Outreau : "Présumé coupable": Nouvelle manipulation pour les Présidentielles par Marie-Christine Gryson

15 Juin 2011
Le film « Présumé coupable » version unilatérale de l’un des acquittés, l’huissier, utilise de nouveau les images traumatiques qui ont été des pièges à conviction lors des deux procès téléréalité-médiatiquement inéquitables pour les enfants interdits d’écran pour cause de minorité. L’émotion de sidération par l’effraction des images y est ici de nouveau réactualisée et elle crée de nouveau l’anesthésie du rationnel qui a dévoyé la justice dans cette terrible affaire d’Outreau.
L’argument de l’absence de contradictoire prend pour prétexte qu’il ne s’agit pas de l’affaire dans son aspect judiciaire, mais de l’histoire d’un homme broyé par une justice prétendument injuste. C’est pour cette raison que le producteur Christophe Rossignon m’a réexpédié mon ouvrage « Outreau la vérité abusée » en précisant qu’il ne le lirait pas…. on peut juger du manque de curiosité et de sens de l’objectivité que cela peut dénoter !
Comme il n’est donc question dans le film que de l’histoire d’un homme… le film peut alors en toute tranquillité, renouveler et réactiver l’opprobre à l’égard des magistrats, des policiers, des travailleurs sociaux, et des experts d’Outreau, sans que toutes ces personnes n’aient pu se positionner et faire entendre leur version, qui est, bien entendu, diamétralement opposée.
De plus le film utilise encore et encore la pression-intimidation, comme lors des deux procès, qui imposaient une injonction d’identification aux images des larmes des accusés et la prise en compte de leurs arguments d’innocence, par l’emprise de la culpabilisation sordide de toute la population.
Aujourd’hui on ose aller plus loin, on se permet de culpabiliser les politiques qui ont osé choisir un autre spectacle que « Présumé coupable » le soir de l’avant première, comme ce fut le cas de Martine Aubry, qui est allé voir le spectacle de Djamel Debouzze, comme si la participation à cette séance devait être le passeport incontournable d’un démarrage d’une campagne respectable.
Faudra-t-il que chaque candidat à la candidature à la présidentielle, soit adoubé par l’un des acquittés pour recevoir le passeport de l’humain alors que l’on continue d’humilier et de bafouer la vérité judiciaire des enfants d’Outreau ?

Le discrédit de la parole de l’enfant est forcément renouvelé par ce film et leur vérité judiciaire (12 enfants reconnus victimes de viols, agressions sexuelles, corruption de mineurs et proxénétisme) qui pourrait l’infléchir, subit l’habituelle OMERTA mise en place lors des deux verdicts. Les conséquences sont catastrophiques pour ce qui concerne la protection des enfants (qu’on ne croit plus à cause d’Outreau) en matière de pédo-criminalité.
L’aîné des enfants d’Outreau qui vient de publier « Je suis debout » pour faire connaître cette vérité judiciaire, a subi les foudres médiatiques des puissants avocats de la défense qui ont de nouveau piétiné cette parole en évoquant des contre-vérités que le grand public ne peut déceler.
Le citoyen doit absolument être informé de l’existence de travaux qui apportent contradictoire et objectivité dans cette affaire. Il faut s’indigner des méthodes de propagande utilisée à propos de la diffusion de ce film et refuser une nouvelle manipulation de l’opinion qui met en scène le chantage aux présidentielles, comme nouveau support pervers d’une vérité abusée.

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1-Le rapport de la Commission d’enquête de l’Inspection Générale des Services judiciaires sur l’affaire d’Outreau
2-L’ouvrage de l’expert MCGD « Outreau la vérité abusée » chez Hugo et cie
3-L’ouvrage de l’aîné des enfants d’Outreau Chérif Delay « Je suis debout » écrit avec serge Garde aux éditions du Cherche midi

21 juin 2004 – Outreau – Enfants – Des paroles si fragiles

21/06/2004
Leur témoignage occupe une place clef dans les affaires d’agressions sexuelles et de maltraitance. Mais le procès d’Outreau est venu relancer la vieille suspicion : faut-il les croire ? En vérité, c’est un travail très difficile pour les enquêteurs, les juges, les experts d’apprendre à les écouter.
Exemples
Tête blonde au-dessus du micro, Malvina s’accroche à son silence. Elle n’entend pas la question du magistrat :
« Est-ce que vous vous souvenez de certaines choses ? »
Ce « vous » s’adresse à elle, malgré ses 9 ans. La petite fille est tétanisée. « Votre père, c’est qui ? »
insiste Jean-Claude Monier, président de la cour d’assises du Pas-de-Calais, en ce jour étouffant de mai.
« Vous souvenez-vous du nom de votre papa ? »
Elle veut sortir, file aux toilettes, puis revient. Sur un écran se met à défiler la vidéo de son audition, enregistrée il y a trois ans au commissariat de Boulogne-sur-Mer.
Malvina est l’une des enfants victimes dans le procès d’Outreau : elle accuse de violences sexuelles un couple de voisins et son propre père. A l’écran, l’enquêteur lui demande :
« Tu as dit qu’on t’avait fait des manières ? »
Oui de la tête.
A chaque question, elle mime oui ou non. Fin de la cassette.
Le président, à Malvina :
« Vous ne vous souvenez plus ? Ou vous ne voulez pas en parler parce que ce serait pénible ? »
Elle dit : « Un peu. »
Oui, ce fut « un peu », voire très pénible, pour les enfants d’Outreau de raconter, puis de répéter leur calvaire. Oui, leur récit fut jugé « un peu », puis très crédible par les enquêteurs, les experts psys et le juge d’instruction, qui n’a d’ailleurs pas organisé la moindre confrontation. Pour toutes ces raisons, ce qui devait être le procès de l’un des plus gros réseaux de pédophilie en France a viré au fiasco judiciaire. Il a fallu le coup de théâtre de Myriam Delay, personnage central du dossier, pour que la thèse du réseau s’effondre, le 19 mai, sous le poids des incohérences :
« J’ai menti », a-t-elle dit. Le chauffeur de taxi ne les aurait pas violés.
Ni l’huissier. Ni la boulangère. Ni le prêtre. Ni aucun autre des 13 accusés qui crient leur innocence depuis trois ans. Ils n’étaient que quatre, les couples Delay et Delplanque, dit-elle. Avant de se rétracter.
A l’issue d’un invraisemblable chaos, le président a disqualifié la psychologue Marie-Christine Gryson et ordonné de nouvelles expertises, pour les 21 et 22 juin.
Poursuivis pour viols avec torture et actes de barbarie, certains prévenus risquent de vingt à trente ans de prison.
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2 février 2010 – France-Culture – L’enfance, le secret et la justice