Livre — Traumatisme psychique

DATE DE PARUTION : 17/10/07
EDITEUR : Elsevier Masson
ISBN : 978-2-294-07144-7
EAN : 9782294071447
PRÉSENTATION : Broché
NB. DE PAGES : 308 pages
DIMENSIONS : 14,0 cm × 22,0 cm × 1,5 cm
Traumatisme-psychique

 

Frappées par la violence de notre société, violence des catastrophes naturelles ou accidentelles, violence des guerres, terrorisme, agressions physiques et psychiques, viols, maltraitance, les victimes traumatisées cherchent un soulagement à leur souffrance et un soutien compétent à leur vécu de détresse et d’abandon. Traumatismes psychiques. Prise en charge psychologique permettra aux psychologues confrontés à ces patients de mieux comprendre cette pathologie du trauma et de connaître les techniques de soin et de suivi thérapeutique. Cet ouvrage présente : les tableaux cliniques, immédiats, post-immédiats et chroniques déterminés par le trauma ; les approches thérapeutiques appropriées aux victimes ; des exemples concrets d’interventions, d’actions ou de soutien psychologique. Dans ce livre, le lecteur trouvera des approches thérapeutiques originales et peu connues, comme l’intervention psychothérapeutique post-immédiate (IPPI), l’approche sérielle des victimes et l’accompagnement psychologique des familles endeuillées ; il sera également initié à des techniques thérapeutiques spécialisées, telles l’EMDR, la technique des trois dessins et la mallette de jeu portable. Cet ouvrage, résolument pratique, s’adresse à l’ensemble des psychologues confrontés aux traumatismes psychiques, ainsi qu’aux psychiatres et autres professionnels de santé mentale qui reçoivent de plus en plus de patients enfants et adultes traumatisés.

  • TABLEAUX CLINIQUES OBSERVES
    • Stress et trauma
    • Clinique de la réaction immédiate
    • Clinique de la période post-immédiate
    • Clinique du syndrome psychotraumatique chronique, Névrose traumatique, état de stress post-traumatique et autres séquelles
    • Clinique du trauma chez l’enfant et l’adolescent
    • Clinique et implications symboliques de la femme victime de viol
    • Les deuils post-traumatiques
  • APPROCHES ET METHODES THERAPEUTIQUES
    • Principe de la prise en charge psychologique des sujets traumatisés
    • Intervention psychologique immédiate
    • Soins médico-psychologiques ou simple soutien psychosocial, Distinction entre ces deux types d’intervention
    • Surveillance et débriefing en post-immédiat
    • Intervention psychothérapeutique en post-immédiate
    • Prise en charge des salariés confrontés à un événement potentiellement traumatique dans le cadre de leur travail
    • Suivi psychothérapeutique en différé-chronique
    • Les thérapies cognito-comportementales du trauma
    • EMDR et prise en charge du psychotraumatisme
    • Trauma et créativité : exemple de l’atelier d’écriture
    • Du jeu traumatique au jeu thérapeutique chez l’enfant traumatisé
    • Le dessin dans la thérapie de l’enfant traumatisé
    • Accompagnement psychologique durant le parcours judiciaire
  • PRESENTATION DE CAS CLINIQUES
    • Intervention immédiate auprès des familles et de témoins d’un accident mortel
    • Accueil en post-immédiat : Sonia, enfant survivant du tsunami
    • Suivi psychothérapeutique d’un gardien agressé
    • Débriefing à l’école après un accident traumatisant
    • Présentation d’un cas clinique d’ancien combattant traité par la thérapie EMDR
    • Suivi psychothérapeutique post-traumatique : histoire de Simon
    • Approche sérielle en victimologie familiale : une conversion nécessaire dans l’analyse des situations de maltraitance et dans le travail psychosocial
    • Deux missions d’accompagnement psychologique auprès de familles endeuillées
    • Le soutien psychologique durant le parcours judiciaire de la victime, deux exemples cliniques
    • Lucy : de l’utilisation de la boîte de jeu lors de l’enfant traumatisée par la guerre

