L’inceste inscrit dans le Code pénal : ce que ça changerait

logo-e1Publié à 21h33, le 05 mai 2015, Modifié à 06h51, le 06 mai 2015
Par Cécile Bouanchaud

L’Assemblée nationale devrait inscrire le crime d’inceste dans le Code pénal, en votant des amendements en ce sens le 12 mai prochain.

Ce changement est réclamé depuis de nombreuses années par les associations de victimes d’inceste. Un amendement à la loi sur la protection de l’enfance, prévoyant l’inscription de l’inceste dans le Code pénal devait être examiné mardi par les commissions des Lois et des Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Le texte de loi dans son ensemble sera débattu le 12 mai à l’Assemblée nationale, a indiqué le député Bernard Roman (PS).

Quelle est la situation actuelle ? Actuellement, le Code pénal punit les viols et agressions sexuelles, ainsi que les relations sexuelles avec des mineurs de moins de 15 ans. Mais l’inceste n’est pas défini en tant que tel. Néanmoins,  le fait de commettre un viol « par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait », aggrave les peines prononcées. Toute personne poursuivie pour ces motifs risquent ainsi jusqu’à 20 ans de prison et non plus quinze ans.

Pour autant, les associations de victimes d’inceste réclament depuis plusieurs années d’introduire la notion d’inceste dans le Code pénal. Si bien qu’en 2010, le législateur avait répondu par la positive à cette demande, avant que le Conseil constitutionnel ne censure en 2011 cette disposition législative. A l’époque, les Sages avaient jugé « imprécise » la notion de « famille » alors utilisée.

Quels sont les changements proposés ? Cette fois, l’amendement examiné précise quels sont les membres de la famille susceptibles de commettre des actes incestueux. Le texte dispose ainsi que « les viols et les autres agressions sexuelles (…) constituent des incestes lorsqu’ils sont commis sur un mineur par : son ascendant  ; son oncle ou sa tante  ; son frère ou sa sœur  ; sa nièce ou son neveu  ; son grand-oncle ou sa grand-tante  ; son cousin germain ou sa cousine germaine ». Cette précision vise aussi « le conjoint ou le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité avec l’une de ces personnes ». Un ajout important alors que les familles recomposées sont de plus en plus nombreuses.

Où en est le débat ? Avec ces précisions, la nation d’inceste a donc de fortes chances d’être intégrée dans le Code pénal. Pour l’heure, la commission des Lois de l’Assemblée, qui examinait la proposition de loi pour avis mardi matin, a adopté ces amendements à l’unanimité, a indiqué Bernard Roman, et la commission des Affaires sociales, compétente pour ce texte, devait faire de même dans l’après-midi.

Mais des ajustements devront encore être opérés avec le ministère de la Justice, en particulier sur la responsabilité des frères et sœurs, ainsi que sur celle des ex-conjoints et concubins, a précisé le député. Un amendement légèrement différent sera donc présenté le 12 mai dans l’hémicycle.

Qu’est-ce que ça changerait ? Une fois définitivement votée, cette mesure introduisant la notion d’inceste dans le Code pénal, ne devrait rien changer sur le terrain du droit pur, les peines resteront les mêmes. Mais les associations de victimes d’inceste estiment que mettre un mot sur un mal permettra de libérer la parole des victimes.

« Pour nous, le vote de cet amendement est justement le point de départ. Cela va nous permettre de mener enfin des enquêtes précises et de faire de la prévention », explique Isabelle Aubry, la présidente l’Association internationale des victimes de l’inceste (AIVI), interrogée par 20 Minutes. Selon les derniers chiffres, datant de 2009, deux millions de personnes sont victimes d’inceste en France.

Pour lire l’article, cliquez sur le logo d’Europe 1

Loupiac – 30 ans après les faits – Condamné à lui verser, au titre du préjudice moral, 15.000 euros

Logo-France-bleuMercredi 6 mai 2015

Elle n’a rien inventé selon la justice  
Les explications de Stéphanie Brossard France Bleu Gironde

Une habitante de Loupiac accusait son père d’agressions sexuelles, 30 ans après les faits. La Cour d’appel de Bordeaux vient de confirmer la décision prise en première instance. Elle n’a pas inventé. Il y a bien eu attouchements

 

Vrai inceste ou faux souvenirs induits ? La Cour d’appel de Bordeaux a tranché, et a estimé, comme en première instance en 2013, qu’il y a bien eu agressions sexuelles de la part d’un père, sur sa fille, il y a 30 ans. Il est condamné à lui verser, au titre du préjudice moral, 15.000 euros.

C’est en 2007 que cette habitante de Loupiac, âgée de 39 ans aujourd’hui, dépose plainte et accuse son père de 66 ans, de l’avoir violée entre 1985 et 1988, alors qu’elle avait une dizaine d’années. Accusation portée après la consultation d’un coach en développement personnel, un « thérapeute de pacotille » selon maître Picotin, l’avocat du père dévasté depuis le début de l’histoire. Elle « n’est pas une affabulatrice » avait argumenté Patricia Gravellier l’avocate de la plaignante, à l’audience.

L’argument des faux souvenirs induits ne tient pas

Il ne s’agit donc pas de faux souvenirs induits comme a tenté de le prouver l’avocat du père : une histoire née de ses échanges récents avec un coach en développement personnel, consulté dans une période où elle n’allait pas bien, qui l’aurait poussé à porter plainte. C’est un phénomène venu des États-Unis. Ce sont des pseudo-thérapeutes selon lui, qui construisent dans l’esprit de leur patient mal dans leur peau, des souvenirs prétendument refoulés de l’enfance, une sorte de manipulation de leur mémoire, à laquelle ils finiraient par croire dur comme fer.

Sa cousine affirme aussi avoir été agressée

Dans ce cas précis, selon l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Bordeaux, il y a bien eu inceste, il y a 30 ans. Ce ne sont pas ses visites chez ce coach qui ont entraîné le dépôt de plainte. Elle avait déjà confié par le passé, qu’elle avait été victime d’attouchements sexuels, à son mari, à son frère et à une amie. La Cour d’Appel a également retenu comme éléments de preuves, ses résultats scolaires en baisse et ses absences répétées à l’époque. Ainsi que le témoignage d’une cousine qui assure également avoir été agressée par son oncle, un soir de 1984.

Pour lire l’article, cliquez sur le logo de France Bleu