Le président de l’Assemblée dénonce l’usage trop fréquent de la procédure d’urgence ou du vote bloqué par le Nouvel Obs

Le coup de gueule de Bernard Accoyer contre le gouvernement
Le président de l’Assemblée dénonce l’usage trop fréquent de la procédure d’urgence ou du vote bloqué. Et menace à son tour…
NOUVELOBS.COM | 09.02.2010 | 19:25
Par Estelle Gross

Le gouvernement a-t-il trop souvent recours à la procédure d’urgence pour faire voter les lois ? C’est en tout cas ce que pense le président de l’Assemblée Nationale. Bernard Accoyer (UMP) est sorti de sa réserve, mardi 9 février pour rappeler à l’ordre le gouvernement, menaçant de s’opposer à lui. Trop de procédures d’urgence, des députés absents lors des examens, le recours au vote bloqué… la colère gronde.
« J’ai solennellement fait savoir au gouvernement que nous ne pouvions pas continuer à travailler ainsi, pour la qualité de la loi et la qualité du débat démocratique contradictoire », a déclaré Bernard Accoyer lors de son point presse hebdomadaire, prévenant qu’il « n’hésiterait pas à recourir » à son droit d’opposition.
Parmi les lois adoptées selon la procédure d’urgence ces derniers mois : la loi pénitentiaire, la loi relative à la gendarmerie nationale, ou encore la loi sur l’audiovisuel public, sans oublier la loi création et internet et la réforme de l’hôpital… En somme, souvent les projets les plus contestés.

« Le parlement fait de la figuration »

Bernard Accoyer a répété qu’il « suspendrait les séances » lorsque la majorité serait absente pour l’examen des projets de loi et a de nouveau critiqué le recours au vote bloqué, procédure du règlement qui permet à la majorité de s’absenter des débats sur les projets de loi, en reportant le vote sur l’ensemble du texte à une seule séance.
La présidence de l’Assemblée souligne que 38% des textes sont votés selon la procédure d’urgence, contre 22% sous la précédente législature. Un avertissement qui ravit le groupe socialiste.
« Enfin ! Enfin le président de l’Assemblée dit tout haut ce que les parlementaires disent tout bas depuis maintenant des mois », commente Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale. Selon lui, « le parlement fait de la figuration ». « Le gouvernement a recours systématiquement à la procédure d’urgence ou au vote bloqué ce qui lui permet d’étudier uniquement les amendements qui lui plaisent », dénonce-t-il.
Jean-Marc Ayrault dénoncé également l’inflation législative : « Le gouvernement fait de la communication, nous ne traitons rien et les lois s’empilent les unes sur les autres ». Et de citer en exemple la loi Loppsi 2, défendue ce matin-même par Brice Hortefeux : « Il s’agit de la sixième loi sur la sécurité depuis le début du mandat de Nicolas Sarkozy, et les problèmes sont toujours là ! », s’agace le président du groupe PS.
D’après lui, le recours à la procédure accélérée émane directement de la volonté de Nicolas Sarkozy : « Le président n’aime pas le Parlement, il le connaît mal et surtout il n’aime pas les autres pouvoirs ». Nouvelobs.com a également tenté de joindre Henri de Raincourt, secrétaire d’Etat chargé des relations avec le parlement, ainsi que le président du groupe UMP à l’Assemblée Jean-François Copé, mais nos demandes sont restées sans réponse.
Le député socialiste Jean-Jacques Urvoas soulignait déjà, dans une note publiée sur son blog le 20 janvier dernier, la hausse des procédures d’urgence. « On a fini par perdre l’habitude des secondes lectures », ironisait-il. « Si depuis le mois de juin 2007, 117 lois ont été adoptées par l’Assemblée nationale, seulement 40% ont bénéficié de cette possibilité car dans 60% des cas, le gouvernement a décrété l’urgence qui réduit le débat à une seule lecture par chambre », avance-t-il. « Voilà qui ne facilite pas l’étude approfondie des textes qui sont en plus de plus en plus longs et toujours aussi complexes », conclut-il.

