Avec : Julianne Moore, Stephen Dillane, Eddie Redmayne, Elena Anaya – 2007, 1h37
« Une histoire vraie », comme disent les publicités. Une histoire dérangeante et hors normes… A priori, comment qualifier autrement la relation incestueuse que Barbara Daly, actrice ratée, peintre de talent et scandaleuse de la jet set, noua avec son fils à la fin des années 1960 ?
Comment ne pas réagir sans effroi devant le matricide qui s’en suivit ?
L’élégance du film tient justement dans sa capacité à nous éloigner de ce point de vue moral ; de nous faire saisir les faits non de l’extérieur mais par le truchement des émotions, bien moins sommaires que les simples faits.
Avec un classicisme assumé, Tom Kalin nous fait épouser le point de vue du fils, Tony, de sa naissance à l’acte criminel. Mais dès le début, ce style est perverti par le décalage. Décalage entre le corps du bébé et la voix off, déjà adulte, qui vient commenter ce que nous voyons ; décalage encore entre les politesses échangées, la magnificence des cadres bourgeois et la dureté des propos et des actes ; contraste également entre la nudité, assumée, et les propos policés.
Le film est à l’image de Barbara, clivé, instable, imprévisible malgré son côté « tiré de faits réels ».
Il oscille entre la pose et la crise, comme cette femme, d’origine modeste, cherchant à s’insérer dans une société dont l’hypocrisie la terrifie. Ce personnage asocial mais intense, au comportement erratique, est servi par une actrice à son sommet : Julianne Moore.
La belle a son fan club dont je ne suis pas près de faire partie. Mais là, force est de constater que sous la direction de Tom Kalin, elle devient littéralement incandescente. Elle explore ici des chemins que seule, peut-être, notre Huppert nationale avait traversés. Elle y est guidée par une mise en scène rappelant dans ses meilleurs instants l’ambiguïté d’un Joseph Losey ou la tension morbide d’un Luchino Visconti. Classique certes, mais extrêmement efficace et déstabilisant. Du grand cinéma.
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