Un otage du Bataclan : « Je me suis dit : “putain, tu respires” »

Logo-M-Attentats-du-13-novembreputain, tu respires
LE MONDE | 30.12.2015
Par Simon Piel
De qualificatif sur la soirée irréelle qu’il a vécue au Bataclan le vendredi 13 novembre, Arnaud n’en emploie pas. A peine dit-il, calmement, que « tout cela n’était pas prévu ».
Comment pouvait-il en effet imaginer qu’il allait passer par deux fois devant une « colline de cadavres » regroupés au milieu de la fosse de la salle de concerts parisienne ?

Marie, sa femme

Comment aurait-il pu deviner que Marie, sa femme, et lui, passeraient plus de deux heures dans un couloir étroit long d’une dizaine de mètres, retenus en otage par deux jeunes hommes se revendiquant du « califat islamique » ?
Comment pouvait-il savoir enfin qu’il serait le dernier à être libéré dans la fureur, « au milieu de la grenaille et des tripes », après avoir vu Foued Mohamed-Aggad et Ismaël Omar Mostefaï mourir sous ses yeux ?

Facultés de résilience

« C’est le témoignage médiatisé d’un agent de la BRI [Brigade de recherche et d’intervention] qui m’a fait réagir, son récit détaillé m’a appris beaucoup de choses, mais a fait de moi l’homme invisible », a-t-il expliqué dans un premier temps au Monde, quand il a pris contact par e-mail. Après avoir livré un premier témoignage à la police judiciaire, le 14 novembre, sur l’attentat qui a fait 90 morts la veille au Bataclan, il avait d’abord décidé de ne pas s’exprimer dans la presse. C’est d’ailleurs le choix qu’a fait son épouse. Ce n’est qu’un mois plus tard qu’il a changé d’avis. Pour figer cette soirée avant que ses facultés de « résilience », comme il dit, ne se chargent d’en gommer les pires…
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Franck Coste, survivant du Bataclan : « Ce soir-là, j’ai perdu une partie de moi »

Logo-La-voix-du-Nord Publié le 29/12/2015

Le 13 novembre, sa vie est devenue un puzzle dont il doit aujourd’hui recoller les morceaux. Franck Coste était au Bataclan. Pour ce musicien, la reconstruction passera par un concert hommage, qu’il organise le
8 janvier à Vieux-Condé.

Sur ce qu’il a vécu au Bataclan, Franck Coste préfère rester discret.
« Par respect pour les gens », résume-t-il. Tout juste dira-t-on qu’il a été au cœur de l’action : « J’ai fait des choses que je ne pensais pas faire un jour, j’ai vu des choses que ne pensais jamais voir. »

De Vieux-Condé où il habite, il avait fait spécialement la route pour voir les Eagles of Death Metal. Car Franck Coste – Cap’tain boogy, pour les intimes – est aussi musicien. Il joue du blues.

« On reste debout »

De fait, lorsqu’il a été question pour lui de se reconstruire, il a tout de suite pensé à ce qu’il savait faire : « Très vite, je me suis dit que j’allais organiser un concert. » Grâce à l’aide de nombreux bénévoles,
« Ter tous debout » se tiendra le 8 janvier à Vieux-Condé. « On reste debout, c’est ça le sens », précise Franck Coste.

L’hommage, le musicien tient à ce qu’il soit aussi rendu aux secours, aux policiers et aux militaires. « On ne pense pas assez à eux, précise-t-il. Ils sont les premiers à être arrivés et malgré la situation qui sortait de l’ordinaire, ils sont restés professionnels. » Aussi, Franck Coste se souvient que, « quand une rafale a éclaté, un pompier a fait barrage de son corps pour me protéger. Il n’a pas été blessé ». L’intégralité des bénéfices de « Ter tous debout » sera reversée aux orphelins des pompiers.

Le musicien le sait, organiser un concert ne suffira pas à faire table rase. « Il suffit d’un bruit, même des cris d’enfants », note-t-il, avant de poursuivre : « Ce soir-là, j’ai perdu une partie de moi dans cette salle. Au début on ne se rend pas compte. Puis il y a le contrecoup. En principe, je suis plutôt du genre grande gueule. Mais j’y ai laissé un truc. Des amis m’ont dit que quelque chose manquait dans mon regard. »

Des aides

Du soutien, Franck Coste en a. Beaucoup. « Je suis dunkerquois d’origine et musicien, ça aide ! », plaisante-t-il. Sans compter les aides psychologiques de l’État. « On est chouchouté par les institutions. » Mais comment partager l’inimaginable avec ceux qui ne l’ont pas vécu ? Franck l’avoue : « Je n’arrive à bien en parler qu’avec ceux qui y étaient. C’est tellement hors normes, eux seuls peuvent comprendre. »

Le concert est limité à 700 places.

Par Benoît Fabiszak