9/ Vignette clinique – Virginia W. par Nayla Chidiac


Page 138
Virginia W. est une jeune femme de vingt-neuf ans adressée pour la première fois en 2003 pour scarifications, plusieurs tentatives de suicide (la première lorsqu’elle avait cinq ans) et un probable traumatisme.
Dès le premier atelier, elle demande à arrêter, prétextant qu’elle ne va pas pouvoir supporter d’être en groupe et que, de toute façon, elle n’atteindra jamais son trentième anniversaire, donc à quoi bon ! Elle part sans attendre de réponse. Nous avons juste le temps de lui demander son écrit ; surprise par cette demande, elle demande à quoi cela peut servir et s’en va en nous le laissant quand même, sans attendre de réponse. Elle reviendra de 2003 à 2007, mais son suivi aura toujours cette tonalité impulsive et discontinue.
Dans son anamnèse, on retrouve maintes hospitalisations avec une scolarité et des études universitaires réussies. « Il n’y a qu’au travail que j’ai le sentiment d’exister », dit-elle.
Le contact restera réservé, et malgré une méfiance et une difficulté à verbaliser, peu à peu Virginia W. reviendra demander la consigne.
Ses textes seront brefs, d’une propreté étonnante, les lettres ne se touchent jamais. Son registre thématique étant composé de « honte/saleté/trou noir », son registre sensoriel ne sera qu’olfactif, associé à la nausée.
Au début de cette thérapie, Virginia W. ne pouvait investir aucun lien et ne tolérait aucune règle. Paradoxalement, elle était extrêmement ponctuelle et d’une grande rigueur lorsqu’elle décidait de participer à l’atelier. Ce qui la maintenait était essentiellement la « surprise » créée par l’annonce de la consigne et le défi d’y répondre. Son côté bonne élève reprenait le dessus ? mais il fallait rester très prudent.
Les progrès furent longs et lents. Tout commença par l’interruption fréquente due à ses aller et retour, ensuite elle décida d’elle-même de laisser ses écrits et de ne prendre que les photocopies alors qu’auparavant elle faisait l’inverse. Tout devait venir d’elle et le fait de savoir qu’elle pouvait agir ainsi la rassurait. Mais dès qu’elle était confrontée à la moindre difficulté en atelier et/ou dans sa vie professionnelle, tout était remis en question. L’écriture/l’atelier sa vie : pendant quelques années, ce fut le cadre de l’atelier, régi par sa contenance et ses règles, qui fut le plus thérapeutique ; c’était un lien où elle pouvait penser en s’étayant sur l’écrit, dans un cadre contenant, résistant à ses propres fractures spatio-temporelles. Elle a toujours fait abstraction du groupe, restant courtoise, mais excessivement silencieuse, tournée essentiellement vers le thérapeute. Par ailleurs, ses menaces d’interrompre l’atelier et de mourir étaient au début murmurées, telle une provocation, au thérapeute en fin d’atelier.

Sur la thématique de son inceste, puisque c’est de cela dont il s’agissait pour Virginia W., très peu sera exprimé ; néanmoins quelque chose a pu être tissé entre l’avant et l’après « trou noir », ce qui pouvait permettre une localisation psychique du traumatisme afin de le laisser là, tel un cerclage, sans qu’il ne déborde sur l’avant ou l’après traumatisme. Aucun effet non plus sur les écrits qui restent sans rature, les lettres très droites, le nom, la date, la consigne étant appliquée, sans accès à l’imaginaire, restant dans le factuel.
Virginia W. se sentait décalée par rapport aux écrits des autres et semblait s’ennuyer. Il est vrai aussi que la lecture de ses textes était d’une grande monotonie, une monotonie rendant toute émergence pulsionnelle impossible.
C’est à force de formes littéraires différentes que Virginia W. s’est autorisée à continuer à venir, surmontant une difficulté, une épreuve où elle se sentait revalorisée car elle pouvait constater qu’elle y parvenait toujours et qu’un lien se tissait entre elle, le cadre et le thérapeute. Le temps, lui-même cadre contenant, a fait son travail. Un changement étonnant a pu advenir. À la consigne « arbre de vie arbre de mort ; forme : libre », Virginia W. n’a pas choisi sa forme de prédilection, le quatrain, mais a créé une nouvelle forme graphique, on pourrait dire proche des Calligrammes d’Apollinaire. La forme originale reste cependant chirurgicalement nette, et pour la première fois non seulement ses écrits se dessinent mais ses souffrances aussi : « Demain m’angoisse, deux mains me terrorisent », le tronc de l’arbre de mort est constitué du mot « inceste » en verticale, les branches étant ses « tranches de vies meurtries ».
Nous avons pu lui permettre au fil des séances une plus grande liberté pour exprimer ses souffrances tant qu’elle pouvait le faire sous forme de schémas (en précisant bien schéma, et non pas dessin). Peu à peu, un schéma accompagné de légendes devint rapidement paragraphe et texte.
La forme a changé, sa créativité et son imaginaire ont pu s’étayer au niveau du contenant – ce qui est déjà un premier résultat, même si le contenu reste froid, retenu, sans vie, sans personnage, uniquement des questionnements. Ce changement de style se retrouve dans sa vie ;
Virginia W. a pu passer des concours et progresser professionnellement.
Et s’il n’y a eu aucune menace ni passage à l’acte depuis 2007, néanmoins aucune amélioration du point de vue de sa vie relationnelle n’a pu encore être constatée.
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9/ Vignette clinique – Virginia W