Le Bataclan deux mois après…

Le Bataclan deux mois après…
Ajoutée le 8 févr. 2016

Logo L'Obs le plusMon esprit est resté au Bataclan.
Amaury Baudoin est un jeune mannequin français, et le 13 novembre, il était au Bataclan.

« Au mauvais endroit, au mauvais moment »

Dans une vidéo postée sur YouTube, il raconte sa soirée :

“ Ce soir-là, ma copine et moi étions au mauvais endroit au mauvais moment. (…) Au Bataclan, j’ai croisé Caroline, une fille de mon âge qui m’a servi au bar et Gilles qui était à côté de moi dans la salle et que j’avais remarqué pour l’élégance de sa barbe et de ses lunettes rondes. Tous les deux sont morts. Je ne les connaissais pas et pourtant je pense fort à eux. ”

Amaury Baudoin nous montre quelques images du début du concert des Eagles of Death Metal, avant le chaos.

“Le 13 novembre, j’ai cru que j’allais mourir. (…) J’éprouve encore des scrupules à avoir eu autant de chance de m’en être sorti avec un simple éclat dans la cuisse et dans le dos.”

« Confronter mes valeurs, remettre en question mes idées »

Amaury Baudoin compte se battre

“Je refuse de perdre mes yeux d’enfant. (…) Je vais utiliser ma caméra comme ils utilisent leurs fusils. Je vais la tourner vers le réel pour y confronter mes valeurs et remettre en question mes idées.”

Si cette vidéo est notre vidéo du soir, c’est qu’elle nous a émus.
On souhaite beaucoup de courage à Amaury Baudoin, et à tous ceux qui ont été touchés de près ou de loin par ces événements.

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Victimes des attentats – Se remettre debout

nouveau-logo-la-croixpng-289134BIENVAULT Pierre
le 28/11/2015

ENTRETIEN. LOUIS CROCQ, psychiatre : « L’immense majorité des blessés psychiques vont guérir »

Apparu notamment après la Grande Guerre, le stress post-traumatique est aujourd’hui bien connu. Le professeur Crocq explique comment vont être prises en charge les victimes traumatisées par les attentats du 13 novembre.

Médecin-général des armées, psychiatre, professeur à l’université Paris V, le docteur Louis Crocq a travaillé durant toute sa carrière sur la névrose de guerre et le stress post-traumatique. C’est lui qui, après l’attentat du RER Saint Michel en 1995, a mis en place en France les cellules médico-psychologiques à la demande du ministre Xavier Emmanuelli et du président Chirac.
À l’occasion des attentats du 13 novembre, on a beaucoup entendu parler du risque de stress post-traumatique chez certaines victimes. De quoi s’agit-il exactement ?

Risque d’ESPT

Louis Crocq : Ces troubles peuvent survenir chez des sujets qui ont vécu un événement ayant provoqué une effraction majeure de leurs défenses psychiques. On parle ici d’événements qui, sur l’instant, ont provoqué une sorte d’arrêt de la pensée avec des réactions d’effroi, de terreur, de panique. Et une impression d’imminence de la mort, sans échappatoire possible.

Une fois l’événement terminé, certaines victimes vont être très agitées, se mettre à crier, à vociférer. D’autres vont être en état de sidération, comme des morceaux de bois, incapables de bouger et de comprendre ce qu’on leur dit. Ensuite, le risque est que ces troubles ne se chronicisent, avec des symptômes installés dans le temps : des cauchemars, des hallucinations, des réminiscences de l’événement, des sursauts, une vigilance constante et exagérée…

À quelle époque a-t-on découvert le stress post-traumatique ?

Louis Crocq : Un rôle précurseur a été joué par un neurologue allemand, Hermann Oppenheim qui, en 1888, a décrit des cas de névrose traumatique à propos de sujets ayant failli mourir dans des accidents de chemin de fer. Ensuite, en 1914-1918, on a vu apparaître les termes de « névrose de guerre » ou « d’hypnose de la bataille ». Cela touchait notamment des soldats qui avaient survécu après avoir été soufflés par un obus. Ils n’étaient pas blessés physiquement mais étaient pris de tremblements et n’arrivaient plus à tenir debout. Comme ils ne pouvaient plus combattre, certains de ces soldats étaient considérés comme des simulateurs et des tire-au-flanc. Peu à peu, on a aussi pris conscience de la nécessité de les prendre en charge très vite, pour ne pas les laisser méditer leur effroi. À partir de 1917, on a commencé à installer des petits hôpitaux psychiatriques tout près du front. C’est là qu’est né ce concept de la psychiatrie de l’avant qui, bien des années plus tard, a été au cœur de la création des cellules médico-psychologiques en France.
…/…

Louis Crocq : Pourquoi est-il important d’intervenir très vite après un événement traumatique ?

Louis Crocq : Pour essayer d’éviter que ne s’installe la névrose, ou une sorte de rumination de la frayeur et de l’effroi. Dans ce contexte d’urgence, le psychiatre ou le psychologue va inciter la personne à faire non pas un récit, mais une énonciation, une verbalisation de ses émotions « J’ai vu ceci ou cela, j’ai eu peur, j’ai failli mourir… », vont dire ces patients. Il faut comprendre que, subitement, ils sont entrés dans le monde des morts et c’est par la parole qu’il faut, doucement, les faire revenir dans celui des vivants. C’est essentiel qu’ils puissent parler avec un soignant qui est là pour les protéger et attester que, oui, la vie existe bel et bien.

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