Attentats de Paris : « Mon livre n’est pas une thérapie » – Vous n’aurez pas ma haine

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Attentats de Paris : « Mon livre n’est pas une thérapie » – Vous n’aurez pas ma haine

05 avril 2016

Antoine Leiris a perdu sa femme, Hélène Muyal-Leiris, morte sous les balles des terroristes le 13 novembre au Bataclan. Aujourd’hui, le père de Melvil sort un livre « pour faire taire tous les mots qu’il a en tête ».

La femme d’Antoine Leiris, Hélène Muyal-Leiris est morte le 13 novembre au Bataclan sous les balles des terroristes. Aujourd’hui, il sort un livre Vous n’aurez pas ma haine. C’est aussi le nom du billet qu’il avait posté sur Facebook trois jours après les attentats de Paris et qui avait été très partagé. Le père de Melvil, qui avait 17 mois lorsque sa maman est morte, était l’invité d’Europe 1 mardi matin.

« Il faut lutter contre la colère avec la pensée et la réflexion ». « Je m’empêche de céder à la colère. La colère, c’est un instinct et il y a quelque chose d’animal en elle. Il faut lutter contre cela avec la pensée et la réflexion. Dans une société, si on laisse tous parler nos instincts, ce serait invivable. C’est pour cela que je résiste. C’est un refus de la faiblesse », a-t-il expliqué. Et près de cinq mois après les attentats, Antoine Leiris raconte « son quotidien, « le même que celui de tous les gens qui ont des enfants. Je n’ai pas encore repris le travail donc j’ai plus de temps. Je dépose mon enfant à la crèche et je ne fais que des choses de papa ».

« Ce livre n’est pas une thérapie »

Dans son livre, chargé d’émotions, Antoine Leiris se livre beaucoup car il avait « un besoin et une envie d’écrire ». Un geste qui lui est venu naturellement, pour « faire taire » tous les mots qu’il a en tête. Antoine Leiris l’assure, « avec ou sans ce livre, Hélène est avec nous et le rapport intime que j’ai avec elle et le plaisir que j’ai à ressentir le chagrin que j’ai pour elle est plus fort que ce livre ». Un livre « qui n’est donc pas une thérapie » mais « l’écriture offre des espaces de liberté immenses dans des moments où nous sommes dans le noir, dans le brouillard, perdu et isolé ».

Melvil « n’a plus les petits plats de sa maman »

Dans Vous n’aurez pas ma haine, Antoine Leiris parle également de son fils, Melvil, « qui n’a plus les petits plats de sa maman ». Un fils de presque deux ans maintenant, dont Antoine Leiris, « ne sait pas s’il a compris ce qu’il s’était passé ». Mais il en est certain, « la compréhension de ces événements va grandir avec lui ». Antoine Leiris va donc accompagner son fils « pour qu’il comprenne les événements avec un esprit libre ».

« Que justice soit faite »

Les attentats de Bruxelles ont récemment fait une douloureuse piqûre de rappel aux attentats de Paris et des nombreuses interpellations ont suivi. « Je suis ces événements comme tous les concitoyens et je ressens beaucoup de tristesse pour la Belgique, j’ai beaucoup de chagrin », a-t-il raconté. Il n’a donc maintenant qu’un souhait : « que justice soit faite ». Et justement, Salah Abdeslam, le dernier membre du commando du 13 novembre sera prochainement transféreé en France pour y être jugé. « La société doit lui adresser un message. Et j’espère qu’après un procès équitable, cette personne sera punie à hauteur de sa faute ».

« On s’est remis à rire »

A la question « comment ça va ? », Antoine Leiris répondait, laconique, le 20 novembre : « comme ça peut aller dans ces moments-là ». Aujourd’hui, il l’assure, « ça va mieux ». « Je me suis rendu compte qu’on allait mieux qu’avant quand, il y a quelques jours, on s’est remis à rire exactement comme avant. On est en train d’avancer ».


Antoine Leiris souhaite « un procès équitable… par Europe1fr

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Juliette Méadel : « 2.800 demandes d’indemnisation de victimes sont à l’étude »

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Juliette Méadel : « 2.800 demandes d’indemnisation de victimes sont à l’étude »

Publié le 29/03/2016

La secrétaire d’État chargée de l’Aide aux victimes évalue à 350 millions d’euros le coût des indemnités pour les seuls attentats du 13 novembre.

Paris Match. Nous avons appris la mort d’une victime française à Bruxelles trois jours après les attentats : comment expliquer que l’on puisse mettre autant de temps ?
Juliette Méadel. Le processus d’identification, très encadré, peut prendre de quelques heures à plusieurs jours. Identifier un corps exige de recueillir des informations précises et donc de prendre le temps nécessaire pour investiguer. Cela varie aussi en fonction de l’état de la victime. Pour un corps calciné par exemple, en l’absence de papier d’identité, c’est très complexe. La difficulté est accrue lorsqu’il n’y a pas de liste des personnes présentes là où a lieu un attentat ou un accident collectif.

