« Reconnaître notre affection pour les robots » par Serge Tisseron

« Il est urgent de reconnaître notre affection pour les robots »
Serge Tisseron
RTBF La Première
Publié le jeudi 07 juin 2018 à 20h53
Les robots vont-ils bouleverser notre psychologie ? C’est ce que pense le psychiatre français Serge Tisseron, auteur du « Petit traité de cyberpsychologie », et invité de Soir Première. Pour le spécialiste, les évolutions technologiques qui se profilent vont changer notre psychologie et il est temps de penser à cette présence de plus en plus forte des robots dans notre quotidien.

« Ces machines que nous fabriquons vont orienter, voire diriger, un certain nombre de nos comportements »

précise Serge Tisseron. Des robots qui vont notamment modifier nos relations à l’autre.

« L’être humain a toujours éprouvé de l’affection pour ses objets. Mais cette affection n’a jamais eu une place reconnue dans notre culture, contrairement à la culture orientale. Avec la robotique, nous allons devoir reconnaître cette affection pour des objets perfectionnés, qui vont nous tenir compagnie comme c’est le cas avec les robots. Et il est urgent de reconnaître cette affection pour que nous puissions commencer à la gérer »

explique Serge Tisseron. Pour le psychiatre, les psychologues vont devoir adapter leur travail car l’éventail des relations possibles d’un humain avec d’autres êtres humains va être transposé aux relations homme-machine. Au point que les psychologues pourraient voir arriver dans leur cabinet une nouvelle catégorie de population : les « digisexuels ». Des personnes qui auront leur première expérience sexuelle avec un robot et qui préféreront une sexualité avec un objet.

« Dans le futur les gens auront des machines qui vont leur rendre des services et qui seront, en plus, belles à regarder. Des propriétaires de robots qui se demanderont : pourquoi ne pas franchir le pas et avoir des relations sexuelles avec eux ? »

ajoute Serge Tisseron. Le psychiatre pointe cependant un risque : celui de préférer les robots à la compagnie des humains.

Le deuil, un concept grignoté par la technologie

Avec l’apparition de l’intelligence artificielle et le développement des nouvelles technologies, la mort et le concept de deuil se trouvent transformés. Serge Tisseron pointe dans son livre le cas évoqué dans la série Black Mirror. Celui d’une femme qui achète un robot à l’effigie de son mari décédé, fabriqué par une entreprise qui s’est basée sur les informations laissées par le défunt sur Internet de son vivant.

« Depuis des années, le deuil est grignoté par la technologie. Aujourd’hui, il faut revisiter ce type de concept, qui pourrait devenir anachronique dans quelques temps »

explique le spécialiste français.
Des bouleversements qu’il faut absolument appréhender :

« Il faut comprendre que les technologies nous ont déjà transformées à notre insu. Il faut aujourd’hui rattraper notre retard et comprendre ces changements »

met en garde Serge Tisseron.

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Ce que tout le monde doit savoir sur la cyberpsychologie

Ce que tout le monde doit savoir sur la cyberpsychologie
24 septembre 2018
Youcef MAALLEMI – Alger
« Nous sommes encore bien loin de la reconnaissance de la cyberpsychologie », Dr Djalila Rahali
– Première cyberpsychologue en Algérie, depuis 1999. Psychothérapeute et cyberpsychothérapeute spécialisée en addictions à internet (aux réseaux sociaux, jeux en ligne, smartphones et hacking).
– Ex conseillère de ministres chargée de l’e-communication.
– Chercheur en comportements des cybers délinquants et cybercriminels.
– Membre du Laboratoire des Moyens d’Investigation et Techniques Thérapeutiques des Troubles du comportement à l’Université d’Oran.
– Auteure de plusieurs articles autour de l’addiction à internet, et du passage chez l’algérien de la citoyenneté à la « netoyenneté » par des processus psychologiques. Activiste dans les opérations de sensibilisation des parents d’élèves et des écoliers en milieu pédagogique.


(CIO Mag) – La psychologie est en train de se numériser en allant vers la numérisation des tests psychologiques ainsi que l’application des psychothérapies à travers internet. L’utilisation de la réalité virtuelle, ainsi que la réalité augmentée,  ne sont plus des manières de faire nouvelles. la réalité virtuelle est employée pour guérir quelques troubles et quelques pathologies telles que la phobie, la dépression, l’anxiété post-traumatique, etc. Ce passage de la psychologie classique à la psychologie digitale a un nom : la cyberpsychologie.

Cette dernière consiste à étudier l’impact des nouvelles technologies sur les comportements humains.

Selon le Dr Rahali « les nouvelles plateformes numériques, surtout connectées, ont valu l’émergence de nouveaux troubles psychologiques et psychopathologiques. Ce sont le FoMO (anxiété de rater quelque chose sur internet), le selfitis (addiction au selfies , la cyberchondrie, l’addiction à internet et aux réseaux sociaux, le jeu pathologique en ligne, etc.
Pour cette psychologue, « la cyberpsychologie gagne de plus en plus de terrain et touche actuellement même à la cybercriminologie. Tantôt elle est utilisée pour analyser les cyber-comportements des internautes en danger, surtout quand il s’agit de cyber-harcèlement, de cyber-escroquerie, de sextortion ou de cyber-pédophilie . Mais, dans d’autres cas, elle peut être utilisée dans le domaine juridique pour aider la jurisprudence à comprendre mieux la personnalité de l’attaquant et les mobiles et motivations derrière son acte criminel commis dans l’espace cyber ». En ce qui concerne l’Algérie, le Dr Rahali Djalila estime « que nous sommes encore bien loin de la reconnaissance de la cyberpsychologie comme spécialité à part entière ».

La cybercriminalité : ravage dans le milieu féminin

Pour information, le Dr Rahali a adopté cette discipline, il y a presque une vingtaine d’années, par des recherches scientifiques académiques. C’est son propre site web qu’elle a dédié aux consultations et conseils en ligne puis aux psychothérapies en ligne dans le cadre de la recherche scientifique. Sans s’arrêter là, mais à travers ses nombreuses activités et conférences nationales et internationales, elle présente cette spécialité. Elle met en exergue son importance au profit de la transformation numérique, des investigations sécuritaires pour avoir des résultats plus rapides. Il est même possible de prédire les actes cybercriminels avant leur survenance.
La veille cybersécuritaire sur les réseaux sociaux en se basant sur des éléments psychologiques sont, à son sens, importants . Elle estime que la cybercriminalité fait ravage dans le milieu féminin sur les réseaux sociaux et qu’elle est un réel danger pour certains jeunes qui se voient recrutés par des groupes cyberterroristes.

Dans ce contexte, le Dr Rahali parle dans ses conférences de cyberprofiling psychologique au profit de la société civile ainsi qu’au profit des cyber-agents. Cela n’exclut pas que l’addiction à internet est sous-estimée quand il s’agit de comportements cybercriminels commis par des enfants, adolescents ou jeunes adultes (hackers criminels).

Élue parmi les dix personnalités qui contribuent au développement des TIC en Algérie, le Dr Rahali espère aller encore plus loin dans ses recherches au profit de l’éducation au numérique. Elle intervient dans les établissements scolaires à partir de l’école préparatoire ainsi que pour la sensibilisation de la société civile. Elle participe à la formation pour la chaire universitaire et aussi l’aide spécialisée pour la lutte contre la cybercriminalité et le cyberterrorisme.

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