Mathilda de Mary Shelley est un récit psychologique d’inspiration partiellement autobiographique et une nouvelle sur le thème de l’inceste

La réception de Dante à l’époque Romantique en Grande-Bretagne :
transformations de genre dans Mathilda et Valperga de Mary Shelley

Par Dr Antonella Braida

Richard Rottwell, Portrait de Mary Shelley, 1840. National Portrait Gallery, London

Ecrite en deux mois, d’août à septembre 1819, Mathilda est un récit psychologique d’inspiration partiellement autobiographique et, surtout, une nouvelle sur le thème de l’inceste.
Découverte et publiée par Elizabeth Nitchie en 1959, la nouvelle a suscité un vif intérêt par la critique par rapport à l’autobiographie et à la possibilité de l’associer aux rapports entre Mary, son père William Godwin et Percy Bysshe.
La protagoniste, la narratrice intra-diégétique, Matilda, ouvre la narration qui s’adresse à son amie Woodville mais aussi au lecteur potentiel, par ces mots, l’histoire étant présenté : « as if I wrote for stangers »17.
Matilda décrit un sens de mort imminente et raconte à l’aide de retours en arrière les origines de son « fate […] governed by necessity, a hideous necessity » (p.152). Après la mort de sa mère et une enfance passée en isolation mais sous l’influence saine d’une nature écossaise à la Wordsworth, Matilda attend avec espoir la réunion avec son père à l’âge de 16 ans. Après un premier moment de grâce, ils se séparent et, avant de se suicider, le père admet l’incapacité de la distinguer du souvenir de sa mère. Il s’agit, alors, d’inceste imaginé, mais la confession du père détruit par elle-même l’identité que Matilda vient de recréer.

Ses actions, après la mort du père, consistent en la simulation du suicide pour s’isoler de la société et pour attendre la mort. Ce projet est empêché par la rencontre avec Woodville, un homme qui essaye de la consoler et de comprendre la nature de sa souffrance. Dans les deux cas, la destruction de Matilda n’est pas le résultat d’un acte authentique, comme dans la pièce Beatrice Cenci de Percy Bysshe, mais d’une révélation. Si elle n’était pas parvenue à obliger son père à admettre son amour incestueux, son intégrité et son identité auraient pu être préservées. De la même manière, le projet d’isolement et de silence est empêché par les questions pressantes des Woodville, questions qui sont à l’origine du récit sincère que fait Matilda.

17 Mary Wollstonecraft, Mary and Maria, Mary Shelley, Mathilda, ed. Par Janet Todd, London,
Penguin Books, 1991, 2004 ed. Les citations du roman sont tirées de cette édition.

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Référence électronique : Antonella Braida, « La réception de Dante à l’époque romantique en Grande-Bretagne : transformations de genre dans Mathilda et Valperga de Mary Shelley », p. 83-97, e-CRIT3224 [En ligne], 1, 2010, mis en ligne le 7 janvier 2010. URL : http://e-crit3224.univ-fcomte.fr
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Page 36

Le soleil brillait sans chaleur. Du haut de mon rocher, je voyais en contrebas le muret du potager où mon, c’était le frère de mon grand-père, j’avais neuf ou dix ans, je ne sais plus, en tout cas mon grand-père était déjà mort parce que, de son vivant, personne n’aurait osé, ce qui est sûr aussi, c’est que j’étais petite – « Tu n’as pas encore de poils », avait-il remarqué –, chaque jour il me demandait de l’attendre devant le potager où il jardinait, je restais là sans oser désobéir, souriant de peur de le fâcher, jusqu’à ce qu’il vienne. J’avais fini par tout raconter à ma grand-mère, elle m’avait fait baisser la voix – « surtout, ne le répète jamais ! Tu m’entends ? Jamais » –, j’avais mis trente ans à l’écrire, et encore, quelques lignes au détour d’un chapitre, un cavalier maudit dans mon carnet de bal, c’était en souvenir de cette scène que Georges m’avait demandé de faire la voix off de son film, j’en étais certaine, et non, comme il me l’avait dit, parce qu’il aimait ma voix, simplement, mais je me trompais peut-être.

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