samedi 22 juillet 2006
Bonsoir à vous,
je répondrai tout d’abord à la question de dan69 :
« Je pense nous sommes nombreux à ne pas savoir quelle therapie choisir… ou alors elle est dictée de fait par des raisons économiques qui nous poussent à choisir des praticiens conventionnés. »
La question de la thérapie ne se pose pas immédiatement. Parfois il faut traverser de larges étendues de détresse et de souffrance pour qu’enfin l’on dise : « tu devrais penser… » Ou bien c’est parce qu’on est arrivé chez un psychiatre suite à une grave décompensation.
Or la question de l’écoute et de l’accompagnement se pose avant d’être face à l’irrémédiable. C’est en amont que ça se passe. Or, là, nous rencontrons le déni de la société. Pour l’instant les rescapés de l’inceste ou de la pédocriminalité – comme les rescapés de traumatismes de guerre – ne trouvent pas facilement d’écoute car les structures et les professionnels n’y sont pas préparés. A ce propos nous vivons dans un univers qui est bien plus proche de la rumeur et du mythe que de la science et les rescapés rencontrent alors bien des difficultés à se faire entendre, leur témoignage ne sont pas toujours pris en compte… leurs histoires sont trop incroyables, etc.
La prise en charge psychothérapeutique n’est qu’une étape parmi bien d’autres.
Ne nous centrons pas sur la technique mais sur la personne et prenons les choses autrement : par quelles étapes suis-je passé/e, qu’est-ce qui me conviendrait le mieux aujourd’hui ? De quoi ai-je besoin ?
Ce sont les premières questions simples que l’on peut se poser quand surviennent à la mémoire des faits qui renvoient à la honte, au malaise, à l’incertitude et au doute sur soi. Les réponses viendraient facilement si nous n’étions pas, en Europe dans le déni.
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9 réflexions au sujet de « Quelle thérapie choisir après des viols par inceste ? selon Kieser El Baz (Illel) »
Bonjour Althaea Officinalis,
Merci pour ces trois commentaires. Leur contenu induit deux types de réponses. Les points précis abordés dans chacun d’eux puis une réponse globale que vous semblez préconiser. Ce vers quoi je penche également, c’est pourquoi, je prendrai mon temps afin d’éviter les pièges de l’empressement.
Bonne journée
Illel Kieser el Baz
« La fonction protectrice de la famille sert le processus thérapeutique. Dans le traitement d’un traumatisme ou d’une psychose, le thérapeute peut, entre autres, activer les résiliences individuelles et familiales dans une démarche intégrative. Comment initier ce processus thérapeutique ? Qu’en est-il des violences ou abus sexuels intra-familiaux ? La famille peut-elle réparer le mal qu’elle a engendré et retrouver sa fonction protectrice ? »
Abus sexuels intra-familiaux et résilience : la famille peut-elle réparer le mal qu’elle a engendré ?
Jean-Paul Mugnier, Éducateur spécialisé, Thérapeute familial et de couples, Directeur de l’Institut d’études systémiques (France)
Cela est peut-être joliment tourné, mais très mal dit : quelle lecture font les linguistes annoncés parmi les spécialistes ?
Tout le monde du transdisciplinaire n’est-il pas tombé d’accord que les mots pour le dire sont la première thérapie possible, soignant logique, cohérence et compréhension de soi et des situations systémiques ?
Il n’y a pas d’usage normal de la sexualité des enfants et donc parler d’abus ne s’applique pas aux enfants dans les cas où ils sont victimes d’agressions pédocriminelles ou incestueuses.
Comment est-il possible que l’annonce d’un tel colloque se fasse sans que nulle part sur 48 pages le mot inceste ne soit écrit ?! (à vérifier facilement sur le pdf avec la fonction Recherche du Reader)
Ou bien l’inceste est-il en train de devenir un tabou de « 2ème intention » ?
Les contempteurs de la protection des enfants, ceux qui cherchent à nous faire croire qu’il peut y avoir consentement ou même provocation et libre arbitre venant d’un enfant de moins de 16 ans – pour des relations équitables avec des adultes – osent parler ouvertement de l’interdit de l’inceste comme d’un « dogme » !
Dogmes et tabous étant donc à combattre disent ces mêmes libertaires et libertins au nom de leur « liberté, c’est mon droit » irresponsable du malheur des plus jeunes ou de leur perversion.
