Etre juré d’assises, "une expérience d’une rare intensité, qui marque à vie"

22.02.10 | 16h05

Après une rencontre organisée par Le Monde dans ses locaux sur les jurés d’assises, lundi 15 février, nous avons demandé aux internautes ayant été appelés à remplir ce « devoir citoyen » de témoigner de leur expérience.
La nécessaire clémence, par Jean-Baptiste P.
J’ai été juré il y a deux ans à la cour d’assises de Versailles. On a traité trois procès : deux braquages et un viol incestueux. Lors la sélection, qui se fait en deux fois, j’étais à la fois anxieux et impatient. Le jour J, j’ai été frappé par la solennité de l’organisation et son protocole. Pendant les débats, on est confronté à la violence et à la misère, mais aussi à la dignité de certains témoins, à leur incompréhension. La grande leçon, c’est surtout la clémence nécessaire envers des coupables, en fonction du contexte. Viol sur mineure : facile, il faut donner la perpétuité, non ? Eh bien non. Huit ans. Huit ans, c’était juste : cette clémence est le résultat de la loi, de la justice. C’est ne pas ajouter du malheur au malheur, de la vengeance à la justice, de l’injustice à la colère. C’est croire en l’espoir dans l’être humain. Mais c’est aussi frustrant car on comprend que la justice ne guérit pas les plaies, elle les gère. J’en suis ressorti avec une plus grande compréhension et un plus grand respect pour la justice. C’est un des piliers d’une société civilisée, il faut la défendre et garantir son indépendance.
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2 février 2010 – France-Culture – L’enfance, le secret et la justice

Sur les docs
par Jean Lebrun
émission du 2 février 2010
de 17h à 17h15

Questions à la Justice – Réponses de la Justice (2/5) – L’enfance, le secret et la justice

Un documetnaire de Jean-François Laé et Christine Diger
Dans les procès pénaux impliquant des mineurs, avant le tribunal, avant l’instruction, avant la plainte au commissariat, avant de fabriquer son dossier pour se défendre, il y a ce long parcours de la révélation. En effet, des années peuvent s’écouler avant que la parole n’éclate, ceinturée de peurs et d’incertitudes, d’autant lorsqu’on a dix ou treize ans et que l’on cherche les mots pour dire les sévices.
Chantal – qui a aujourd’hui vingt-trois ans – raconte comment elle a mis des années avant de pouvoir ouvrir sa boîte à secret devant son père, puis devant un professeur de français, puis devant une amie, avant d’oser enfin composer un numéro vert anonyme ; après cet appel, quatre ans s’écoulent encore avant qu’un jugement intervienne.
A qui en parler ? Qui peut aider ? Comment contrôler cet événement sans que le stigmate infâmant se retourne contre soi ?
A chaque étape, les questions surviennent : que dire pour confirmer les actes d’agression lorsqu’il n’y a aucune preuve ? Que vaut la parole d’une adolescente de treize ans par rapport à celle d’un adulte ?
Ce documentaire, réalisé au Tribunal pour enfants de Bobigny, interroge ce long chemin : la crédibilité du « témoignage de soi sur soi » , la recherche nécessaire d’un locuteur qui gardera par devers lui, sans fuite et sans risque de dérapage, le secret aux limites du déséquilibre.
Avec :
Chantal, étudiante en sciences sociales, plaignante ;
Laure Vermeersch, juge pour enfants au Tribunal de Grande Instance de Bobigny ;
Didier Seban, avocat à la cour de Paris, spécialisé dans la défense des enfants ;
Cédric Tormard, conseiller pédagogique et éducatif dans un collège du XVIIIème arrondissement,
et le centre d’appel 119, qui recueille les paroles des jeunes en difficultés.
Production : Jean-François Laé
Réalisation : Christine Diger
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21 juin 2004 – Outreau – Enfants – Des paroles si fragiles