Prostitution : Besoin d’aide pour un aidant

Je suis un accompagnant par internet d’une femme en situation de prostitution, son confident et son aidant. Nous nous connaissons depuis 4 ans, mais mon aide par internet a commencé il y a 8 mois. Elle vit à l’étranger ; la voir n’est pas facile. Je n’ai compris sa prostitution que depuis Février. Cette femme est d’abord une amie qui m’est très chère, et je la vois avec la même dignité et respect que les autres femmes.
Le propos de ce post est de m’apporter de l’aide, car maintenant, ses révélations sont pour moi une SOUFFRANCE.
Au début, lorsqu’elle a décidé de me parler de sa prostitution, j’ai été flatté de la confiance qu’elle me faisait. Elle m’a envoyé des mails de la rue ou elle attendait le client, on a tchaté du bordel durant ses pauses, du « bar spécial » où elle essayait d’aguicher le client… Ce qu’elle m’a raconté surtout c’était ses états d’âmes, son STRESS extrême avant de se prostituer. Elle était très heureuse d’avoir quelqu’un à qui tout dire. Pour moi, sa confiance, être avec elle, même dans cet « enfer » me touchait.
Bien sûr, j’aurais voulu qu’elle arrête la prostitution, mais elle ne voulait pas…
Je me suis alors documenté, j’ai lu et j’ai compris à quel point la prostitution est destructrice pour la femme, j’ai compris cet ENFER. Et mes lectures correspondaient si bien à ce qu’elle me révélait de sa vie : souriante mais toujours si triste à l’intérieur, pleurs durant des heures, honte, anxiété, idées suicidaires depuis des années, image de soi EXTRÊMEMENT négative, dissociation binaire, anesthésie affective, scénarios violents contre elle même… Elle était détruite, broyée, par sa prostitution, et bien sûr par son enfance si destructrice.

Le premier moment très dur pour moi a été lorsqu’elle a voulu se suicider après 15 jours de bordel cet hiver. Après cela, je paniquais quand je la savais au bordel.
Maintenant, j’avoue que je souffre quand elle me parle de sa prostitution, surtout que c’est souvent juste avant d’y aller… C’est une SOUFFRANCE que de l’imaginer, de la savoir se détruire, je « sature » comme accompagnant.
La semaine dernière, j’ai pris de la distance, car je pense qu’elle est trop détruite/formatée par la prostitution, qu’elle ne peut/ne veut plus changer. Tant de détails maintenant me font penser que si elle a voulu s’enfuir de « sa ville de souffrance », ce n’était pas pour changer de vie mais pour venir se prostituer en France, que c’est maintenant sa vie, et qu’elle n’a plus de sexualité du tout en dehors de la prostitution et qui n’en est pas une. Mais qu’elle ne cherche plus que cela : « se prostituer », même si, en son esprit conscient, c’est destructeur, c’est sa mort, sa souffrance, sa salissure…

Elle est toujours entre la peur, la souffrance et l’auto-destruction, c’est épuisant.

Pourtant, elle est et à été toujours très gentille avec moi, vraiment, j’en suis étonné. Plus d’une fois elle m’a donné de l’amour de l’énergie par ses mails gentils alors que j’étais abattu, ou face à face. Mais les lendemains de sa prostitution, j’ai ressenti une colère en elle, une haine pour tous les hommes, tout propos prenait une connotation sexuelle inattendue et insupportable pour elle. Je n’en peux plus, c’est trop de souffrance. Pour elle je suis son « étrange ami » ou son « Saint ».
Pourquoi étrange ? car un homme qui préfère le cœur/l’amitié au sexe est étrange. Un homme qui ne veut qu’une relation de pure amitié avec elle est étrange… (Elle m’a fait rire lorsqu’elle crut que j’avais des problèmes de prostate… car je n’ai été ni un client, ni un amant, ni son mac ).

