France Culture – Écouter « Ma vie après le 13-Novembre »

Ma vie après le 13-Novembre

13.05.2016

Comment essayer de reprendre une vie normale quand on a été touché par les attentats de novembre 2015. Est-ce seulement possible ?

C’était une douce soirée de novembre, une de celles où l’on s’attarde aux terrasses, où l’automne semble ne pas vouloir laisser la rigueur de l’hiver s’installer, un vendredi soir ordinaire pourrait-on dire dans les cafés et restaurants du XIe arrondissement de Paris, bondés comme chaque semaine. On se retrouve à « la Belle équipe » fêter un anniversaire, on partage un verre ou un dîner entre amis, avec son amoureux, à « la Bonne Bière » ou au « Carillon », on se presse au Bataclan, au stade de France. Une soirée d’insouciance.

Six mois après

Une nuit horreur qui bouleverse, fracasse des milliers de vies. Il y a ces morts, 130, qui ne rentreront pas à la maison, ces centaines d’autres dont la vie a basculé, marqués dans leur chair ou dans leur âme. Et tous leurs proches affolés. Six mois après, une date symbolique – mais que signifient six mois quand le temps lui-même ne s’écoule plus de la même façon ? Six mois après nous avons donc souhaité donner la paroles à ces victimes, ces rescapés.

Quelque chose s’est-il irrémédiablement brisé ? Comment avancer après une telle catastrophe ? Chacune, chacun réagit bien sûr avec sa personnalité, ses forces et ses faiblesses. Ces quatre témoignages que nous vous proposons d’entendre reflètent une histoire singulière mais y résonnent aussi des accents universels sur la douleur, la solidarité, la solitude, l’apprivoisement du bonheur.

« Ma vie après le 13 novembre », c’est un reportage de Sarah Petitbon, réalisé par Annie Brault.

Avec les témoignages de Maureen Roussel, Caroline Langlade, Claude-Emmanuel Triomphe et Fanny Lacoste.

Le 20 novembre dernier, un autre Magazine de la rédaction évoquait les jours d’après
Et 4 mois après les attentats, un Choix de la rédaction se penchait sur la difficile réparation des victimes.

Intervenants

  • Boris Cyrulnik : psychiatre et psychanalyste
  • Françoise Rudetzki : Fondatrice de SOS Attentats. Membre du Conseil d’administration du FGTI (Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions)

J’étais au Bataclan avec mon mari le soir du 13 novembre

facebook_2015_logo_detailJe m’appelle Maureen,

J’étais au Bataclan avec mon mari le soir du 13-Novembre,
Nous faisons partis des rescapés, non blessés, mais marqués à vie par ce qu’il s’est passé ce soir-là.
Nous pensons énormément à toutes les personnes qui n’ont pas eu notre chance.

Et un peu plus loin chaque jour, pour nous et pour eux, nous avançons malgré tout.

Si je parle ici c’est pour m’adresser à vous ; vous qui étiez dans la salle ce soir-là.
Chacun gère le traumatisme à sa manière, certains parlent très facilement, ont repris une vie « normale ». Pour d’autres communiquer est encore très difficile ou même impossible. Ce n’est pas parce que notre peau n’est pas marquée, qu’il ne s’est rien passé et que cela n’a pas blessé notre chair.

Nous sommes plus de 1000

Plus de 1000 à être sortis de cette salle. Plus de 1000 personnes pour qui les choses ne seront plus jamais exactement les mêmes… c’est énorme.
Dans ce malheur, notre chance est d’être nombreux. Je pense qu’il est important de transformer cela en force.

Par le biais des réseaux sociaux, j’ai vu que très nombreuses sont les personnes qui ont un important désir de retrouver ceux qu’ils ont aidés. Et inversement les blessés qui recherchent ceux qui les ont sauvés. Mon mari a pu retrouver celui à qui il a porté secours et j’ai été témoin de l’incroyable aide que cela apporte dans la reconstruction de chacun. Savoir que dans ce chaos où nous étions tous si impuissants ; tous, nous avons d’une façon ou d’une autre été là les uns pour les autres.

Échanger, avec quelqu’un qui a vécu à sa façon la même chose, est différent des nombreux dispositifs mis en place actuellement.
Je sais que nous avons encore des choses à nous apporter. A encourager ceux qui veulent offrir un soutien. Parler ensemble ou même simplement apporter de la compagnie à ceux qui le souhaitent, rescapés, blessés ou famille de victimes. Parce qu’aider les autres, c’est aussi une façon de s’aider soi-même, afin d’aider chacun à surmonter la tragédie et pour pouvoir voir l’espoir derrière.

Life for Paris

Le monde nous a montré son soutien par le slogan Pray for Paris. Je propose de créer dans la continuité Life for Paris. Elle sera une association de dialogue et de soutien ou toute personne rescapée de ses évènements trouvera une place.

J’invite ceux qui souhaitent être acteur de cette suite à me contacter directement afin que vous réfléchissions ensemble ce que nous souhaitons mettre en place. Je ne connais rien au milieu associatif. Je suis moi-même comme vous à vouloir me reconstruire mais je suis convaincue du bien-fondé de cette démarche. Choisir de s’exposer n’est pas facile mais ce que je refuse, c’est qu’ils aient le pouvoir de faire taire d’autres voix.

Et un jour, je rêve que l’on puisse se réunir, refaire la fête ensemble, profiter de cette vie, qu’on sait tous maintenant si fragile. Et qui sait, pourquoi pas inviter les Eagles of Death metal.
Parce qu’aujourd’hui je le sais, pour nous et pour ceux qui ne sont plus là, fièrement, nous verrons la fin de ce putain de concert.

Vive le rock, vive la liberté, vive Paris et surtout vive la vie.

J’invite chaque personne qui lit ce texte et qui y est sensible à partager ce message afin que sa visibilité soit la plus grande possible. On connait malheureusement tous à un certain degré quelqu’un qui y était, dites leur.

https://www.facebook.com/lifeforparis/?fref=nf