Victimisation : Ces conduites dissociantes sont des conduites à risques et de mises en danger

trauma-resilience-2012Mémoire traumatique et conduites dissociantes
 
Dr Muriel Salmona, 

in Traumas et résilience, Dunod, 2012

Ces conduites dissociantes sont des conduites à risques et de mises en danger : sur la route ou dans le sport, mises en danger sexuelles, jeux dangereux, délinquance, consommation de produits stupéfiants, violences contre soi-même comme des auto-mutilations, violences contre autrui (l’autre servant alors de fusible grâce à l’imposition d’un rapport de force pour disjoncter). Rapidement ces conduites dissociantes deviennent de véritables addictions. Elles sont alors utilisée non seulement pour échapper à la mémoire traumatique mais aussi pour prévenir tout risque qu’elle survienne. Ces conduites dissociantes provoquent la disjonction et l’anesthésie émotionnelle recherchées, mais elles rechargent aussi la mémoire traumatique, la rendant toujours plus explosive et rendant les conduites dissociantes toujours plus nécessaires, créant une véritable addiction aux mises en danger et/ou à la violence. Ces conduites dissociantes sont incompréhensibles et paraissent paradoxales à tout le monde (à la victime, à ses proches, aux professionnels), elles sont à l’origine chez la victime de sentiments de culpabilité et d’une grande solitude. Elles représentent un risque très importants pour sa santé (accidents, maladies secondaires aux conduites addictives, maladies liées au stress), elles rendent vulnérables à d’autres violences (risque de re-victimisation) et peuvent être à l’origine de nouvelles violences.

Ces mécanismes psychotraumatiques permettent de comprendre les conduites paradoxales des victimes et le cycle infernal des violences. Ils sont malheureusement méconnus, et les médecins qui ne sont pas formés à la psychotraumatologie ne vont pas relier les symptômes et les troubles des conduites que présentent les victimes aux violences qu’elles ont subies et donc ne pas les traiter spécifiquement. A la place ils peuvent utiliser des traitements qui sont en fait dissociants. Ces traitements (comme l’enfermement, la contention, les camisoles chimiques, l’isolement, les chocs électriques, voire la lobotomie qui est encore utilisée dans certains pays….) sont « efficaces » pour faire disparaître les symptômes les plus gênants et anesthésier les douleurs et les détresses les plus graves, mais ils aggravent la mémoire traumatique des patients.  La violence a la triste capacité de traiter de façon transitoire mais très efficace les conséquences psychotraumatiques, tout en les aggravant. Elle est sa propre cause et son propre antidote. Mais à quel prix ! Si la violence est paralysante et dissociante pour la victime, elle est pour l’auteur un outil de domination et une drogue anesthésiante. La violence est un formidable outil pour soumettre et pour instrumentaliser des victimes dans le but d’obtenir une anesthésie émotionnelle de l’agresseur. Elle devient ainsi une usine à fabriquer de nouvelles victimes et de nouvelles violences (Organisation Mondiale de la Santé, 2010).
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Trop de victimes minorent leur traumatisme et refusent de consulter, pensant avoir « échappé au pire »

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Selon les professeurs Benoit et Askenazy, trop de victimes minorent leur traumatisme et refusent de consulter, pensant avoir « échappé au pire ».
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Publié le 24/09/2016

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« Beaucoup pensaient que le choc passerait tout seul, avec le temps, note l’un des psychologues qui les reçoivent, Serge Ricaud. Ils sont restés dans une phase d’attente, et on les trouve en pleurs. Ils ont encore du mal à verbaliser ce qui leur est arrivé. Ils nous parlent des cris, d’images de membres découpés, de corps projetés… Si, en plus, ces gens ont vécu des accidents, des pertes de proches au cours de leur enfance, le traumatisme fait écho à ce passé. »

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Nous essayons toujours de détecter, dépister, aider ceux qui ne vont pas bien. Pas facile : beaucoup encore ne consultent pas. Etre anxieux, hanté par des images, mal dormir, vivre replié sur soi les premiers jours, c’est compréhensible. Mais chez certains ces symptômes persistent. Il faut s’en inquiéter ; or trop d’entre eux ne le font pas. Ils se disent : J’ai échappé au pire. Certains peuvent éprouver de la culpabilité, de la honte à consulter, pensant : Il y a eu plus grave que moi. Or, je le dis avec force, il ne faut pas banaliser. »

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