Je continue à avoir des échanges de mails avec Elle. J’avais envie de lui dire de ne plus me parler du tout de sa prostitution mais non, je la laisse libre. Cette femme est mon amie et elle est vraiment agréable comme personne, généreuse sincèrement, mais je souffre, et je pleurs souvent sur elle.
Ma compagne que j’aime et à qui je suis fidèle ne me reconnait plus: Moi si joyeux et rieur je suis devenu sérieux, mélancolique. Chaque nuit, je pense à elle, non pas de sexe, mais à essayer de trouver les mots justes, de l’aider… Mais qu’est ce que ma souffrance en comparaison de la sienne ?
Voilà toutes vos suggestions sont les bienvenues.
PS : Par amitié pour moi, parfois elle cessa de se prostituer.  J’ai essayé de la persuader d’arrêter, en suivant les conseils des acteurs sociaux… i.e. en lui rappelant sa souffrance, ses maux et en lui présentant sa future vie heureuse sans prostitution.  Mais maintenant elle ne veut plus me confier sa détresse, sa tristesse, sa honte, ses pleurs…

21 réflexions au sujet de « Prostitution : Besoin d’aide pour un aidant »

  1. Oui je crois que c’est mon aide : « être à ses cotés ».
    Pendant un temps j’ai cru qu’elle me disait ses « passes » pour me faire souffrir, mais maintenant je suis convaincu du contraire. Je lui ai dit que cela me faisait un peu mal, elle m’a dit qu’elle ne m’en parlerait plus. Et au contraire, elle est extrêmement sensible à la souffrance des autres.
    En ce moment, je la vois souvent en chair et en os, et par la communication non verbale de nos échanges (petits gestes imperceptibles qui trahissent notre approbation ou au contraire notre désaccord) elle a compris mon hostilité à se qu’elle se prostitue, et ce sujet est redevenu tabou entre nous. Lorsqu’on va au café, qu’on se balade… on parle d’autre chose 98% du temps. C’est juste une amie, ce qui est vrai.

  2. Coucou Didier,
    Ne dîtes pas que vous ne pouvez rien faire pour votre amie. Didier vous êtes à ses cotés. Vous l’écoutez ce qui est une chose énorme croyez moi ! C’est vrai les blessures sont là et elle ne peut les recouvrirent, mais votre présence à ses cotés l’aide à avoir moins mal.
    Giboulée, j’aime votre blog, même si cela me rappelle de mauvais souvenirs d’enfance, l’église, le catéchisme et le confessionnal. Encore une autre histoire.

  3. La prostitution est une grande violence, une violence terrible, et c’est en plus un sujet tabou, ce qui enferme les personnes prostituées dans le silence, l’interdiction de parler de leur souffrance, et dans le déni.  » j’ai appris depuis longtemps que je ne dois rien dire… »
    En fait, elle m’en a parlé bien souvent, par de petites phrases glissées au milieu de conversation : « la vie m’a appris l’amour pour tous »… Je pense qu’elle m’en parle car elle a très peu de personne à qui elle peut crier sa souffrance.

    « tu ne peux rien pour moi, mon ami, je suis trop détruite, c’est trop tard pour moi… »

    « chaque matin, je prie pour ma mort prochaine ».
    C’est très dur pour moi son ami car je ne peux rien faire… VRAIMENT TRÈS DUR !

  4. Je publie la suggestion de Béatrice que je trouve judicieuse :
    J’ai lu votre poste sur votre amie, je comprends votre douleur, mais parfois vous savez c’est difficile de faire changer la vie des personnes que l’on apprécie. Ma suggestion personnelle, mon avis :
    restez près d’elle comme confident même si pour l’instant elle ne vous dit rien, elle voit peut être votre chagrin et elle ne veut pas vous faire souffrir. écoutez là comme vous faite car peu de personne le font et je suis sûre quelle a confiance en vous ! faite la rire ! mais surtout ne la laissez pas, vous êtes sa lumière vous comprenez ! bon courage

  5. Bon revenons au sujet : aide au aidant, c’est à dire à moi. Je vais mieux, car j’ai pris de la distance affective, et puis parfois c’est douloureux. En fait je dois dire que j’étais tombé amoureux d’elle il y a plusieurs années alors que j’ignorais tout de sa double vie, et avant de rencontrer ma compagne. Ce fut un amour passion platonique, puis par mail, amour qui me surpris et qui la toucha profondément. Je la croyais séparée de son mari, mais il était complice. Elle refusa mon amour mais nous restâmes bons amis. Il n’y eut jamais de sexe entre nous, mais un amour sincère (sans doute réciproque) « le moine et la femme prostituée » qui sont les meilleurs amis. Le fait d’avoir par la suite découvert sa prostitution ne changea rien pour moi. Je crois que c’est à cause de cet amour, de mes refus obstinés de «passe » avec elle, et de tous nos mails échangés depuis de années, qu’elle se confie à moi.
    Mais c’est aussi par ce que c’est une amie très chère que c’est parfois douloureux de l’entendre, de savoir ce qu’elle va faire ou qu’elle a fait, parce que je sais qu’elle hait ce qu’elle fait 95% du temps, par ce que je sais que ses clients ne sont pas tendres…
    Suis-je vraiment une aide pour elle ? Je sais que souvent elle est dans le déni, dans le mensonge, mais elle me l’a dit tellement souvent, que mon amitié lui était chère, que je l’ai sauvée d’un suicide… que j’ai du mal à croire à de la manipulation. Donc oui je la crois quand elle me dit que je l’aide et que mon amitié lui est précieuse.

