Panser ma vie : trois ans après le Bataclan, Fred Dewilde reconstruit sa vie sur scène


Panser ma vie : trois ans après le Bataclan, Fred Dewilde reconstruit sa vie sur scène
Publié le 09/03/2019
Journaliste Figaro Aurore Garot
Fred Dewilde, dessinateur des BD, Mon Bataclan et La Morsure, proposera un troisième volet autour du traumatisme et de la violence post-13 novembre 2015, avec l’aide de Franck, musicien du groupe Cap’tain Boogy» et autre rescapé du drame.

« Ça a commencé par un spectacle, ça finira par un spectacle »

Le 13 novembre 2015, 90 personnes ont perdu la vie au Bataclan, salle de concert parisienne. Venus pour écouter le rock d’Eagle of death metal, les survivants sont repartis avec l’écho des balles et le silence des morts. Après Mon Bataclan (2016) et La Morsure (2018), deux bandes dessinées sur la tuerie et le traumatisme qu’elle a pu engendrer, Fred Dewilde, rescapé du drame, revient pour un troisième fois sur la vie, sa vie post-attentat. Cette fois-ci, à travers un spectacle mêlant musique et réécritures de ses anciens textes cathartiques.

« Entre l’écriture de Mon Bataclan et aujourd’hui, trois ans de vie et de réflexions se sont écoulés, je ne vois plus les choses de la même manière »,

explique Fred Dewilde. Dans son spectacle Panser ma vie, le dessinateur propose une réécriture des passages de ses bandes dessinées et une reconstitution de trois ans de réflexions d’un survivant.

« C’est une prolongation de La Morsure, avec une application plus large de ces notions de violence et traumatisme dans le contexte social actuel, raconte-t-il. Outre l’attentat, il y a différents faits sociaux comme le viol, qui entraînent des états psychologiques proches ce que les survivants de l’attentat comme moi, ont pu vivre. »

Une façon d’évoquer le choc post-tramatique qui, sournois, reste en soi, comme un poison lent qui peut vous détruire. Dewilde a, semble-t-il, trouvé son antidote.
Pour son spectacle, le dessinateur a fait appel à Franck, un autre survivant du Bataclan, musicien rencontré dans l’association de victimes des attentats, Life for Paris.

« Je lui ai dit que je cherchais un guitariste pour un projet et il m’a répondu ‘‘ma guitare est à toi! »»,

explique Fred Dewilde.
À travers un « concert poétisé », les deux artistes veulent transmettre des émotions et non des images. Pour le dessinateur, l’objectif n’est pas de faire du voyeurisme ou de faire revivre les tragiques événements mais d’évoquer le sentiment qu’ils ont provoqué et provoquent encore, pour aborder les conséquences et la reconstruction. Ou du moins les façons de se reconstruire.

« Le spectacle se veut pédagogique et ouvre sur un débat. Sur l’écho qu’a eu cette violence sur notre vie quotidienne, et pas seulement pour les survivants du Bataclan. »

Aucune date officielle n’est pour l’instant fixée, mais le spectacle est sûr d’être joué à Valencienne où les deux hommes seront en résidence.

« On espère faire tourner le projet, mais le plus important pour nous actuellement, c’est de le terminer. Les répétitions sont éprouvantes. On a du mal à retenir nos larmes, même pour Claire Dumelz, la comédienne et metteuse en scène qui travaille avec nous et qui n’a pas vécu les attentats »,

conclut Fred Dewilde.

Pour aller sur l’article, cliquez sur l’image

Touchée à la mâchoire au Bataclan, Gaëlle retrouve le sourire après 21 opérations

Touchée à la mâchoire au Bataclan, Gaëlle retrouve le sourire après 21 opérations
3 janvier 2019
Par
Le 13 novembre 2015, Gaëlle a été touchée par une balle au Bataclan et a perdu la partie gauche de sa mâchoire. Sa reconstruction se fait avec un docteur de Caen (Calvados).
Trois ans après l’attentat du Bataclan, le 13 novembre 2015, Gaëlle retrouve peu à peu son sourire, physiquement parlant. Cette jeune femme de 37 ans aujourd’hui, a reçu une balle dans le visage au soir du concert des Eagles of Death Metal. Elle a perdu la partie gauche de sa mâchoire.
21 interventions chirurgicales
C’est à la Pitié Salpétrière à Paris, après 21 interventions chirurgicales, que sa mâchoire a été reconstruite avec notamment un lambeau de son péroné.

J’ai retrouvé un semblant de bouche. J’ai pu parler à la fin du mois de décembre 2015 et manger en juin 2016. Maintenant j’en suis au stade des prothèses dentaires, explique-t-elle.

Le temps du sourire

L’aspect esthétique est venu après. Les médecins experts parisiens l’ont orientée vers le docteur Daniel Labbé, qui exerce à la clinique Saint-Martin à Caen (Calvados). Il y a vingt ans, ce chirurgien plasticien a mis au point une technique, aujourd’hui diffusée dans de nombreux pays du monde, pour redonner le sourire à des personnes atteintes de paralysie faciale.
Gaëlle a vu le docteur Labbé pour la première fois en octobre 2017. Il l’a opérée quatre fois depuis. « Gaëlle avait encore des muscles qui fonctionnaient au niveau de ses pommettes. Je suis allé chercher les moignons de ces muscles pour les raccorder aux tendons », explique-t-il. S’en suivent des injections de graisses et de cellules souches prises dans le ventre ou les cuisses de la jeune femme. « Ça a deux buts : redonner du volume à la joue et améliorer la cicatrisation ».

« Aujourd’hui je sens des fourmillements, c’est magique ! »

Aujourd’hui, un mouvement se déclenche dans la partie gauche du visage de Gaëlle lorsqu’elle sourit. Les rendez-vous chez l’orthophoniste et le kiné pour des massages sont primordiaux dans les étapes de la reconstruction.

Apprivoiser le visage

Au prochain rendez-vous à la clinique Saint-Martin, durant le mois de janvier, le docteur Labbé va faire un point sur sa dernière opération. « Gaëlle va venir me voir jusqu’à ce qu’elle se sente bien avec son visage. Elle ne retrouvera pas celui qu’elle avait avant c’est certain ».
Et la jeune femme, en arrêt maladie depuis l’attentat, en a conscience. Elle a appris à relativiser et à apprivoiser son visage.

J’étais là au mauvais moment. J’ai vécu 34 ans avec un visage normal, explique-t-elle. J’ai appris à accepter que mon visage change.

Maintenant que le docteur Labbé a « rebranché son sourire », Gaëlle sait qu’elle va devoir être patiente. Trois ans après sa première opération, elle est toujours suivie à Paris par des médecins pour la partie intérieure de sa mâchoire. Pour l’extérieur, elle a appris à accepter cette bouche « avec un aspect un peu brûlé » et croit au progrès de la médecine, pour réduire au mieux ses cicatrices.

Pour accéder à l’article, cliquez sur le logo de « Liberté »