L’inceste dans la loi, et moins puni par Slate.fr

Mardi 9 Février 2010

Une nouvelle loi vient de réformer silencieusement le droit pénal qui l’a révélé. Il explique que jusque-là, l’inceste existait en tant qu’agression sexuelle « aggravée » (« commise par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime », et encore aggravée si la victime est un(e) mineur(e) de quinze ans). Le mot inceste en tant que tel n’existait pas. Introduisant l’inceste dans le code pénal — qui y existait déjà en creux, mais pas nommé comme tel. C’est Maître Mô, blogueur avocat du barreau de Lille,

Marie-Louise Fort, député UMP de la 3e circonscription de l’Yonne s’est alors rendue compte de l’absence du mot et décidé de remettre un rapport déposé en janvier 2009 (pdf), « reprenant largement les conclusions d’un précédent rapport du député Christian Estrosi », rapporte Maître Eolas. (Lire l’édifiant décryptage du discours du ministre sur Slate).

Maître Eolas commente le rapport :

« La catastrophe est annoncée dès la page 11 : « La présente mission, considérant que l’inceste n’est pas seulement la circonstance aggravante d’un viol ou d’une autre agression sexuelle mais aussi un élément constitutif de ceux-ci, suggère pour sa part d’intégrer la notion de l’inceste aussi dans la définition de ces infractions. » Ceci étant justifié par l’argument hautement juridique suivant: « La mission souhaiterait rappeler que la loi a le pouvoir de casser le tabou en le nommant.(rapport, p.12) La loi-Brice de Nice, en somme. »

Conséquences

1) Cela révolutionne un peu le droit pénal. « Un point fondamental du droit pénal est qu’un élément constitutif d’une infraction ne peut être en même temps une circonstance aggravante de cette infraction. » Probablement par erreur, et puisque « l’inceste n’est pas seulement la circonstance aggravante d’un viol ou d’une autre agression sexuelle mais aussi un élément constitutif de ceux-ci », l’inceste devient un viol ou une agression sexuelle qualifiée. Moins grave donc qu’auparavant.

Exemple précisé par Maître Mô :

« un père viole sa fille chez eux. Jusqu’au 27 janvier 2010, c’était un viol (quinze ans) aggravé par la double circonstance de son ascendance et de la minorité de sa fille : vingt ans encourus.

Aujourd’hui, c’est un viol incestueux : quinze ans.

S’il ne l’a « que » agressée sexuellement, il encourait dix ans, une seule circonstance aggravante faisant passer la peine de cinq à sept ans, deux [circonstances] la portant à dix ans.

Aujourd’hui, il a commis une « agression sexuelle incestueuse » : cinq ans. »

[Lire l’article complet sur le blog de Maître Eolas]

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Qu’est-ce que l’inceste par ceci… cela… mais vu par moi

Tout au long des trois derniers articles, nous sommes restés la tête dans le guidon à causer de la proposition de loi (devenue officiellement loi depuis sa publication au JO) qui, entre autre chose fait entrer l’inceste sur mineur dans le code pénal avec ce merveilleux articles qui fait s’arracher les cheveux à de nombreux commentateurs :
Art. 222-31-1.
Les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait.
Donc, le législateur pose certaines bornes à sa définition :
l’inceste ne peut être qu’un viol ou une agression sexuelle
l’acte doit avoir lieu « au sein de la famille » ; ce qui suscite bien des interrogations quant à l’interprétation à donner. La victime est forcément mineur ; donc si votre père vous viole mais que vous êtes majeur, vous n’êtes pas concerné par ce texte.

L’auteur des faits ne peut être qu’ « un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait « .

