Le Parlement érige l’inceste en une infraction spécifique du Code pénal

Article de veille publié le mercredi 27 janvier 2010.
Rédigé par Net-iris et classé dans le thème Pénal.

Députés et sénateurs ont définitivement adopté la proposition de loi Fort, visant à identifier, prévenir, détecter mais aussi lutter contre l’inceste sur les mineurs. Le texte entend également améliorer l’accompagnement médical et social des victimes.

Fruit d’une longue réflexion et d’un travail approfondi en collaboration avec les professionnels, associations et les victimes d’inceste, la proposition de loi sanctionne et identifie l’inceste dans le Code pénal tout en améliorant les dispositifs de prévention, comme l’avait recommandé le rapport Estrosi en 2005.

On notera que le texte ne fait pas de distinction d’âge entre le jeune mineur et celui proche de la majorité, de sorte que toute atteinte sexuelle incestueuse sur un mineur de moins de 18 ans est punissable de la même manière.
Définition du périmètre de l’inceste dans le Code pénal

Actuellement, le Code pénal ne réprime pas l’inceste et les agressions sexuelles incestueuses en tant que telles, puisqu’elles sont sanctionnées comme les autres viols et les autres agressions sexuelles. Cependant, le lien filial ou la relation d’autorité entre l’auteur des faits et la victime constitue une circonstance aggravante. En effet, le viol est puni de 15 ans de réclusion criminelle par l’article 222-23, alors que le viol commis par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime est passible, en application de l’article 222-24, de 20 ans de réclusion criminelle.

La réforme tend à consacrer la spécificité de l’inceste en droit pénal sans aggravation de la peine principale : les agressions sexuelles ou les atteintes sexuelles commises sur mineur par une personne de sa famille ou assimilée seront qualifiées d’inceste.
Le nouvel article 222-31-1 du Code pénal dispose que « les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ».

Selon l’article 227-27-2, les infractions définies aux articles 227-25, 227-26 et 227-27 sont qualifiées d’incestueuses lorsqu’elles sont commises au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une soeur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait.

Par ailleurs, l’article 1er précise la notion de contrainte dans les agressions sexuelles et les viols. Ainsi, l’article 222-22-1 du Code pénal précise que la contrainte morale résulte, en particulier, « de la différence d’âge existant entre une victime mineure et l’auteur des faits ainsi que de l’autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur cette victime », de sorte que la quasi-totalité des actes incestueux commis sur un mineur est désormais réputée commis sous l’emprise d’une contrainte et sera qualifiée de viol ou d’agression sexuelle (et non plus d’atteinte sexuelle sans violence, menace, contrainte ni surprise).
Lorsque l’atteinte sexuelle incestueuse aura été commise par une personne titulaire de l’autorité parentale sur le mineur, la juridiction de jugement se prononcera obligatoirement sur le retrait total ou partiel de cette autorité, vis-à-vis de cet enfant, mais aussi sur le retrait de cette autorité en ce qu’elle concerne les frères et soeurs mineurs de la victime.
Amélioration de la prévention
Afin de renforcer le rôle de l’école dans la prévention de l’inceste, l’article 3 modifie le Code de l’éducation afin que les écoles, les collèges et les lycées assurent la mission d’information sur les violences et une éducation à la sexualité.
Quant à l’article 4, il vise à conforter le rôle de l’audiovisuel public dans l’information en matière de santé et de sexualité.
L’accompagnement des victimes

Selon l’article 5 de la proposition de loi, un administrateur judiciaire sera nommé dès qu’une plainte pour inceste sera déposée. La systématisation de cette mesure doit permettre de protéger au mieux l’intérêt de l’enfant.

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Le Parlement inscrit l’inceste sur mineurs dans le code pénal

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kimon 28.01.10 | 19h48

Est ce bien cela qui changera l’ordre des choses ? Il y a des zones où il s’agit d’une tradition muette d’avant Clovis. Maintenant envoyons y des ethnologues

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Jean-Philippe L. 28.01.10 | 07h49
@ Laetitia V. Concernant les dossiers mettant en cause des mineurs, la règle est le huis-clos, total ou partiel, si la victime le demande. C’est au cours de l’instruction – l’enquête – qu’il faut se faire connaître et acquérir ainsi, si le juge l’estime nécessaire, un éventuel statut de témoin au procès.