  6. Merci Dominique
    Je suis d’accord avec toi, « whore and monk sleep together », cela s’applique si bien à mon amie qui est à la fois une catholique prude, et aussi une femme en quête d’homme à soigner. Mais toujours elle est d’une grande générosité, elle prie pour moi quand elle s’inquiète elle est vraiment d’une gentillesse incroyable. Pour moi non plus, je ne me considère pas comme le bon samaritain, mon passé ne fut pas un modèle de vertus… Aussi, je ne suis pas choqué par ses révélations là où bien de mes amis cathos serait horrifiés.
    Ce que tu dis est très juste : « mes anciens outils de survie », « je crois que c’était ma drogue de choix, une drogue dure qui m’empêchait d’aller voir à l’intérieur. » Ces phrases me paraissent très bien collées à la situation de mon amie.
    En ce moment je vois mon amie tous les jours, ma compagne étant avec moi. Hier et aujourd’hui, elle nous a offert encore un restaurant… (rien pu faire pour payer). Et puis au moment de partir, elle m’a dit qu’elle voulait aller se « prostituer » avec son langage codée, et « qu’elle était une femme à problèmes », que « c’était sa destinée ». Le lendemain elle me parla de sa prostitution comme si c’était un travail comme un autre. Je pense réellement qu’elle se prostitue de « sa propre initiative », comme quelque chose d’irrésistible, même si elle déteste cette vie, ce qu’elle fait. (plusieurs fois elle m’a dit qu’elle le faisait non pas pour l’argent mais « pour vivre »; ou encore « pour survivre » plusieurs fois elle m’a dit que son mari la considérait comme « folle », plusieurs fois je l’ai vue avec son irrésistible besoin de « short-time », tout en étant dans l’angoisse, mais y aller quand même. Ou elle me l’a dit par SMS avec toutes ses étapes, l’angoisse qui la paralysie puis elle y va. Pour retarder l’échéance elle y alla nu pieds, marchant extrêmement lentement comme un condamné… Je ne peux rien faire, la plupart du temps…Je viens de me rappeler qu’une autre fois encore, à cause de mes mails de la nuit, elle écourta le bordel, le quitta l’après-midi après une longue discution avec le taulier et elle me remercia le soir même, d’avoir été son « roc », m’engageant à le rester. Mais elle y revint 2 ou 3 jours plus tard. (« je sais pourquoi je suis faite » « oui je vais dans la maison du danger avec amour »). Elle a des conduites paradoxales qui s’imposent à elle, très bien expliquées par le Dr M. Salmona, si elle n’a eu qu’un traumatisme… Emmanuelle Cesari dit qu’en cas d’inceste sur des années, c’est différent… Je ne sais pas tout de la vie de mon amie… et je ne suis pas psy. Mais je donnerai vraiment beaucoup pour qu’elle s’en sorte, même sans aucune reconnaissance, sans rien pour moi, juste la savoir sauvée.

  7. @Didier,
    Je pense qu’il y a eu malentendu sur mes propos et je n’ai voulu heurter personne.
    Pour être claire, tu as sollicité l’opinion d’une personne qui soit sortie de la prostitution, donc je t’ai donné la mienne. Cela n’engage que moi, bien sûr.
    Ce que je voulais pointer, c’est que insidieusement,cette dichotomie entre la prostituée qu’il conviendrait de sauver et le bon samaritain qui serait du bon coté sont installés profondément en nous. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre.
    Autrement dit, pour moi, il n’y a pas de différence. Des stratégies différentes pour appréhender sa vie par rapport à chaque vécu. Il y a un haiku qui résume bien la situation, je trouve. C’est de Basho, désolé, c’est en anglais. J’ai peur de mal traduire donc : Whore and monk, we sleep under one roof together, moon in a field of clover
    Quand est-ce qu’on arrête de boire, de se couper, de se shooter etc…?
    Il m’a fallu du temps pour abandonner mes anciens outils de survie et en trouver d’autres.Et encore plus longtemps pour ne plus être dans la codépendance. Cela aussi, dans mon cas je crois que c’était ma drogue de choix,une drogue dure qui m’empêchait d’aller voir à l’intérieur. Encore une fois, cela n’engage que moi.

