4/ Quelques conséquences sur les survivantes selon Gérard Lopez

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Perdues, sans repère, incapables de penser par elles-mêmes, les victimes de vampires perdent toute espèce d’estime de soi. Elles présentent de graves troubles identitaires qui les rendent particulièrement vulnérables. De place perdue en place perdue, elles deviennent des « sans domicile fixe » symboliques. Ces « paumés », « ces filles perdues », ces « dé-générés » sans repères généalogiques, ces gens « mal dans leurs baskets », risquent de sombrer dans la déviance, la délinquance ou l’exclusion sociale.

Du point de vue clinique, certaines victimes deviennent caractérielles, revendicatrices, méfiantes. Elles développent des traits de caractère paranoïaques. Elles se sentent toujours épiées, attaquées, comme s’il n’existait qu’un seul type de relation humaine, qu’elles revivent ainsi quotidiennement. Ces idées de persécution, sont aggravées par un fond mégalomaniaque : « Les Szeklers peuvent se vanter d’avoir accompli ce que ces parvenus, les Habsbourg et les Romanov, ont été incapables d’accomplir … » rien de moins, nous y reviendrons.

Les états dépressifs graves sont fréquents. Ils surviennent quand elles (re)vivent littéralement une expérience d’abandon. Ne sachant vivre que sous l’entière domination d’un vampire, elles sont incapables de survivre pour elles-mêmes, de façon indépendante. Ce n’est pas pour autant qu’elles puissent ressentir un quelconque sentiment positif. Les tentatives de suicide sont fréquentes. Certaines sont des actes impulsifs, explosifs, bien souvent effectués sans la moindre élaboration psychique permettant de les expliquer. Parfois elles sont plus élaborées et parfaitement compréhensibles : « Je n’arrivais pas à plaindre cette femme, car, comprenant maintenant le sort qui avait été réservé à son enfant, je me disais qu’il valait qu’elle l’eût rejoint dans la mort ».

« Euthanasie est un mot excellent et réconfortant ! J’ai de la reconnaissance pour celui qui l’a inventé ! », car le suicide et la mort sont alors vécus comme une délivrance.

Ces victimes finissent par sembler accepter leur sort : « Il est temps que je m’en aille. Je vous dis adieu mon cher Arthur, si je dois mourir cette nuit ».

Les troubles psychosomatiques les menacent. Ils leur permettent de survivre en passant à côté de leur vie, comme l’a si bien décrit Jean-Michel Thurin1. D’autres se plaignent constamment de maux imaginaires, mais vivent très vieux, déplorent Maurice Hurni et Giovanna Stoll… le Comte, lui, est immortel.

1/ Thurin Jean-Michel. (1996). Une vie sans soi. Editions Frison Roche
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2/ La pensée psychiatrique francophone face au concept américain d’état de stress post-traumatique par Michel de Clercq

Le traumatisme psychique dans la pensée psychiatrique francophone par Michel de Clercq
La pensée psychiatrique francophone face au concept américain d’état de stress post-traumatique

C’est d’outre-Atlantique que sont venues les initiatives, avec la constitution du système nosographique américain DSM, en 1952, et ses laborieuses réflexions en 1968 (DSM-II), 1980 (DSM-III), 1987 (DSM-III R) et 1994 (DSM-IV). concernant le traumatisme psychique, c’est le vocable de Gross Stress Reaction qui fut d’abord proposé, dans le DSM-1, pour désigner la réaction psycho-traumatique aiguë. Mais, lors de la révision DSM-II en 1968, le diagnostic de
Gross Stress Reaction fut supprimé, sans remplacement, initiative malencontreuse alors même qu’en pleine offensive du Têt, les GI envoyés au Vietnam subissait les pires affres du stress de combat.

Ce n’est qu’en 1980, avec le DSM-III, que fut introduit le diagnostic de Post- Traumatic Stress Disorder (en abrégé PTSD) pour désigner ce que les anciennes nosographies avaient coutume de dénommer névrose traumatique. cette initiative répondait d’ailleurs à l’afflux croissant, au sein de la population de 3 millions de vétérans américains du Vietnam, des Post-Vietnam Syndromes différés les chroniques qu’une politique de psychiatrie de l’avant simpliste et limitée à la seule sédation des effets immédiats du stress de combat n’avait su ni prévoir ni prévenir.

Ces Post-Vietnam Syndromes étaient en fait des névroses de guerre, mais le DSM qui se veut athéorique récuse le concept de névrose, entaché à ses yeux de connotation freudienne ; et il y substitue celui de stress, sans se rendre compte que ce n’est pas la peine de s’affranchir d’une théorie (psychanalytique) pour se subordonner à une autre (bio-physiologique).

Concernant son champ clinique, le concept de PTSD s’appliquait non seulement aux anciennes névroses de guerre, mais aussi aux séquelles psycho-traumatiques des agressions, des accidents et des catastrophes du temps de paix.

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