L’inceste de l’autre côté du miroir par Mary Odile

L’Inceste, de l’autre côté du miroir – Du fil du rasoir au fil de la tendresse
Mary Odile
Martine Lani-bayle (Préfacier)

Broché
Paru le : 06/10/2006

Editeur: Quintessence
Collection : Croissance et Développement

ISBN : 2-913281-60-5

EAN : 9782913281608

Nb. de pages : 251 pages

Poids : 375 g

Dimensions : 15cm x 23cm x 2cm
GENCOD : 9782913281608
La présentation de l’éditeur
Le premier des principes éducatifs c’est la prohibition de l’inceste, c’est-à-dire l’interdit d’une relation fusionnelle et possessive avec ses enfants.

Qu’est-ce que l’inceste ? Qu’est-ce que son interdit ? Quand et comment peut-il se transgresser ? Où sont les limites ? Que dit la loi ? Quelles sont nos croyances ? Quelle est la blessure ? Comment peut-on la « panser » et la « penser » individuellement et collectivement ?
À partir de son histoire et à travers différents champs disciplinaires, l’auteur élabore une réflexion globale qui nous emmène au coeur des processus qui sont à l’oeuvre dans notre éducation, notre culture et dans l’élaboration de ce système d’emprise invisible : l’inceste affectif et psychologique. Guidé vers la sortie dans ce labyrinthe de « l’impensable-impensé », le lecteur en ressort avec des outils, des pistes d’actions, la possibilité de sortir de l’impuissance: Le plus précieux est, pour tous, la capacité d’entendre, d’écouter et de ne plus se détourner.
Mariant écriture pour le corps (biographie), écriture pour l’esprit (théorie), écriture pour l’âme (conte), ce livre action à trois niveaux ouvre les yeux, les oreilles et le coeur, fait travailler à l’intérieur, panse et fait penser… forme en quelque sorte.
Un regard nouveau qui bouleverse toutes les représentations communes de ce sujet tabou. Ce livre s’adresse à tous ceux, professionnels, particuliers, parents, victimes… qui s’intéressent de près ou de loin aux questions de l’éducation, de la violence et du vivre ensemble.
Conseillère en Economie Sociale et Familiale dans son parcours initial, Mary Odile est, à 43 ans, professionnelle en la relation d’aide et formatrice. Sa pratique humaniste propose une synthèse de ses différents chemins de formation et s’enracine, entre autres, dans les concepts de la méthode ESPERE de J. Salomé, de la Thérapie Sociale de Ch. Rojzman, des Pratiques d’histoire de vie en formation à l’Université de Nantes, sans oublier son expérience de vie personnelle. Elle est fondatrice et présidente de l’association « Peau d’âmes ».
Les premières lignes Extrait du préambule :

« Qu’est-ce qu’un fou ?
Cette fois je vais te répondre sans tricher : la folie, c’est l’incapacité de communiquer ses idées. Comme si tu te trouvais dans un pays étranger : tu vois tout, tu perçois tout ce qui se passe autour de toi, mais tu es incapable de t’expliquer et d’obtenir de l’aide parce que tu ne comprends pas la langue du pays. »
Nous avons tous ressenti cela un jour.
Nous sommes tous un peu fou, d’une façon ou d’une autre.»

Paulo Coelho.

Je n’ai jamais oublié, jamais refoulé… Mais, je n’ai jamais été autorisée à vivre les traumatismes en tant que tels, parce qu’ils n’ont jamais été reconnus pour ce qu’ils ont été.
Pendant 20 ans j’ai vécu comme anesthésiée : Impossible d’intégrer, ni psychiquement ni émotionnellement, ce que j’avais vécu. J’avais été maltraitée, mais en plus je n’avais pas le droit de le savoir !
L’histoire officielle, celle racontée par mon père et toute la famille, était tout autre. Malgré le départ de ma mère, l’histoire d’une enfance banale, voire heureuse, d’un père courageux qui s’est dévoué et sacrifié… J’étais contrainte d’adhérer à cette version. J’y ai cru pendant longtemps, car l’autre, celle dont j’étais la seule à être le témoin, je n’avais personne pour l’écouter, encore moins pour la croire. Condamnée au secret, ligotée psychologiquement, les symptômes corporels dont j’ai souffert toute ma vie étaient le signe de ma résistance au « négationnisme familial et culturel ». Ils disaient inlassablement ce qu’il m’était interdit de dire. Ils étaient le signe que je restais vivante, que je n’avais pas oublié, parce que ma tragédie, qui fut aussi ma délivrance, c’était précisément de ne pouvoir oublier.