  8. Merci merci CREA’tif
    Oui c’est exactement ça.
    Citation: »la répétition et la pluralité des voix allant dans ce même sens sur ce forum, ont fait leur office : un jour, elle nous apprit non plus qu’il l’avait encore abusée, mais qu’elle était en train de partir. Elle est partie. » mais je suis seul, au contraire, les autres femmes en situation de prostitution se complaisent dans le déni, veulent paraitre joyeuses et s’encouragent de fait par leurs publications entre elles. Par exemple : « hahaha le tapin hier soir ?, Rep : hahaha, je t’adore ma chérie. »
    Citation: « Elle te l’envoie en effet, mais pose le, à côté de toi, examine le, ne le porte pas sur toi. Et renvoie lui peut-être tes impressions, tes ressentis sur ce que tu aperçois alors.
    Si tu nommes ce que tu reçois, elle aussi va peut-être pouvoir nommer et comprendre ce qu’elle encaisse. Et le poser à côté d’elle pour commencer à le regarder, au lieu de crouler dessous. »
    Bonne idée, je vais m’en inspirer.
    Les personnes prostituées souffrent de toujours devoir se taire, de ne pouvoir rien dire des souffrances, des violences, des humiliations qu’elles subissent… de devoir tout garder pour elles.
    Je vais avoir une grosse journée de travail aujourd’hui, je ne répondrai pas de bonne heure.
    Merci encore pour ton aide.

  9. Mais nous étions plusieurs, et nous n’étions pas en position si vulnérable que toi, puisque nous n’étions pas son ami.e.
    Toi, tu es probablement mis dans la souffrance parce que quand on est proche d’une personne, et qu’on sait qu’elle souffre, on souffre avec elle. C’est aussi cela l’amitié, facilement.
    Et en plus, tu es seul comme force qui fait contrepoids à son c… de mari proxénète. Alors dis toi que ce « lorsque je fus en sa présence physique ce printemps, elle diminua aussi énormément son activité prostitutionnelle », c’est déjà énorme, et lourd à porter tout seul. Tu as fait beaucoup, tu fais beaucoup…sois indulgent envers toi, indulgent envers elle, aussi. Elle te communique son vécu de ces violences et tu encaisses cela tout seul, c’est pas rien, mais apprends à « relativiser » : quand elle te le communique, ça lui permet de réduire son « stress énorme », d’être moins seule avec ça, d’avoir un regard autre que celui de son proxo sur ça, de se donner la possibilité d’un ailleurs pour peut-être arriver à arrêter un jour… mais tu sais, elle n’en meure pas, tu n’as pas à te sentir si impuissant face à ça. C’est un stress dont elle réchappe, c’est un stress certes énorme, mais pose son poids à côté de toi et regarde le, extérieur. Elle te l’envoie en effet, mais pose le, à côté de toi, examine le, ne le porte pas sur toi. Et renvoie lui peut-être tes impressions, tes ressentis sur ce que tu aperçois alors.
    Si tu nommes ce que tu reçois, elle aussi va peut-être pouvoir nommer et comprendre ce qu’elle encaisse. Et le poser à côté d’elle pour commencer à le regarder, au lieu de crouler dessous.
    J’espère.
    Ne te sens pas coupable parce qu’elle reste et continue de subir, ça peut être extrêmement lent pour qu’elle prenne les décisions qui la mettront hors de ça, et la présence de personnes qui sont témoins en ce sens dans sa vie, est pourtant, imperceptiblement, très importante.

  10. Certains commentaires me choquent un peu, à vrai dire.
    Protéger son couple versus la prostituée satanique qui veut transformer un pauvre homme en déversoir de son négatif ? Mouais. C’est vu de loin, tout cela.