Ces mêmes s’affirmeront progressistes et vous renverront dans les cordes avec les religieux (sauf les Mormonts et quelques sectes…) en vous traitant de réactionnaires.
Le concept de résilience vient à point nommé non seulement faire faire des économies d’éducation et de contrôle sociétal, mais évacuer des valeurs socles affirmées qui permettraient de contrer cette dérive annoncée porteuses de toutes les violences.
Si des familles dites « résilentes » en venaient à inventer et réinventer la roue carrée du cercle vicieux de l’inceste, alors le procédé serait-il prescrit par ces éminents spécialistes qui ne savent pas ce qu’ils disent ?
Toutes les interrogations et toutes les inquiétudes sont permises. Malheureusement.
http://www.ediq.ulaval.ca/fileadmin/ediq/fichiers/A_venir/Programme_1er_Congres_mondial_sur_la_Resilience.pdf
Althaea OFFICINALIS
Ce commentaire a été supprimé par l’auteur.
Illel Kieser el Baz
Je reprends la citation :
« La fonction protectrice de la famille sert le processus thérapeutique. Dans le traitement d’un traumatisme ou d’une psychose, le thérapeute peut, entre autres, activer les résiliences individuelles et familiales dans une démarche intégrative. Comment initier ce processus thérapeutique ? Qu’en est-il des violences ou abus sexuels intra-familiaux ?
La famille peut-elle réparer le mal qu’elle a engendré et retrouver sa fonction protectrice ? »
C’est scandaleusement un des grands principes suivi par des juges pour réconcilier victime et prédateur, souvent contre le parent plaignant…
Le terme même « activateur de résilience » pourrait, s’il ne faisait référence à des drames, s’intégrer à une pièce burlesque avec l’expert au centre coiffé d’un chapeau pointu.
Malheureusement, c’est le pain quotidien de nombreux travailleurs sociaux, lucides et intègres mais qui font du terme « pantois » un emblème.
Illel Kieser el Baz
« Le concept de résilience connaît un si grand succès international qu’il devient nécessaire d’en préciser le contenu afin d’en faire un outil de pensée et de pratique.
De nombreux constats cliniques avaient déjà noté que, dans des circonstances adverses, tous les enfants ne sont pas également touchés (Emmy Werner, 1982). Après un fracas psychotraumatique, ceux qui parviennent à reprendre un nouveau développement de bonne qualité ont quelque chose à nous apprendre (Michaël Rutter, 1985).
Il faut donc étudier dans quelles conditions internes et externes, ces reprises néo-développementales sont possibles. Les neurosciences permettent aujourd’hui de photographier et de doser les marqueurs biologiques de cette résilience neuronale. Les études éthologiques de comportements d’enfants préverbaux en situation standardisée ont permis de rendre observable, spontanément et expérimentalement, comment cette structuration de leur affectivité organise l’intersubjectivité et leur mode de socialisation.
Les échelles statistiquement validées, les entretiens semi-structurés et les histoires à compléter off rent des outils pour évaluer la résilience psychologique. Les études de fonctionnement familial peuvent repérer comment certaines familles résistent au trauma et soutiennent leur blessé, alors que d’autres se laissent entraîner dans la déchirure des liens. Les linguistes savent analyser la structure d’un discours qui motive les interactions autour du blessé, lui permettant ainsi de se remettre à vivre mais qui parfois l’empêchent.
Les sociologues enfin décrivent les cultures, les mythes et les rites qui protègent les individus d’un groupe. Les déterminants sociaux de la résilience permettent d’agir sur l’école et les structures culturelles qui entourent les familles.
L’accumulation de ces données récentes éclaire le processus de résilience. Il importe aujourd’hui de rassembler les chercheurs et de coordonner leurs travaux afin de proposer une attitude intégrative de la recherche et de nouvelles pratiques éducatives et thérapeutiques. »
Boris Cyrulnik
http://www.ediq.ulaval.ca/fileadmin/ediq/fichiers/A_venir/Programme_1er_Congres_mondial_sur_la_Resilience.pdf
… un problème grave étant que Cyrulnik a été auteur et/ou co-auteur de livres traitant de l’inceste principalement ou adventicement qui comportaient presqu’autant de contresens et d’affirmations dangereuses que ceux de Serge Tisseron ou de Caroline Eliatcheff.