En l’absence d’autres éléments, l’auteur peut aussi bien être majeur que mineur la notion de personne ayant une autorité de droit ou de fait sur la victime permet d’élargir énormément le champ du texte ; reste toutefois à savoir comment cette condition jouera avec celle qui veut que les faits doivent être commis « au sein de la famille ».
Tout n’est qu’une question d’interprétation…
Mais laissons un petit peu de côté le droit pénal, la boulette des parlementaires et les commentaires qui vont avec…
Le code pénal a donc désormais, avec les lacunes apparentes ou un peu difficiles à déceler, sa définition de l’inceste…
Toutefois, il existe d’autres outils qui définissent différemment la notion…
Un peu de criminologie pour commencer,
Si j’en crois le cours que j’ai pris en note l’année dernière, il faut partir sur le chemin des crimes et délits sexuels (à ne pas entendre au sens que donne le code pénal français) qui contiennent différentes hypothèses :
• il peut d’abord s’agir d’actes sexuels dont le déroulement peut être considéré comme déviant, citons notamment des fixations sur des partenaires « inadéquats » (ex: les situations incestueuses, la pédophilie, la gérontophilie, …) ou des déformations de l’acte sexuel lorsque l’orgasme n’est obtenu que par des moyens de substitution ou de dérivation ou des substituts aux partenaires humains (parmi les plus connus la zoophilie)
• il peut aussi être question d’actes de la vie sexuelle se déroulant « normalement » mais susceptible de heurter la morale commune d’une société commune comme par exemple le proxénétisme ou la polygamie…
• les activités auto érotiques peuvent également être sanctionnées lorsqu’elles sont publiques
Le viol, toujours selon ce cours, semble occuper une place à part,
en effet, le caractère adéquat du partenaire est bien présent ; il y a, le plus souvent, une « normalité » de l’acte sexuel mais l’infraction réside dans le mode de conduite utilisé pour accomplir l’acte.
Les incestes et les relations incestueuses correspondent à une même classification criminologique qui renvoie plus ou moins à un viol intra-familial…
Il s’agit de relations sexuelles entre un père et sa fille ou son fils, entre une mère et son fils ou sa fille ou entre frères et soeurs…, on parle aussi d’inceste en présence d’un beau-père ou d’une belle-mère…, et parfois, on élargit un peu le cercle familial…
Mais, on voit tout de suite des différences entre la définition qui figure désormais dans le code pénal et celle-ci.
Les criminologues semblent distinguer trois types de « contextes criminogènes » :
1- l’inceste viol pédophile
2- l’inceste liaison, souvent le cas du père qui, petit à petit, remplace la mère par la fille ; il peut même y avoir parfois une soumission sexuelle passive de la part de la victime
3- les situations mixtes
Même si tout cela reste largement critiquable, cette approche a au moins le mérite de montrer la complexité du problème : il n’existe pas un seul type d’inceste, tout n’est pas tout blanc ou tout noir… Il n’y a pas d’un côté la pauvre victime et de l’autre le méchant coupable…
Et, qu’en dit le dico ?
Nombreuses sont les personnes qui m’ont répété : « quand tu ne sais pas quelque chose, commence par regarder dans le dico » comme si la vérité ne pouvait être ailleurs et que la lecture de quelques lignes allait m’aider…
Petit Larousse grand format 2005 (je n’en ai pas d’autre sous la main ; au passage, assez marrant (ou pas) de noter que le petit larousse est un grand format)
Inceste : n.m. (lat. incestus, de castus, chaste)
Relations sexuelles entre un homme et une femme lié par un degré de parenté entraînant la prohibition du mariage.
Il s’agit donc ici de relations sexuelles ; reste à savoir ce qu’il faut entendre par là.
le même ouvrage défini la relation comme le lien existant entre des choses ou des personnes.
Ce qui impliquerait donc un champ d’application beaucoup plus large que le viol ou l’agression sexuelle.
Avec cette définition, l’inceste ne semble pouvoir avoir lieu qu’entre un homme et une femme…
Sauf à considérer que les rédacteurs du dico n’ont pas connaissance de l’homosexualité (ce dont on peut raisonnablement douter étant donné que la notion figure quelques pages auparavant), il faut bien constater que, là en revanche, le champ d’application diminue.
Enfin, toujours en analysant cette définition, l’inceste aurait un lien avec la prohibition du mariage entre certaines personnes liés par un lien de parenté.
L’inceste, en tant que tel, ne peu avoir lieu qu’entre eux.
Mais qu’en est il ???
Code Civil 2010, articles 161 et suivants…
En ligne directe, le mariage est prohibé entre tous les ascendants et les alliés dans la même ligne directe.
En ligne collatérale, le mariage est prohibé entre le frère et la soeur mais également entre l’oncle et la nièce, la tante et le neveu.
Voilà, si on s’arrête à la définition donnée par le dico, les seuls cas d’inceste possible…
[..]
Bref, la question demeure : qu’est ce que l’inceste ?
Et, à en lire des commentaires ici et là, chacun semble avoir sa propre définition.
Pour lire la suite de l’article, cliquez sur le logo de ceci… cela— vu par moi…