Emmanuel, Moulinois rescapé du Bataclan : « J’ai levé la tête et j’ai vu un des terroristes… »

Logo-La-montagne.fr14 novembre 2015
Emmanuel, Moulinois rescapé du Bataclan : « J’ai levé la tête et j’ai vu un des terroristes… »

« Je fais partie des chanceux, je n’ai pas la moindre égratignure et les amis avec qui j’étais sont tous en vie ». Ancien salarié du Conseil général de l’Allier et animateur de Radio Bocage, Emmanuel Wechta, Parisien depuis cinq ans, était au concert, vendredi soir, au Bataclan, à Paris. Il témoigne.

« Aujourd’hui, je me sens comme un survivant, comme quelqu’un qui a vu la mort de près, qui a eu beaucoup de chance de sortir très vite, mais je réalise encore difficilement ». Ce sont les premiers mots d’Emmanuel Wechta, lorsque que nous l’avons joint par téléphone.

« Nous étions un groupe de six, installés au balcon sur le côté droit de la scène, explique Emmanuel, un habitué de cette salle parisienne. Le concert avait débuté depuis une vingtaine de minutes, lorsqu’on a entendu une détonation, suivie d’une rafale. On s’est alors tous couchés. Les lumières se sont allumées, comme en plein jour, et on a entendu une deuxième rafale. J’ai levé la tête et j’ai vu un des terroristes : il avait le visage à découvert, portait une veste militaire avec des munitions. Il rechargeait son arme ». 

Les terroristes avaient débarqué par la porte d’entrée et mitraillaient à bout portant la foule (*), massée dans la fosse.

Emmanuel poursuit : « La chance a voulu qu’il y ait une issue de secours juste derrière nous. J’ai entendu : « On y va ! On y va ! » J’ai attrapé mon blouson et mon sac à dos, je n’ai même pas pensé à attraper mes béquilles, et j’ai commencé à ramper. Je me suis levé peu après, j’ai avancé dans le couloir. J’ai suivi des « Par ici ! Par ici ! « , et on s’est vite retrouvé dehors, avec deux de mes amis. »
Les trois autres membres du groupe ne sont pas parvenus à trouver la sortie. Parmi eux, la cousine d’Emmanuel qui s’est réfugiée dans un des toilettes avec huit personnes, les deux autres trouvant refuge dans une loge. Tous les trois ont dû attendre l’assaut du Raid pour être libérés.

« Tout le monde criait »

« Dehors, on croisait des gens le visage ensanglanté, tout le monde criait et on entendait le bruit des armes derrière nous. Nous avons remonté la rue Voltaire jusqu’à République. On criait aux gens qu’on croisait :  » Partez !  » Puis, on a vu un bus, on est monté dedans pour s’éloigner du danger. Machinalement, je me souviens qu’on a tous validé notre titre de transport ! ». 

« On était un peu comme des robots »

Avaient-ils conscience de ce qui se passait ? « Non pas du tout. On était un peu comme des robots. On pensait à nos vies. Dès que j’ai pu, j’ai appelé ma maman et mes deux sœurs, pour les rassurer. Mais nous n’avions pas du tout analysé la situation. Des terroristes à un concert de rock’n’roll, c’est tellement surréaliste…. »
Il y a eu ensuite ce grand soulagement, vers 2 h 30 du matin, lorsqu’Emmanuel a appris que tous ses amis avaient la vie sauve, même si deux, blessés, sont hospitalisés.
« On a prévu de tous se retrouver ce soir. Après un truc comme ça, ce n’est pas possible de passer la soirée seul . Je vais voir comment je vais digérer tout ça, rien n’est plus comme avant. Cette scène de guerre, et surtout ce bruit des rafales, le même que celui qu’on entend dans les reportages à la télévision. Je le reconnaîtrai toujours… »
Témoignage recueilli par Pierre Seguin
(*) Le concert du groupe Eagles of Death Metal était à guichet fermé. Il y avait 1.500 personnes réparties entre la salle et le balcon.

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Un brancardier – dont le petit frère a été tué par les terroristes – raconte comment il a vécu l’attentat de l’intérieur…

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Samedi 14 novembre 2015

Fares – brancardier à l’hôpital Saint-Vincent de Paul (Lille) âgé de 34 ans – avait spécialement fait le déplacement vendredi jusqu’à Paris pour assister au concert d’Eagles 0f Death Metal. La DH a croisé sa route boulevard Voltaire alors qu’il venait tout juste de se recueillir devant le Bataclan. « J’ai perdu mon petit frère dans cette sale de concert. Il a été abattu par ces fils de rien. Il avait 19 ans. Il était étudiant en psychologie. Il adorait comme moi ce groupe de musique », témoigne Fares en pleurs. « On n’était pas du même côté de la scène quand c’est arrivé. Je ne l’ai pas vu mourir ».

L’attaque

Le trentenaire se remémore la scène de l’attaque comme suit : « On dansait. Et, d’un coup, on a entendu un ‘Bam’ ; un ‘Bam’ comme si ça venait de la musique. Tout le monde a continué à danser. Puis, on a commencé à voir des gens qui tombaient. Au début, on a pensé qu’ils s’évanouissaient. Mais non : des fils de rien nous arrosaient. Ils ont fait un Charlie Hebdo bis x vingt. Ils tiraient, ils tiraient, ils tiraient. Même sur les gens qui étaient allongés. Parmi les quatre jeunes qui nous ont attaqués, il y avait un Français : un blanc. On lui aurait donné le bon dieu sans confession. »

Et de poursuivre son récit : « J’ai survécu en me cachant sous un cadavre. Je n’ai pas bougé pendant deux heures et demie. On a finalement entendu des ‘Boum’. Des morceaux de cervelles ont alors été projetés partout. Tu ne vois cela que dans les films. On a ensuite entendu les coups de feu de la police et, j’en suis le témoin, c’est une femme policière qui a dit : ‘Levez les mains’. Les vivants, on a tous dû lever les main. Ils nous ont évacués et ils m’ont juste donné un bout de papier sur lequel était griffonné l’adresse de l’Institut médico-légal pour que je puisse retrouver son corps. Il adorait venir à Bruxelles se promener dans le quartier du Marché au Charbon. La vie ne vaut rien mais rien ne vaut la vie. »


« Je me suis caché sous un mort » par dh_be