Au chevet des familles de victimes

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Pascale Égré

« L’idée est de travailler ensemble à une réponse concertée de l’État. Le but : donner un interlocuteur unique aux familles pour les semaines, voire les mois à venir », décrypte Stéphane Gicquel, le secrétaire général de la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accidents collectifs (Fenvac). Rôdé à ces situations de crise où les proches des victimes sont souvent désorientés, « perdus face à une multitude de contacts », cet acteur associatif œuvre donc, coude à coude, avec le réseau de l’Inavem, aux côtés de fonctionnaires des ministères de la Santé, de la Justice, de l’Intérieur et des Affaires étrangères. Et sous la même casquette.

Abritée dans les locaux de la cellule de crise du Quai d’Orsay, la CIAV s’est organisée en trois équipes. L’une, en contact permanent avec les hôpitaux, travaille sur les blessés ; une deuxième sur les disparus ; une troisième sur les personnes décédées. L’établissement de la liste officielle des victimes lui incombe. « Les informations sont collationnées de toute part puis traitées », décrit Stéphane Gicquel, qui a intégré le dernier groupe. Plutôt qu’à l’Institut médico-légal ou à la police, la difficile tâche d’annoncer la mort d’un proche à sa famille est revenue à cette équipe. Mais elle œuvre aussi d’ores et déjà à la mise en place de l’aide très concrète qui va leur être apportée.

Stéphane Gicquel détaille les trois axes de ce soutien. Le premier concerne la restitution des corps, une fois les constatations médico-légales achevées. « C’est la cellule qui préviendra les familles », dit-il.

La CIAV prévoit aussi une prise en charge des proches venant de province ou de l’étranger — une vingtaine d’étrangers, d’une quinzaine de nationalités, figurent parmi les morts. Visas si nécessaires ou hébergements seront facilités et planifiés. Enfin, une assistance pour les obsèques est programmée. « Le choix de la société des pompes funèbres revient à la famille. Celle-ci donnera les coordonnées de l’entreprise, qui seront transmises au fonds d’indemnisation pour les frais », explique-t-il.

* Numéro vert : 0800.40.60.05 ou 00.33.1.45.50.34.60  depuis l’étranger.

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Emmanuel, Moulinois rescapé du Bataclan : « J’ai levé la tête et j’ai vu un des terroristes… »

Logo-La-montagne.fr14 novembre 2015
Emmanuel, Moulinois rescapé du Bataclan : « J’ai levé la tête et j’ai vu un des terroristes… »

« Je fais partie des chanceux, je n’ai pas la moindre égratignure et les amis avec qui j’étais sont tous en vie ». Ancien salarié du Conseil général de l’Allier et animateur de Radio Bocage, Emmanuel Wechta, Parisien depuis cinq ans, était au concert, vendredi soir, au Bataclan, à Paris. Il témoigne.

« Aujourd’hui, je me sens comme un survivant, comme quelqu’un qui a vu la mort de près, qui a eu beaucoup de chance de sortir très vite, mais je réalise encore difficilement ». Ce sont les premiers mots d’Emmanuel Wechta, lorsque que nous l’avons joint par téléphone.

« Nous étions un groupe de six, installés au balcon sur le côté droit de la scène, explique Emmanuel, un habitué de cette salle parisienne. Le concert avait débuté depuis une vingtaine de minutes, lorsqu’on a entendu une détonation, suivie d’une rafale. On s’est alors tous couchés. Les lumières se sont allumées, comme en plein jour, et on a entendu une deuxième rafale. J’ai levé la tête et j’ai vu un des terroristes : il avait le visage à découvert, portait une veste militaire avec des munitions. Il rechargeait son arme ». 

Les terroristes avaient débarqué par la porte d’entrée et mitraillaient à bout portant la foule (*), massée dans la fosse.

Emmanuel poursuit : « La chance a voulu qu’il y ait une issue de secours juste derrière nous. J’ai entendu : « On y va ! On y va ! » J’ai attrapé mon blouson et mon sac à dos, je n’ai même pas pensé à attraper mes béquilles, et j’ai commencé à ramper. Je me suis levé peu après, j’ai avancé dans le couloir. J’ai suivi des « Par ici ! Par ici ! « , et on s’est vite retrouvé dehors, avec deux de mes amis. »
Les trois autres membres du groupe ne sont pas parvenus à trouver la sortie. Parmi eux, la cousine d’Emmanuel qui s’est réfugiée dans un des toilettes avec huit personnes, les deux autres trouvant refuge dans une loge. Tous les trois ont dû attendre l’assaut du Raid pour être libérés.

« Tout le monde criait »

« Dehors, on croisait des gens le visage ensanglanté, tout le monde criait et on entendait le bruit des armes derrière nous. Nous avons remonté la rue Voltaire jusqu’à République. On criait aux gens qu’on croisait :  » Partez !  » Puis, on a vu un bus, on est monté dedans pour s’éloigner du danger. Machinalement, je me souviens qu’on a tous validé notre titre de transport ! ». 

« On était un peu comme des robots »

Avaient-ils conscience de ce qui se passait ? « Non pas du tout. On était un peu comme des robots. On pensait à nos vies. Dès que j’ai pu, j’ai appelé ma maman et mes deux sœurs, pour les rassurer. Mais nous n’avions pas du tout analysé la situation. Des terroristes à un concert de rock’n’roll, c’est tellement surréaliste…. »
Il y a eu ensuite ce grand soulagement, vers 2 h 30 du matin, lorsqu’Emmanuel a appris que tous ses amis avaient la vie sauve, même si deux, blessés, sont hospitalisés.
« On a prévu de tous se retrouver ce soir. Après un truc comme ça, ce n’est pas possible de passer la soirée seul . Je vais voir comment je vais digérer tout ça, rien n’est plus comme avant. Cette scène de guerre, et surtout ce bruit des rafales, le même que celui qu’on entend dans les reportages à la télévision. Je le reconnaîtrai toujours… »
Témoignage recueilli par Pierre Seguin
(*) Le concert du groupe Eagles of Death Metal était à guichet fermé. Il y avait 1.500 personnes réparties entre la salle et le balcon.

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