    Depuis le début, Didier nous parle d’une amitié, d’une amitié avec une personne qui se détruit parce que le seul monde qu’elle a connu, c’est probablement celui-là.
    Et comme c’est une personne qui compte pour lui, une amie, ça lui fait mal lorsqu’elle se détruit.
    Vous, cela vous ferait quoi, si l’un.e de vos ami.e.s, demain, commençait à parler de se tuer, ou bien à se lacérer les poignets, ou toute autre auto-destruction ? Vous couperiez tout contact avec votre ami.e pour « préserver votre couple » de sa destructivité ? Vous supporteriez ?
    C’est valable pour le professionnel. Mais pour l’ami.e ? Non.

    Alors s’il vous plaît, partons de ce qu’exprime Didier : l’envie d’aider cette amie, et l’impossibilité actuelle de l’aider comme il le souhaiterait.
    L’impuissance où il est face à la lenteur d’un processus éventuel de mise en cause d’une emprise.
    L’impuissance où il est face au mac qui l’évince de possibilités de contacts (concrètement, il est en train d’isoler cette femme de son unique soutien extérieur, c’est à dire d’un danger pour lui de perdre son emprise destructrice sur elle et … sa source de thunes).

    Tu sais Didier, je ne vais pas paler de prostitution, parce que je n’ai pas eu affaire à cela.
    Mais je veux te dire que sur des forums internet d’entraide entre victimes d’inceste, j’ai vu : celle qui vivait encore chez son abuseur en étant jeune majeure, et continuait de le subir… tout en venant nous en parler sur le forum… tout en continuant à le subir et à trouver ça « normal »… tout en venant nous dire sur le forum sa honte et comment elle se sentait minable de venir nous parler alors qu’elle le subissait… elle venait nous verser, nous confier, en effet, « sa négativité ».
    Ca a duré un certain temps. On a appris qu’une plainte avait été portée lorsqu’elle était mineure…classée sans suite. Pourquoi ? Au fil du temps et des nouveaux récits des nouveaux abus qu’elle venait encore de subir, elle nous apprit que le type connaissait des magistrats localement… Cette plainte ainsi traitée avait rendu comme « normal » ce qu’elle subissait. Et au fil du temps, par l’énergie collective trouvée sur le forum, une autre nomination de ce qu’elle subissait a pris le pas : non, ce n’est pas normal, même si la justice a fait comme si c’était rien, pas grave, normal quoi, quand tu étais mineure, il existe un collectif de gens qui te répètent, au fil des mois, à chaque fois que tu viens leur raconter ces nouveaux abus, « non, ce n’est pas normal. Il t’as mis sous son emprise, un jour tu partiras et tu seras mieux loin de lui, ces abus te démolissent ».
    Peu à peu, la répétition et la pluralité des voix allant dans ce même sens sur ce forum, ont fait leur office : un jour, elle nous apprit non plus qu’il l’avait encore abusée, mais qu’elle était en train de partir. Elle est partie. Elle ne le subit plus. Elle va moins mal.
    [suite dans 2e message]

    1. Je réagis car quand je parle de protection ce n’est pas comme cela que je vois les choses. je fais référence à ce qui s’appelle l’identifaication projective. Il est possible au petit enfant (références Mélanie Klein et Bion) de mettre dans la mère les mauvaises parties de lui même (qu’il ne sait pas nommer d’ailleurs). Et le travail de la mère qui est la machine à penser les pensées (Bion) est de lui restituer cela avec des mots sous une autre forme.
      Je pense qu’on peut être cette mère-là, mais il ne faut pas se laisser submerger.
      Et s’en rendre compte permet aussi de reprendre de la distance, la bonne distance.
      Maintenant un de problèmes du net, c’est que l’action est fort difficile.

  11. Les femmes en situation de prostitution sont des femmes comme les autres, ce sont nos sœurs. Je les vois avec la même dignité et respect que mes amies catholiques. Elles se sont retrouvées en prostitution non pas de leur propre volonté, mais par la conjonction de nombreux facteurs et en particulier très souvent à cause des violences qu’elles ont subi avant, (violences sexuelles, violences psychologiques, carence affective…). Toute femme peut un jour se retrouver en situation de prostitution. Ce n’est qu’un passage de leur vie, mais qui laisse des traces, des blessures, un marquage profond tant les violences subies durant leurs années de chagrin sont importantes.
    Mais ce sont des femmes comme les autres !
    Ma complicité par internet l’encourage t-elle a continuer dans cette voie ?
    Je crois que je peux répondre NON sans hésiter, car par 3 fois, elle renonça à se prostituer à cause de mes mails. Une fois elle refusa un « habitué » par amitié pour moi, et 2 fois elle interrompit la prostitution en bordel car je lui suggérais de le faire, et pourtant, arrêter la prostitution en bordel alors qu’elle devait y « travailler », lui a coûté beaucoup de sous.
    Lorsque je fus en sa présence physique ce printemps, elle diminua aussi énormément son activité prostitutionnelle. Mais n’ayant pas été un client, son souteneur de mari lui interdit maintenant de m’approcher.