Ce qui n’est pas peu dire…
Attendons de voir publier démentis, excuses et rectificatifs avant de s’engouffrer l’esprit tranquille dans le grand paquebot fourre-tout cache-misère du concept de résilience !
Pas de résilience sans éducation, aide extérieure et adultes tutélaires.
Et tout ça coûte cher, nécessite coordination psycho-médico-socio-éducativo-légale et donc politique.
Jusqu’à plus ample informé les prières et la mise en avant de procédés magiques sont en attente de validation sérieuse dans la lutte contre l’inceste.
Lutte qui s’enracine donc – multi repetita placent – par
l’INTERDIT DE L’INCESTE.
Althaea OFFICINALIS
Deuxième commentaire
Je reprendrai votre pharase : « Et tout ça coûte cher, nécessite coordination psycho-médico-socio-éducativo-légale et donc politique. «
Ajoutant que derrière le politique il y a une masse indistincte de dires et de discours opportunistes. Lors de la discussion du texte de loi portant l’inceste au code pénal, Aurélie Philipetti nous dit que pour les soins à porter aux rescapés d’inceste « il y a la résilience. »
Quand des politiques, érudits de surcroit s’en tiennent à la culture télévisuelle pour répondre à des questions de sociétés qui impliquent de grands changements juridiques, on reste stupéfait.
Oui, on peut attendre les vagues et les contre vagues, mais en tant qu’homme de terrain il me faut bien faire face, souvent en subissant les lourdeurs de nombreux collègues. Curieusement cela fait penser à la remarque de Cyrulnik sur le lien de solidarité.
Illel Kieser el Baz
Merci de bien mettre en évidence ce parallèle entre trauma de guerre et suites de pédocriminalité et inceste.
Dès 1996, l’association Exil à Bruxelles et le psychiatre belgo-chilien Jorge Barudi montraient les parallèles entre rescapés de génocide et d’inceste.
Ces pistes de mise en perspective des effets de violences y compris par l’entremise de traditions nuisibles semble encore insuffamment explorées.
Quelques sociologues d’horizons géographiques et culturels variés publient de plus en plus et de mieux en mieux.
Ces morceaux de puzzle seront bien un jour pensés de façon globale dans l’intérêt de la protection des enfants et donc de l’avenir de notre monde.
http://www.ediq.ulaval.ca/fileadmin/ediq/fichiers/A_venir/Programme_1er_Congres_mondial_sur_la_Resilience.pdf
http://www.exil.be/index.php?id=13,0,0,1,0,0
Althaea OFFICINALIS
Pour l’instant la pensée globale et les méthodes d’exploration qui l’accompagnent – je cite le comparatisme – demeure suspecte en psychologie, surtout la psychologie francophone. Mais les historiens et les archéo-anthropologues n’ont plus d’hésitation à ce sujet. C’est pourquoi leurs apports sont parfois plus intéressants que ceux des sociologues qui, d’un côté raisonnent en unité de chiffre et de l’autre interprètent leurs résultats sans trop savoir ce qu’ils font car ils n’ont pas les outils pour cela. Si bien que l’on tombe régulièrement dans l’idéologie.
Concernant le point particulier des victimes de traumas, de guerre ou de violences précoces, c’est encore un point aveugle, une terre inconnue pour psychologue, médecins et psychiatres.
S’agissant des victimes de guerre, elles renvoient une image négative et sombre aux sociétés concernées. C’est pourquoi elles sont ignorées.
Pour les victimes de famine, guerre civiles et autres catastrophe provoquées par l’espèce humaine, c’est à nous tous, citoyens de pays riches, qu’elles renvoient l’image noire de l’envers du miroir.
Enfin, au sein même de nos sociétés les victimes de viols, d’inceste et autres maltraitance, point aveugle car à trop y regarder c’est notre représentation du monde, notre éthique qui sont mis en cause. L’intuition d’un immense bouleversement global surgit, alors autant croire aux soucoupes volantes…
Illel Kieser el Baz
Dans la thérapie quelle qu’elle soit il faut inclure le dessin. Parfois cela remplace les mots et dans cela il peut en ressortir plus que les mots. Je le vois avec moi et mon psychiatre. Il le voit et comprend. Il repaire mes troubles dans mes dessins dans petits détails que ne ressortent pas forcément en séance.
Beatrice