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Laetitia V. 28.01.10 | 04h13

Question : Les procès pour « viol aggravé » ou « attouchements sexuels commis par un ascendant » sont-ils ouverts au public ? peut-on plaider ou tout du moins intervenir pour apporter quelques lumières fondamentales pour aider une amie en détresse, alors que nous n’avons aucun titre reconnaissant certains savoir faire? Elle même n’a pas conscience de certaines choses qui me paraissent évidentes. Je voudrais l’aider à aller mieux et à faire payer son sans cœur de grand père. Merci de m’aider…

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Thib 27.01.10 | 23h14
Cette loi est sûrement une réponse à un problème plus sérieux que le simple manque du mot dans le code pénal… Peut-être une réponse à des difficultés avec les magistrats, avocats, policiers etc. Mais, ce n’est sûrement pas qu’un problème de droit.

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Ivan 27.01.10 | 22h04

Le Parlement accouche d’un non-évènement, en gestation depuis 2004 (cf proposition de loi Estrosi) : aucune changement par rapport aux peines encourues pour viol ou agression sexuelle par ascendant ou personne ayant autorité. Et rappelons que l’inceste reste parfaitement légal entre majeurs !

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Rue des Mers 27.01.10 | 15h22
Pour les victimes d’inceste, et notamment les victimes d’inceste au delà de quinze ans, ce texte à valeur symbolique et juridique est très important. C’est très différent de porter plainte pour viol ou attouchements, dans un contexte pervers avec séduction par exemple, que de pouvoir porter plainte pour inceste. Je pense que cette loi aidera certains victimes. Elle me semble un progrès très important.

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Jean-Philippe L. 27.01.10 | 13h27

Une infraction sexuelle, soit. Mais ça ne rend pas le texte utile. On consolide seulement un peu plus… L’insécurité des juges qui voient une nouvelle infraction se superposer à ce qui existe déjà. Une mauvaise qualification et c’est un motif de nullité, en tout cas de recours. Une peine inadaptée et c’est l’impossibilité de l’exécution. La réponse à l’opinion publique n’est pas une bonne raison de légiférer.

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thierry g. 27.01.10 | 07h00
l’inceste des adultes est autorisé ?
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precision 27.01.10 | 03h25
Actuellement l’auteur d’inceste peut deja etre mis en inculpation pour le motif viol (ou attouchement) sur mineur de moins de 15 ans par personne exercant une autorite, soit un viol (15 ans) avec au moins deux circonstances aggravantes (peine x 2), donc peine maximale (30 ans + 20 ans de surete) encourue. Cette loi n’apporte donc rien ni en terme pratique, ni en terme juridique. Juste du flou dans la qualification des faits…
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Gilles F. 27.01.10 | 02h03
C’est totalement stupide. L’inceste renvoie à un interdit fondamental de nature symbolique. Le viol est par contre un crime reconnu par le code pénal. Le code pénal parle de « viol par personne ayant autorité » pour renvoyer à ce qui relève d’actes incestueux. Pour travailler avec des jeunes filles « incestées », je n’en ai jamais connues aucune pour qui cela posait question que le mot inceste ne figure pas dans la loi. On fait entrer ainsi du symbolique dans la loi. Absurde !
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Thib 27.01.10 | 02h01
Ça mériterait un grand développement de la part du Monde. Il s’agit là, de la confrontation de deux cultures et l’une d’entre elle l’a emporté sur l’autre. Le problème étant que c’est complètement idiot de porter le débat dans le champ du code pénal. Les victimes savent bien que la société n’a pas réponse à tout et que le procès ne permet de tout savoir. Les procès sont souvent barbares, les avocats et procureurs font ce qu’ils veulent et vont jusque-là où ils veulent… Terri-fiant !
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Un Jeune Eusaikoi 26.01.10 | 22h25

Encore une loi d’affichage et compassionnelle qui n’apporte rien et ne débouchera sur rien. Il faudra faire une loi interdisant les crimes commis le mardi, au nom des milliers de victimes de crime du mardi.
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