  12. Oui tu poses les bonnes questions et je dois etre en état de codépendance, car son amitié m’est précieuse, mais comme amie, pas comme personne prostituée.
    Non je n’ai pas choisi d’aider les personnes prostituées, on me l’avait proposé et j’avais refusé, j’étais même indifférent à cause de pleins d’à priori, cela me semblait pas une priorité du tout. En fait j’aide seulement une de mes meilleures amies à vivre (selon ses mots), et cette amie est en situation de prostitution. Et fait curieux, cette relation avec elle, de pure amitié, est bénéfique pour mon couple maintenant, même si je suis plus sérieux/triste qu’avant. Cela peut paraître bizarre, mais cette amie m’a réellement beaucoup apporté pour ma foi, mon engagement dans l’église, et pour mon couple, même si c’est très dur.
    Pourquoi c’est très dur : parce que la prostitution est vraiment une destruction de la personne, un broyage, une violence incroyable : 34ans la moyenne d’age du décès des personnes prostituées au lieu de 75ans (selon la très vaste étude de John J Potterat, 2003), 67% des personnes prostituées souffrent d’un État de Stress Post Traumatique, plus que les vétérans de la guerre du Vietnam (que 20%) et même symptômes que les survivantes des camps d’exterminations nazi ! Imagine que ta meilleure amie soit dans un camps d’extermination, ou soit en situation de prostitution et qu’elle n’est que le mail pour « s’évader » comme liberté, c’est à peu près une bonne description de sa situation.
    Est-ce que je ne fais que l’encourager à continuer dans cette voie ? Je me le suis demandé quand j’étais complice, mais comme maintenant elle connaît mon hostilité à qu’elle se prostitue. Plus d’une fois j’ai essayé de l’en dissuader, de bien des manières… En fait, elle quittera la prostitution lorsqu’elle le voudra vraiment. Il faut que cela soit son choix personnel, sa volonté. D’après ce que j’ai lu, cela peut être long, les personnes prostituées semblent ne jamais vouloir en sortir… une situation d’esclavage, voulue et subit, qui trouve ses racines dans les violences qu’elle a subit dans son enfance (mémoire traumatique d’événements extrêmement destructeurs de son enfance… mais ce n’est pas le sujet). Mais il faut qu’elle survive jusqu’à ce jour, s’il survient. Être son confident et ne pas encourager, c’est là toute la difficulté.

  13. Alors, moi, Didier, ma réponse va être d’un autre point de vue.Ne te vexe pas.
    Pourquoi as-tu choisi d’aider cette personne et crois-tu vraiment que tu l’aides ?
    Si je te pose cette question, c’est que je me suis mise de multiples fois dans ta situation jusqu’à ce que je comprenne que je souffrais de codépendance.
    Un peu comme vouloir à tout pris sauver un alcoolique de l’alcool etc…
    Le livre « Vaincre la Codépendance » de Mélody Beatty pourrait t’être utile si tu ne l’as pas lu.
    Qu’est-ce qui dans ton histoire familiale te porte à vouloir sauver des prostituées ?
    En fait, tu ne fais que l’aider à continuer sur cette voie.La relation que vous avez développée tous deux vous conforte dans vos rôles, elle, la prostituée qui ne peut pas s’en sortir toute seule et toi le sauveur qui va la ramener dans le droit chemin.
    Le jour ou elle sera prête psychologiquement à s’arrêter, elle le fera. Elle sait aussi ou trouver de l’aide.
    Le problème, c’est plutôt d’accepter de t’occuper de toi et de ton couple. Alors, tu pourras vraiment offrir un accompagnement spirituel aux autres.