« Droit au but »

« Les lois en pâtissent forcement puisqu’elles subissent beaucoup moins de modifications », note pour sa part Jean Gicquel, spécialiste du droit constitutionnel. Il souligne que cette prise de position du président de l’Assemblée est « dans l’esprit de la révision de 2009 qui confère plus de pouvoir au parlement ».
Selon les nouvelles dispositions entrées en vigueur le 1er mars 2009 avec la loi sur le Parlement, si le gouvernement a décidé d’engager une procédure accélérée, après une seule lecture par chacune des deux chambres, le Premier ministre ou, pour une proposition de loi, les présidents des deux assemblées, agissant conjointement, ont la faculté de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion. Le texte élaboré par la commission mixte peut être soumis par le gouvernement pour approbation aux deux assemblées. Aucun amendement n’est alors recevable sauf accord du gouvernement. Si la commission mixte ne parvient pas à l’adoption d’un texte commun, le gouvernement peut, après une nouvelle lecture par l’Assemblée nationale et par le Sénat, demander à l’Assemblée nationale de statuer définitivement. Il faut noter que le temps de discussion entre la proposition de loi et son examen a été allongé à 6 semaines pour faciliter les consensus.
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L’inceste dans la loi, et moins puni par Slate.fr

Mardi 9 Février 2010

Une nouvelle loi vient de réformer silencieusement le droit pénal qui l’a révélé. Il explique que jusque-là, l’inceste existait en tant qu’agression sexuelle « aggravée » (« commise par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime », et encore aggravée si la victime est un(e) mineur(e) de quinze ans). Le mot inceste en tant que tel n’existait pas. Introduisant l’inceste dans le code pénal — qui y existait déjà en creux, mais pas nommé comme tel. C’est Maître Mô, blogueur avocat du barreau de Lille,

Marie-Louise Fort, député UMP de la 3e circonscription de l’Yonne s’est alors rendue compte de l’absence du mot et décidé de remettre un rapport déposé en janvier 2009 (pdf), « reprenant largement les conclusions d’un précédent rapport du député Christian Estrosi », rapporte Maître Eolas. (Lire l’édifiant décryptage du discours du ministre sur Slate).

Maître Eolas commente le rapport :

« La catastrophe est annoncée dès la page 11 : « La présente mission, considérant que l’inceste n’est pas seulement la circonstance aggravante d’un viol ou d’une autre agression sexuelle mais aussi un élément constitutif de ceux-ci, suggère pour sa part d’intégrer la notion de l’inceste aussi dans la définition de ces infractions. » Ceci étant justifié par l’argument hautement juridique suivant: « La mission souhaiterait rappeler que la loi a le pouvoir de casser le tabou en le nommant.(rapport, p.12) La loi-Brice de Nice, en somme. »

Conséquences

1) Cela révolutionne un peu le droit pénal. « Un point fondamental du droit pénal est qu’un élément constitutif d’une infraction ne peut être en même temps une circonstance aggravante de cette infraction. » Probablement par erreur, et puisque « l’inceste n’est pas seulement la circonstance aggravante d’un viol ou d’une autre agression sexuelle mais aussi un élément constitutif de ceux-ci », l’inceste devient un viol ou une agression sexuelle qualifiée. Moins grave donc qu’auparavant.

Exemple précisé par Maître Mô :

« un père viole sa fille chez eux. Jusqu’au 27 janvier 2010, c’était un viol (quinze ans) aggravé par la double circonstance de son ascendance et de la minorité de sa fille : vingt ans encourus.

Aujourd’hui, c’est un viol incestueux : quinze ans.

S’il ne l’a « que » agressée sexuellement, il encourait dix ans, une seule circonstance aggravante faisant passer la peine de cinq à sept ans, deux [circonstances] la portant à dix ans.

Aujourd’hui, il a commis une « agression sexuelle incestueuse » : cinq ans. »

[Lire l’article complet sur le blog de Maître Eolas]

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