8/ Niki de Saint-Phalle, témoigner pour prévenir par Questions d’inceste

Page 223

Ce n’est que « cinquante ans après » qu’elle a décidé de révéler Mon Secret, en forme de lettre à sa fille Laura :
J’ai écrit ce livre d’abord pour moi-même, pour tenter de me délivrer enfin de ce drame qui a joué un rôle si déterminant dans ma vie. Je suis une rescapée de la mort, j’avais besoin de laisser la petite fille en moi parler enfin. Mon texte est le cri désespéré de la petite fille.
…/…
Un après-midi, son père décide d’aller chercher une canne à pêche dans une cabane, au jardin, elle part avec lui.
Subitement, les mains de mon père commencèrent à explorer mon corps d’une manière tout à fait nouvelle pour moi. Honte, plaisir, angoisse et peur me serraient la poitrine. Mon père me dit : ne bouge pas. J’obéis comme une automate. Puis avec violence et coups de pied, je me dégageais de lui et courus jusqu’à l’épuisement dans le champ d’herbe coupée. Il y eut plusieurs scènes de ce genre ce même été. Mon père avait sur moi le terrible pouvoir de l’adulte sur l’enfant. J’avais beau me débattre, il était plus fort que moi.
Après ce récit de l’acte incestueux, Niki aborde dans cette lettre les questions qui se sont posées pour elle, questions que pose chaque enfant abusé. « Mon amour pour lui se transforma en mépris : il avait brisé en moi la confiance en l’être humain. » Pensait-il ainsi montrer son amour à Niki ? Croyait-il « honorer » sa fille? Voulait-il satisfaire son plaisir ? « Ce n’est pas simple », souligne-t-elle. En effet, il avait la possibilité de le trouver ailleurs, bien que l’adulte puisse éprouver une jouissance particulière avec un enfant (« over », écrit-elle, soit plus littéralement sur ou par-dessus un enfant).
…/…
Mon père est devenu objet de haine, déclare Niki. Le monde m’avait montré son hypocrisie : j’avais compris que tout ce qu’on m’enseignait était faux. Il fallait me reconstruire en dehors du contexte familial, au-delà de la société.
Tel est le dilemme : elle sentait qu’elle devrait ou pourrait le faire hors de sa famille, mais que signifierait cette rupture par rapport au lien familial ? Ce lien qui l’avait construite et avait fait d’elle une jeune fille charmante et jusqu’alors bien insérée dans la société ? Au-delà de la société ? Exilée ? C’est précisément la question à laquelle nous sommes confrontés avec les jeunes filles accueillies à la MAJB, mais « désinsérées » de leur milieu familial.
Puisque je n’étais pas encore parvenue à extérioriser ma rage, mon corps devint la cible de mon désir de vengeance.
…/…
L’agressivité qui était en moi commençait à sortir. Je me mis à faire passer la violence dans mon œuvre.
Elle n’échappera pas à un séjour en clinique psychiatrique. Peu après en être sortie, elle reçoit une lettre de son père, pris par le remords : « Tu te rappelles certainement que lorsque tu avais onze ans, j’ai essayé de faire de toi ma maîtresse ? » À ce moment-là, elle n’en avait plus souvenir : façon de se protéger contre une « vérité insupportable » comme elle semble l’affirmer? Seules les images d’un père élégant, séduisant les amies de sa mère, voire les bonnes, lui restaient en mémoire. Niki a pourtant connu la psychiatrie avant que son père ne fasse resurgir le souvenir, indice qu’il n’était, sans doute, pas assez bien enfoui.
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Autres billets sur Niki de Saint-Phalle
1/ Niki de Saint-Phalle : Mon secret
2/ Mon secret de Niki de Saint-Phalle réédité
4/ Autoportrait
5/ L’interdit
6/ Forme de pardon

7/ Les traces du viol dans l’œuvre de Niki de Saint-Phalle Par Rennie Yotova