqu’une procédure judiciaire est en cours en raison des risques de  » faux souvenirs « .

L’E.M.D.R serait très efficace dans les suites immédiates d’un traumatisme psychique, notamment lorsque dominent un syndrome intrusif.

Les thérapies familiales ont un intérêt évident lors des traumatismes familiaux pour tenter de restaurer ce qui pourrait l’être.

D’autres méthodes, validées par la communauté scientifique, ont leur intérêt pour peu que l’utilisateur sache les maîtriser et qu’il ait l’expérience du traitement des traumatismes psychiques.

En fait, il semble, quelle que soit la méthode utilisée, il est nécessaire de respecter certains grands principes auxquels seule la psychanalyse conventionnelle ne saurait s’astreindre (mais elle est une méthode d’exception, rarement utilisée en première intention dans cette indication). Avec toutes les nuances possibles, il convient de donner la parole au sujet, dans un climat d’empathie actif, afin de lui permettre d’ordonner ses souvenirs pour donner un sens au traumatisme et lever, sans se hâter, le dispositif de défense dans lequel la  » dissociation post-traumatique  » paraît déterminante.
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