Sur le délit de violence psychologique par Jean-François Kahn

Que les députés aient voté une proposition de loi visant à renforcer la législation contre les violences faites aux femmes, excellent.
Que ce vote ait été acquis à l’unanimité, droite et gauche mêlées, bravo !
Mais — dussé-je, ici, m’attirer à tort les foudres de certaines féministes — il y a un point important de ce texte de loi qui me semble dangereux et inadéquat : il s’agit d’un nouveau délit, celui de violence psychologique
1) Parce que, contrairement aux apparences cela fera en fait le jeu des conjoints violents. pourquoi ? Parce que, lorsqu’une femme portera plainte pour violences ou en émettra simplement l’intention, l’époux ou le concubin pourra se précipiter chez son avocat et lui demander de déposer une plainte préventive pour « violences psychologiques ». Histoire de plaider ensuite la provocation « elle m’a poussé à bout ».
2) Parce que ce délit induit une appréciation totalement subjective : comment faire la preuve absolue d’une « violence psychologique », ou commence-t-elle, qu’est-ce qui la définit légalement, comment se matérialise-t-elle ? En fonction de quoi les tribunaux rendront des jugements radicalement différents en faveur des opinions des juges, des humeurs, du climat, de l’état d’esprit dans la région et du talent des justiciables. Cela n’améliorera évidemment pas l’image de la justice.
3) L’encombrement des tribunaux n’en sera qu’aggravé (imaginez simplement 100000 plaintes de ce type dans l’année) ce qui aura une incidence sur l’ensemble de leur fonctionnement.
4) Ajouté au délit de harcèlement moral, le délit de violence psychologique tend à judiciariser les rapports privés et donc à établir une sorte de police des intimités. Ce qui, poussé à son paroxysme, finirait par dégager un étrange parfum.
5) Or il existe déjà, dans nos lois, des délits de menaces, d’injures, de violences verbales, qui permettent, à condition d’être vraiment appliqués, de sanctionner les vraies violences psychologiques.

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