  14. Je me suis retrouvé son confident par le plus grand hasard, par suite d’incroyables circonstances que je raconterai plus tard. Maintenant nous sommes l’un pour l’autre des amis proches. Elle m’a beaucoup apporté, d’un point de vue spirituel et pour mon chemin vers Dieu. Un lien étrange, religieux, de pure amitié nous unis.
    Par le plus grand des hasards, il y a 3ans une amie de l’église m’avait proposé d’aller apporter de l’aide aux personnes prostituée, j’avais refusé pensant qu’il y avait mieux à faire… Et c’est justement une personne prostituée qui a renouvelé ma foi et à qui je dois beaucoup 😉 et que j’aide maintenant. Dieu a de l’HUMOUR!!!
    Maintenant j’aide cette personne par mes mails essentiellement, son souteneur de mari ne supporte plus que je la vois. Selon ses mots je lui apporte beaucoup, je lui suis précieux. Je l’ai empêchée de se suicider cet hivers selon elle. La foi nous unis, elle et moi, et elle est revenue à l’église, et aux prières avec moi, pas encore aux sacrements.
    Hier elle m’a dit qu’elle allait « à l’action », et ce matin encore où nous avons tchaté, mais finalement je préfère qu’elle me le dise, je préfère sa confiance, et je l’aide par des gentillesses. Je n’ai pas souffert trop de le savoir. Mais la prostitution est d’une grande violence, elle vit dans le STRESS continuel, et moi aussi parfois je souffre, et je pleurs parfois. Dans le guide des acteurs sociaux du Nid il conseille aux accompagnants de se faire aider, je comprends pourquoi. J’ai été en colère qu’une seule fois, face à son immobilisme vis à vis de son souteneur de mari… Maintenant je comprends un peu plus sa relation d’emprise Mac/femme prostituée. Oui je devrais avoir un accompagnant spirituel, les prêtres sont débordés et il faudrait qu’ils connaissent ce milieu, si particulier. Ou peut-être encore mieux une femme qui est sortie de la prostitution qui saura m’aider à trouver les mots justes ou orienter mon aide.
    Merci Giboulée, peut-être peux tu m’aider comme accompagnant spirituel si tu es croyante ?
    Bonne journée à tous. Didier.

    1. Comme tu as donné ton adresse je vais te répondre un peu plus tard. Grosse journée pour moi aujourd’hui. Tu peux aller voir mes blogs (en fait il y en a 3) parce que je suis un peu contestaire. Le principa: giboulée.blogspot. et l’autre obsidiennes.blogspot .com
      A priori pas de problèmes.

  15. Bonjour,
    vous demandez quelque chose de fort difficile surtout sur un blog.
    La première chose c’est que cela influe sur votre couple donc sur votre vie de tous les jours. Pour moi l’important est de la protéger. Comme vous décrivez quelque chose qui est évocateur de dépression, je pense qu’il faut consulter votre médecin habituel, faire le point avec lui et éventuellement prendre des médicaments pour retrouver votre tonus.
    Maintenant vous dites être aidant sur internet. Alors je me suis demandée quelle était la demande initiale de cette personne. Car finalement à la fois elle vous met dans l’impuissance (elle ne sort pas de sa prostitution) et en même temps elle vous envahit en vous empêchant presque d’être vous, c’est-à-dire que votre identité est un peu atteinte.
    Je pense que vous avez été comme une sorte de déversoir pour elle, elle a pu mettre en vous beaucoup de mauvais, beaucoup de destruction, mais il faut impérativement vous protéger, car si elle vous détruit, elle s’en rendra compte et au niveau de la culpabilité et de la honte cela ajoutera encore une « couche » donc favorisera la prostitution.
    Vous dites qu’elle vous appelle son « saint ». Peut-être cela veut il dire que vous êtes croyant. Si c’est le cas, je pense qu’un accompagnement spirituel est indispensable, car d’une certaine manière vous êtes paralysé par elle. Cela peut vous mettre aussi en colère et il faut que cette colère sorte sans vous détruire.
    Voilà ce qui me vient ce matin, mais surtout protégez vous et protégez votre couple. Parfois il faut revenir à un contrat entre la personne accompagnée et son accompagnateur.
    Amicalement

  16. Me revoilà Didier et ne chercher pas !
    J’ai lu votre poste sur votre amie, je comprends votre douleur, mais parfois vous savez c’est difficile de faire changer la vie des personnes que l’on apprécie, mon avis à moi, restez près d’elle comme confident même si pour l’instant elle ne vous dit rien, elle voit peut-être votre chagrin et elle ne veut pas vous faire souffrir, écoutez là comme vous faites car peu de personne le font et je suis sûre qu’elle à confiance en vous ! faites la rire ! Mais surtout ne la laisser pas ! Vous êtes sa lumière vous comprenez ! Bon courage et à bientôt.

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