« Ma thérapie à moi, c’était d’écrire » : amputé après l’attentat de Bruxelles, Walter Benjamin raconte sa reconstruction

« Ma thérapie à moi, c’était d’écrire » : amputé après l’attentat de Bruxelles, Walter Benjamin raconte sa reconstruction
01 mars 2018
Propos recueillis par Matthieu Jublin
INTERVIEW – Dans son livre « J’ai vu la mort en face », publié ce jeudi 1er mars, Walter Benjamin, victime de l’attentat de l’aéroport de Bruxelles, raconte comment sa vie a basculé le 22 mars 2016. À travers le récit de sa convalescence, il veut aider les autres victimes à surmonter une telle épreuve.
Il pensait prendre son vol pour aller voir sa fille en Israël, mais, ce 22 mars 2016, Walter Benjamin ne montera pas dans l’avion. Alors que ce Bruxellois de 49 ans, de confession juive, attend dans le terminal de l’aéroport de Zaventem, un kamikaze se fait exploser à 3 mètres de lui. Vivant, mais gravement blessé, Walter Benjamin devra être amputé d’une jambe.
Dans son livre « J’ai vu la mort en face », qui paraît le 1er mars aux éditions du Rocher, il raconte les secondes pendant lesquelles sa vie a basculé, et l’année de convalescence qui a suivi. Walter Benjamin se confie dans son ouvrage sur les peines et les espoirs qui ont jalonné cette année de reconstruction, mais n’hésite pas à pointer du doigt les causes du terrorisme et de l’intolérance.

LCI : Comment a évolué votre convalescence depuis l’écriture de votre livre ?

Walter Benjamin : Ça évolue positivement. Je n’ai pas encore une vie normale mais j’arrive à me déplacer tout seul. Ce n’était pas le cas il y a quelques mois. Trois fois par semaine, je retourne à l’hôpital pour faire de la rééducation. J’arrive à marcher, mais pas encore sur des pentes, ni sur des escaliers. J’en ai encore pour une bonne année.

LCI : Et psychologiquement ?

Walter Benjamin : On a toujours des hauts des bas, ce n’est pas mathématique. On ne peut pas complètement oublier. Dans un petit coin de mon cerveau, il y a toujours des flashbacks, et des bruits qui me rappellent l’attentat.

LCI : Vous parlez de ce livre comme d’une thérapie ou d’un exutoire. Qu’est ce qui vous a le plus aidé à tenir ?

Walter Benjamin : C’est un mélange. Il y a ma fille, qui est très importante pour moi. Il y a aussi l’amour. Quand on se réveille à l’hôpital, il ne faut pas rester avec ses pensées noires. Au-delà du fait de prendre des médicaments et de voir un psychologue, c’est important de faire un bilan sur soi-même. Ensuite, il faut avoir des projets, aller de l’avant, même si c’est plus facile à dire qu’à faire. Les antidépresseurs ne font pas guérir, il n’y a que le fait d’avancer. Ma thérapie à moi, c’était d’écrire, mais on parle aujourd’hui « d’art-thérapie », avec la photo, la peinture. Il ne faut pas s’isoler. Les autres n’arrivent pas à comprendre ce que l’on vit, donc on peut rapidement s’isoler, mais cette solitude est ce qui peut arriver de pire aux victimes.

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Rugby : Aristide Barraud, blessé lors de l’attaque du 13-Novembre

Rugby : « j’étais fou d’y croire », témoigne Aristide Barraud, blessé lors de l’attaque du 13-Novembre
L’ancien rugbyman, blessé dans les attentats de Paris, revient dans une interview publiée jeudi sur sa tentative échouée de revenir au meilleur niveau.

« Peut-être que je me cachais la vérité, mais j’en avais besoin ».

A l’occasion de la sortie de son livre Mais ne sombre pas jeudi, Aristide Barraud, 28 ans, rugbyman professionnel gravement blessé lors des attentats du 13 novembre 2015, est revenu dans les pages de L’Equipe jeudi sur sa retraite précoce prise en avril dernier.

« J’avais tout le temps mal ».

En avril dernier, deux ans et demi après avoir été gravement blessé alors qu’il était à la terrasse du bar Le Carillon prise pour cible par les terroristes, Aristide Barraud, qui jouait en première division italienne, a annoncé qu’il raccrochait définitivement les crampons. Avant cette décision, l’ancien international chez les jeunes avait eu des signes avant-coureurs en 2016. « Il y a eu des brèches dans mon obstination » à re-devenir joueur de rugby, se souvient-il. Alors qu’il s’entraînait « comme un chien », il avait « tout le temps mal » alors qu’il n’en était qu’à l’entraînement sans contacts. Et en octobre, après avoir repris « une carrure athlétique », une nouvelle opération lui a fait perdre tout « reperdre ». « Dur », se remémore-t-il.

« Des pas dans la folie ».

Le pire est malheureusement à venir pour le joueur qui revient alors sous les couleurs du maillot de Mogliato Veneto. « Mon corps n’a pas suivi et il a commencé à se manifester par des voies bizarres », raconte-t-il à L’Equipe. « Des maladies, des petites fièvres qui se transformaient en grippe, comme j’en avais jamais eu », évoque Aristide Barraud. Et d’ajouter à cela « des problèmes de digestion », une « migraine continue », « des crises d’angoisse bizarres » jusqu’à « faire des pas dans la folie ». « Je sentais que je me mettais en danger. Je ne suis pas suicidaire. Il était temps de dire ‘stop' », confie l’ancien du Stade Français.

Comme « une deuxième enfance ».

Aristide Barraud, qui dit toujours souffrir de terribles maux de tête, ne regrette pas pour autant d’être revenu sur les terrains :

« j’étais fou d’y croire. Mais j’y croyais. Et c’est vraiment ce qui m’a sorti de la merde, ce qui m’a gardé la tête hors de l’eau ».

Et même si avoir un ballon dans les mains lui manque, il a décidé de rester à l’écart du rugby « pendant trois ans », par envie de « voir autre chose » mais aussi parce qu’il n’est « pas soigné ». Philosophe mais aussi optimiste, Aristide Barraud estime qu’il vit désormais « une autre vie » comme s’il « était dans une deuxième enfance », une période qu’il trouve « grisante ».

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