Film TV – La fille préférée de Caroline Bottaro – 2000

Director : Lou Jeunet
Writers : Caroline Bottaro
Release Date : 26 April 2000
Also Known As : Combats de femme
Runtime : 90 min
Country : France
Company : M6 Métropole Télévision

Médias 26/04/2000 à 23h40
Un zeste d’inceste. La réalisatrice évite le mélo grâce à la force de ses images.
« La fille préférée », téléfilm, M6, 20 h 50.
POTEL Isabelle
La difficulté d’une jeune femme à révéler que son père abusait d’elle quand elle était enfant. Loin d’illustrer un dossier de presse comme c’est souvent le cas avec ce type de sujet lourdement sociétal, Lou Jeunet filme des états. La surdité des proches qui peu à peu se fissure, l’incrédulité paternelle (intéressant Maurice Benichou) se transformant en rage froide, la culpabilité au travail dans le corps d’Agnès qui hésite encore entre parler ou dépérir. Face à ce type de commande, nombre de téléfilms se mettent à la remorque de dialogues préfabriqués et la plupart du temps atrocement naturalistes. Lou Jeunet, forte d’un authentique désir de cinéma, fait confiance à ses images. Pour évoquer l’ambiguïté vertigineuse d’un amour paternel virant à la prise de possession sexuelle, la réalisatrice incorpore à son film un autre film, images vidéo tournées (volées ?) par le père, des années auparavant, où l’on voit Agnès au cours de danse : remontée du temps qui permet de traquer les gestes d’une enfance à son point de bascule, quand la confiance commence à s’effriter sous l’acide d’une peur montante. Pour exprimer la tension d’un esprit emprisonné, la visite d’Agnès aux girafes du zoo de Vincennes, autres élancées captives. Et comme bouée de sauvetage, le thème de Peau d’âne » Le film trouve une passeuse idéale en Laurence Côte, qui met en mouvement une réserve presque effrayante, une détresse sans cris, ni mots, ni haine, une absence de pathos décuplant sa présence. Une silhouette aux contours du fatum qui va pulvériser sa propre famille, une identité charnelle muette et mutante: en train de se débarrasser de sa vieille peau de victime pour devenir sujet. Le mélo est mis hors d’état de nuire, ne reste que le spectacle discret d’une chrysalide en train de devenir papillon.

Inceste : Lentement, cinéma et télévision osent aborder le sujet par Catherine Monroy

27/04/95

C’est seulement au milieu des années 70 que le cinéma a commencé à s’intéresser à l’inceste. Si le thème apparaît en filigrane dans « Chinatown » (1974) de Roman Polanski ou dans « Obsession » (1976) de Brian De Palma, il devient central dans « la Fille » (1978) d’Alberto Lattuada, dans « Angel Heart » (1987) d’Alan Parker, dans « Trois Places pour le 26 » de Jacques Demy (1988), et dans « Georgia » (1981) d’Arthur Penn.
L’inceste est presque toujours représenté de la même façon : un homme tombe éperdument amoureux d’une créature irrésistible qu’il découvre être sa fille ; l’histoire de « Peau-d’Ane » revisitée. Il concerne exclusivement des adultes, libres de choisir leur sexualité.

Exception faite du « Souffle au cœur » (1971) de Louis Malle qui évoque, très discrètement, un amour incestueux entre un adolescent et sa mère, il faudra attendre les années 90 pour que le septième art ose mettre en scène des enfants mineurs et… un père : « l’Ombre du doute » (1993) d’Aline Issermann, « Rosine » (1994) de Christine Carrière.
Pour la télévision, restée frileuse, l’inceste n’existe que dans les milieux défavorisés. En 1991, TF1 l’évoquait la première dans un épisode du « Commissaire Moulin ». France 3 l’abordera dans « les Enfants du juge » (1994) et dans la série « C’est mon histoire » (1995). M6 ne sera pas en reste avec sa série « Ange Espérandieu » (1994).

France 2, qui ne s’était pas encore intéressée à la question, prépare actuellement un téléfilm dont l’inceste est, pour la première fois, l’intrigue principale : « Nous tenons à le réaliser sans voyeurisme dans un milieu relativement aisé, explique Didier Decoin, responsable de la fiction sur France 2. Il ne s’agit pas de véhiculer l’idée reçue que ce genre de choses ne se passe que chez des paysans ivres. »

Catherine Monroy