par Mélik N’guédar
Voilà un « psy » qui ne croit pas tant aux psychothérapies qui interprètent à grands coups de projecteurs qu’à celles qui conduisent, dans une semi-pénombre, à des « surprises de conscience », semblables aux visions des artistes. Chacun de nous pourrait ainsi devenir créateur de sa propre vie, grâce à un subtil jeu de masques.
Nouvelles Clés : Il y a mille angles différent, dirait-on, pour aborder l’art-thérapie et les rapports entre l’art et la thérapie.
Jean-Pierre Klein : Au départ, je suis psychiatre et psychothérapeute d’enfants : ça veut dire que je m’occupe aussi bien d’un enfant de quatre ans qui fait toujours pipi au lit que d’une toxicomane de dix-huit ans, ou d’une anorexie mentale ou… On se retrouve avec des cas forcément plus différents que chez les adultes. Le psychiatre d’enfants ne peut pas se reposer aussi facilement sur des grilles et des codifications constantes. La rencontre se déroulera autour d’une table, ou par terre, ou dans un théâtre de marionnettes, ou avec du papier et des crayons… il y a donc forcément, à la base, de l’expression artistique. Et puis d’un enfant à l’autre, des formes différentes s’imposent.
D’autre part, l’enfant ne va pas toujours pouvoir dire « je », se situer par rapport à son père et à sa mère, etc. Il est par contre naturel de travailler avec lui dans l’invention, à partir de dessins – c’est la moindre des choses – mais aussi à partir d’histoires, de terre, de masques, d’expression corporelle, etc. L’enfant vient avec ses parents, qui parlent de leur problème, et l’enfant comprend qu’il est dans un endroit où quelqu’un doit l’aider à se transformer. Mais plutôt que d’examiner directement les symptômes et de voir ce qu’ils signifient, comme on fait en thérapie classique, moi, je demande à cet enfant de produire en thérapie. De partir de lui-même et de créer quelque-chose. Et forcément, parce qu’il sait grosso modo où il se trouve, tout ce qu’il va faire sera imprégné de ses problèmes.
A partir de là, plusieurs possibilités. La première, c’est de prendre la peinture, la mélodie, l’improvisation théâtrale, l’écriture. . . et de les décrypter pour y trouver des significations sous-jacentes. Ça ramène au discours en « je ».
Avec des interprétations des œuvres parfois assez caricaturales, du type « le rouge signifie l’agressivité », « le vertical c’est le phallus », etc. Alors qu’en art-thérapie, nous préconisons d’accompagner la personne, d’une production à l’autre. Comme si elle parcourait tout un itinéraire symbolique et se transformait dans la production, sans trop voir d’abord en quoi cela renvoie à ses difficultés. Il n ‘y a pas forcément d’interprétation. L’art-thérapeute ne dira pas : « Voilà ce que ceci signifie de ton rapport à ta mère. » À l’institut dont je m’occupe, l’INECAT, il y a même interdiction totale que quiconque fasse sur quiconque une interprétation de dévoilement. L’art-thérapie ne se situe pas dans l’explication de l’origine des troubles.
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3 réflexions au sujet de « Jean-Pierre Klein – L’art-thérapie, se transformer par la création »
J’aime beaucoup cet article, il y a des phrases très vraies aussi : L’adaptation est importante, on aurait tendance à l’oublier, ce n’est pas toujours au patient de s’adapter, le psy ou autres, les médecins, doivent le faire, c’est le secret d’un bon suivi et surtout aucun jugements ne doit être émis.
L’Art-Thérapie c’est cela, il faut laisser l’enfant s’exprimer laisser sortir ce qu’il ressens sur le moment, et regarder son évolution.
Voici quelques phrases qui me parlent 🙂
« Le psychiatre d’enfants ne peut pas se reposer aussi facilement sur des grilles et des codifications constantes. »
« Et puis d’un enfant à l’autre, des formes différentes s’imposent. »
« L’art-thérapeute ne dira pas : « Voilà ce que ceci signifie de ton rapport à ta mère. » »
« et l’enfant comprend qu’il est dans un endroit où quelqu’un doit l’aider à se transformer. »
« A partir de là, plusieurs possibilités. La première, c’est de prendre la peinture, la mélodie, l’improvisation théâtrale, l’écriture… et de les décrypter pour y trouver des significations sous-jacentes. Ça ramène au discours en « je ». »
« l’enfant ne va pas toujours pouvoir dire « je », se situer par rapport à son père et à sa mère »
J’aime beaucoup les articles de cet homme ils vont au plus profond du sujet, il ne l’effleure pas.
Beatrice
Si vous reprenez le programme du colloque annuel de la Fédération française des Art-thérapeutes, c’est lui qui ouvre les conférences du 29 avril. Il est aussi président honoraire de Art-Thérapie Virtus, mais je n’ai pas été son élève.
http://www.ffat-federation.org/
Emmanuelle Cesari
10h-10h45 : Le théâtre de la réminiscence ou : Passer le souvenir par le corps des autres – Jean-Pierre KLEIN, directeur de INECAT, auteur dramatique, psychiatre ; « Toute véritable deuxième fois est la libération de la première » J. L. Moreno. Faire jouer son souvenir pour se le réapproprier en écriture de fiction qu’il inspire.
C’est une belle référence 🙂 j’aime bien comment il aborde ses sujets 🙂
Beatrice