Quel est votre rôle lorsqu’un attentat comme celui de Bruxelles a lieu ?
Mon rôle consiste notamment à faciliter l’accès à l’information pour les victimes. Dans le cas de Bruxelles, dès que je l’ai vérifié, j’ai communiqué le numéro unique permettant aux familles et aux proches de se renseigner sur les évènements qui se produisaient. Quelques jours après, j’ai eu un premier contact avec les victimes et leurs familles pour les assurer du soutien de l’État et leur dire que j’étais à leur service. J’ai un rôle d’information, de soutien et d’accompagnement. Rattachée au Premier ministre je peux coordonner plusieurs ministères. Santé, Intérieur, Justice, Emploi, Transport, Formation professionnelle. Cela me permet de les aider concrètement sur l’ensemble de leur parcours de reconstruction. Et de leur faciliter la vie.

Pourquoi les familles ont-elles mis autant de temps à joindre des interlocuteurs après les attentats de novembre dernier à Paris ?

La CIAV – cellule interministérielle d’aide aux victimes – avait été mise en place par circulaire, signée par le Premier ministre, seulement la veille. Il a fallu faire face à plus de 11.000 appels, mais les services téléphoniques n’étaient donc pas suffisamment rodés. Désormais, il y a un numéro unique qui sera diffusé partout, y compris sur les réseaux sociaux dès qu’un attentat se produit.

Qu’avez-vous prévu pour améliorer la prise en charge des victimes ?

Un guichet unique a été mis en place pour accompagner les victimes dans la durée. Il s’incarne dans le comité de suivi d’aide aux victimes, réuni le 14 mars dernier, durant lequel nous examinons, avec les associations de victimes et d’aide aux victimes, l’ensemble des cas complexes. Nous sommes aussi en train de mettre en place, avec les ministères de la Justice et de l’Intérieur, un réseau de référents qui seront chargés du suivi dans les territoires. Enfin, nous élaborons aussi un site internet, opérationnel d’ici cet été, qui permettra aux victimes de faire leurs démarches en ligne, de télécharger tous les formulaires nécessaires, d’avoir accès à l’ensemble des informations nécessaires dans leur parcours.

« Le Fonds de garantie des victimes anticipe près de 4.000 demandes »

Combien y a t-il de dossiers suivi par le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme ou autres infractions (FGTI) ?
Pour les années 2015-2016, plus de 2800 demandes de victimes françaises et étrangères en France. Il y a aussi des victimes françaises à l’étranger sont à l’étude par ce fonds d’indemnisation. Le nombre de victimes évolue constamment et le FGTI anticipe près de 4000 demandes d’indemnisation car le choc post traumatique peut survenir entre 12 à 24 mois après l’attentat. Plusieurs mois après, des victimes non blessées physiquement mais choquées psychologiquement peuvent, du jour au lendemain, avoir des visions cauchemardesques, ne plus réussir à dormir. C’est à ce moment, de prise de conscience du préjudice subit, que les victimes font une demande d’indemnisation.

Le fonds d’indemnisation des victimes est-il suffisamment doté pour faire face aux demandes ?

Le fonds est doté de 1,2 milliard d’euros. Pour les victimes de Côte d’Ivoire touchées le 13 mars dernier, 9 provisions leur ont déjà été versées pour faire face aux premiers frais. Il faut réfléchir à la pérennité de son financement. Tous les scénarios sont sur la table. La taxe sur les contrats d’assurance, qui alimente le fonds, a été augmentée de 1 euro en janvier 2016.

Pour les seuls attentats de novembre

Le FGTI anticipe un coût de 350 millions d’euros. Ce chiffre se base sur le nombre de victimes directes et sur l’anticipation des victimes qui se déclareraient à l’avenir. Le principe, c’est l’indemnisation intégrale du préjudice.  Il ne peut être établi que lorsque les blessures sont consolidées. Par exemple si votre genou est touché lors d’une attaque, il faut attendre de savoir si vous allez retrouver son usage ou pas. Il n’est pas possible de le prévoir à l’avance.

François Hollande a reçu les associations de victimes au lendemain de l’arrestation de Salah Abdeslam et à la veille des attentats de Bruxelles.
A quoi cela a t-il servi ?

Cette reconnaissance du chef de l’État et à travers lui, de la Nation toute entière était importante. Les associations ont pu ainsi entendre qu’il avait bien ces priorités : information, accompagnement et clarification du statut de victimes. Le Président les rencontrera à nouveau avant la fin de l’été.

Vous vous retrouvez face à des victimes encore en grand état de choc, étiez-vous formée pour cela ?

Cela me rappelle mes premières années de vie professionnelle lorsque j’étais avocate. Je me mets à la place des gens que j’aide. Je me retrouve assez naturellement dans cette position. Avec, en plus la dimension de service public et le souhait de montrer à tous nos concitoyens que l’État est là pour eux.

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